The Walking Dead : Silence in the face of death [Tome 3]

Chapitre 94 : Toujours là-bas

Point de vue d'Ariane :

Le portail grince devant nous. Je regarde Negan, debout à côté de moi, son bâton à la main. Je me remémore ce qu'il s'est passé dans les bois. Il a réussi en à peine quelque minutes à faire sortir toute la colère, toute la rage que je gardais en moi pour faire bonne figure et ne pas inquiéter mes proches. Negan a lu en moi comme dans un livre ouvert alors que je n'avais pas recroisé son regard depuis sa chute. Il n'a pas hésité à prendre le rôle du méchant, à ressortir des phrases que lui seul osait prononcer pour prouver qu'il avait raison. Pour prouver qu'il avait toujours de l'importance à nos yeux. Comme si ses paroles d'ancien leader pouvaient tout changer. Negan était redevenu le monstre d'il y a six ans en un claquement de doigt dans le seul but de m'aider. J'ai encore du mal à croire qu'il ait pensé à quelqu'un d'autre que lui-même.

Nous entrons tous les deux et j'échange un regard avec l'homme grisonnant. Il se contente d'un léger hochement de tête avant de s'éloigner.

J'observe au loin un tas de cadavres putréfiés. Ils continuent à s'empiler et l'odeur est plus nauséabonde que jamais. Je m'éloigne du portail pour ranger le matériel dans l'armurerie lorsque je reconnais la silhouette d'Anna, assise près de la pompe, les pieds dans l'eau. Je m'approche pour la rejoindre et m'assois à côté d'elle. Je pose les affaires près de moi et reste silencieuse, observant du coin de l'œil l'air perdu de mon amie. Je l'ai rarement vue aussi abattue. Anna finit par soupirer avant de poser le regard face à elle.

- Ca a été avec Negan ?

- Oui, je réponds après un instant de réflexion.

- Il semblerait que Rick ait eu raison de le laisser en vie.

Je hoche plusieurs fois la tête, le regard dans le vide tout en me remémorant le jour où notre leader a décidé de sauver notre ancien ennemi sans nous avoir consulté avant. Je frissonne et tente d'effacer ce souvenir de ma mémoire.

- Pourquoi tu restes assise là toute seule ? Je demande.

- J'avais besoin d'être seule.

- Tu sais que je suis là si tu as besoin de parler.

Anna rit jaune et se frotte le nez.

- Tu as assez de problème comme ça.

Je lui prends les mains et la regarde droit dans les yeux.

- Parle-moi, j'insiste. Tu n'es plus toi-même depuis un moment.

- Il n'y a rien à dire.

- Si. Ça fait des semaines que ça dure. Au début, je croyais que c'était lié à la fatigue et au stress. Mais j'avais tort. Alors parle-moi.

Anna baisse la tête et se frotte le visage. Je l'entends déglutir. Elle reste silencieuse de longues secondes, espérant peut-être que j'abandonne.

- C'est... C'est comme si j'étais encore là-bas. Comme si je n'étais jamais sortie de cette écurie. Tous les jours j'ai des flashbacks, mais ils se mélangent comme les pièces d'un puzzle.

Anna pose un regard sur moi. Sûrement pour voir ma réaction. Mais il n'a fallu que sa première phrase pour que mon visage se décompose. Je baisse la tête et ferme les poings. J'expire et relève la tête pour lui intimer de continuer.

- Des cris. Et puis... Il y a cette odeur. Et du sang partout.

Sa lèvre inférieure tremble. Malgré moi, j'imagine la scène qui s'est déroulée devant ses yeux. J'imagine les cris, les plaintes, la peur sur les visages, l'odeur du sang et de la paille souillée. Je visualise Alpha, le bras levé, prête à tuer sans sourciller.