La dure réalité

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Le trajet en voiture s’est fait rapidement, étant prioritaire avec une détenue à bord, les Marshals sont passés à chaque carrefours sans chercher à comprendre s’ils avaient le feu rouge ou non. Tels des pompiers dans l'exercice de leurs fonctions, ils ont allumé la sirène ainsi que les gyrophares et ont roulés jusqu’à arriver devant l’aéroport.

Je pensais que l'un d'eux allait me faire sortir et me garder sous surveillance le temps que l'autre parte garer la voiture, mais il n’en est rien. À la place, le conducteur s'est placé sur une bande d’arrêt d'urgence, lumière toujours allumé puis est sorti avec son collègue avant de m’extraire du véhicule, les menottes toujours aux poignets et aux chevilles.

Nous avons marché dans l’aéroport d'une démarche aussi rapide que possible malgré les fers ne me permettent pas d’avoir une allure normale. Je sais très bien que si je me mettais à courir on me prendrait pour un pingouin sur la banquise.
Je suis donc placée entre les deux Marshals, je ne saurais dire s’ils sont là pour ma sécurité ou celles des différents voyageurs qui me scrutent et me jugent du regard, peut-être les deux finalement.

Après s’être présenté à l'accueil, on apprend finalement que l'avion est déjà là et que les passagers ne vont pas tarder à monter à bord, à la suite de ses mots, la femme au guichet indique une pièce à l'abri des regards où je peux être placé, quelqu’un viendra les prévenir que c’est à mon tour de monter dans ce tas de ferraille volant.

Alors que nous sommes dans une petite salle d’attente, l’un des Marshals m’explique ce qu’il se passera durant le voyage. Pour commencer, je suis la dernière à monter mais également la première à descendre, c’est une mesure de sécurité si je décidais de prendre un des passagers en otage pour obtenir quoi que ce soit.

Je me retiens tant bien que mal de lever les yeux vers le ciel. Je sais très bien que j’ai pris trente ans, je ne vais pas chercher à me mettre plus dans la merde que je le suis déjà.
C’est lorsque l’avion est sur le point de partir en direction de la piste d’envol qu’un agent de sécurité vient nous chercher pour nous emmener en direction de l’avion. Durant toute la traversée de l’aéroport le silence est roi.

Je n’ai aucun doute que mon histoire, du moins l’affaire en elle-même, a été retranscrit dans les journaux locaux. Comme pour toutes les histoires que l’on peut entendre dans les informations, chacun y va de sa propre opinion, de sa propre remarque.
Mais je fais comme si de rien était, après tout, d’ici peu je serais dans un avion avec plusieurs centaines de personnes, autant à ce que je me prépare mentalement à cette ambiance.

Après être passée au détecteur de métaux, et qu’il ait sonné pour les menottes et les chaînes, je me dirige, toujours accompagnée du vigile et des Marshals vers l’escalier qui mène au corps de l’avion.
Si l’ambiance dedans était au beau fixe, c’est lorsque les premiers passagers voient mes entraves que le silence se fait progressivement. Après avoir regardé toutes les personnes présentes dans un rayon assez court de là où je suis, on m’installe dans un siège non loin de l’issues avant de me mettre ma ceinture de sécurité, tandis que le vigile fait demi-tour, soulagé qu’il y ait eu aucun incident.

- Malheureusement, même lorsqu’il sera possible de te retirer la ceinture je ne pourrais pas le faire, m’indique l’un des Marshals.
- Je sais, le protocole

Après un simple mouvement de tête dans ma direction, celui-ci met également sa ceinture tout en écoutant les consignes de sécurité émise par le pilote et regardant l’hôtesse montrer les différents mouvements à effectuer en cas de problème.
Entre le passage dans l’aéroport puis le silence qui règne depuis que je suis montée à bord, j’ai l’impression d’être une bête de foire, un monstre de la pire espèce.

Trente ans fermeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant