Sept jours avant le procès

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Nous voilà le trente et un Décembre, et ça fait maintenant deux jours que les garçons sont partis. Leurs départs à tous les deux a été comme un déchirement pour moi, je penses que je m’en souviendrais toute ma vie.

Flashback du vingt-neuf Décembre

Pour la dernière fois, je vois les garçons se lever de leurs lits en grognant, après un léger passage devant le lavabo, ils mettent leurs tenues civils, dans quelques heures, ils seront de l’autre côté de la grille, parmi les civils.

Une fois tous les deux prêts, je me lèves à mon tour et me débarbouille le visage avant de changer mon uniforme, mettant celle utiliser dans un sac de toile, prête pour un lavage.

Depuis le temps que nous nous côtoyons, il n’y a jamais eu d’ambigüité entre nous, il m’est arrivée souvent d’être en sous-vêtement devant eux, mais ils ont toujours fait en sorte de respecter mon intimité.

Une fois prête, j’embrasses la photo qui est devenue une de mes routines puis je sors de la cellule et rejoins les garçons qui se trouvent dans le couloir. Avec un simple mouvement de tête, nous nous dirigeons tous les trois en direction du réfectoire pour notre petit déjeuner.

Comme tous les matins, nous avons le droit à un gobelet de café bon marché, deux tartines de pains déjà beurrées et une orange pour le fruit.

Les plateaux en mains, nous partons dans une table un peu à l’écart. Pour aujourd’hui, nous ne voulons pas parler, appréciant notre proximité et nos silences. Je ne veux pas penser que dans quelques heures, ils seront dehors et moi je serais là, seule.

- Faut que je parles ! Lance Casey en prenant son orange.

Nous levons, Jacob et moi, nos têtes pour regarder Casey, nous fixant tour à tour.

- Certes nous allons partir, mais ce n’est pas pour autant qu’il faut faire une tête d’enterrement ! Personnellement, je te promets de t’écrire, peut-être pas tous les jours, mais au moins une fois par semaine ! 

Je regardes Jacob qui me fait un clin d’œil avant de passer une de ses mains dans mes cheveux, signe qu’il pense exactement à la même chose que Casey.

C’est comme libérée d’un poids que je me mets à sourire avant que l’on parle, comme si rien de spécial n’allait se passer.

Puis finalement, ils sont partis en fin de matinée et pour ne pas commencer à avoir de problème je suis restée dans ma chambre, sans laisser personne me mettre les nerfs à vifs.  Mais dès le lendemain, j’ai repris mes habitudes.

Je retournes à ma page blanche présente devant moi, après un léger soupir, je prends un stylo mis à ma disposition et commence à rédiger ma lettre.

Ma petite Eli,
Si tu savais comment ta lettre à pus me faire plaisir ! Je suis heureuse d’avoir de tes nouvelles malgré la situation. Même si ce n’est pas la première, je suis contente que tu es persévérée pour que je puisses en recevoir une.

Malheureusement, je m’en doutais un peu que maman refuse de te laisser me contacter. Ce que je te demandes sera difficile, je le sais, mais j’aimerais que tu fasses attention à toi, et surtout, si maman tente de te frapper sans que tu es fait de bêtise, va voir quelqu’un qui habite près de toi.

Que ce soit la dame aux chats ou même le papy qui râle pour son journal. Je ne veux pas que tu sois en danger en sachant que je ne peux pas te protéger.

En parlant d’elle, j’aimerais que tu l’as remercié à ma place pour t’avoir aider du mieux qu’elle le peut, en sachant qu’elle n’était pas obligée, cela rend son acte plus important à mes yeux.

Tu me manques aussi petite sœur, plus que tu ne saurais l’imaginer. Pour la maison, je ne peux pas te donner de conseil malheureusement, mais essais tout de même d’avoir des amis et des personnes sur qui compter, avec qui tu pourras parler comme si c’était moi. Une grande sœur de cœur en gros.

Pour maman, je penses qu’il faut qu’elle se fasse à l’idée que maintenant elle est libre, je ne sais pas si elle était vraiment amoureuse d’Etienne, mais elle tenait à lui, c’est certain. Pour ton bidon qui fait du bruit, essais de te nourrir, même si ce n’est qu’avec un yaourt ou un morceau de pain, mais n’attends pas après maman, je t’ai appris à faire des sandwich sans te faire mal.

Pour ton départ loin de Camden, je ne sais pas ce que je peux te dire, d’un sens ça me rend triste parce que tu perdras tout tes repères et les gens capable de t’aider, mais surtout, tu pourras enfin partir de cette ville et espérer vivre de manière à être en sécurité. J’espère juste que je pourrais avoir une nouvelle adresse pour t’écrire. 

Il y a toujours une solution Elise, nous trouverons un moyen pour nous parler, nous voir en revanche, sera beaucoup plus difficile, mais tu as une photo de moi, alors garde là précieusement. Être Loin de toi est dur aussi pour moi, mais nous sommes fortes, nous arriverons à surmonter tout ça, j’en suis certaine.

Si maman n’a pas débarrasser ma chambre, tu verras au fond d’une boite à chaussure, il y a un CD, c’est ce que je te mettais la nuit quand je devais partir rapidement, tu t’en souviens ? Mets-les lorsque tu en as besoin, gardes-les.

Tu peux être tout ce que tu souhaites si tu t’en donnes les moyens : princesse, guerrière, reine. Crois en toi et tu pourras réussir tout ce que tu entreprends.

Quoi que tu fasses, que ce soit maintenant ou plus tard, je suis fière de toi, tu es une bonne personne Elise et tu resteras toujours ainsi. Je t’aime de tout mon cœur moi aussi, prends soin de toi. Je t’aime.

Ta grande sœur Tasia.
PS : Merci pour la photo de papa, comme ça, quoi qu’il arrive toi aussi tu ne me quitteras pas.

Après avoir plié la lettre et l’avoir glisser dans l’enveloppe portant l’adresse du domicile de ma mère, je la poses dans la boite prévue à cet effet et retourne dans ma cellule en faisant attention à ne croiser le regard de personne. Et ce même si il s’agit du dernier jour de cette année.

La pression monte de plus en plus au fur et à mesure des jours qui passent, parfois, j’ai l’impression que la cellule d’isolement est devenue ma nouvelle chambre tellement j’y passes du temps.

C’est le quatre Janvier, la veille de mon procès, que je reçois une nouvelle visite. Je sais d’avance que ce n’est pas mon avocat, n’ayant pas encore eu la psychologue, je me doute que ce soit elle, et le fait que l’on aille vers l’infirmerie et non vers la salle des visites confirme bien ce que je penses.

Lorsque je rentre dans cette pièce blanche, la première personne que je vois est une femme blonde au corps élancé vêtue d’un tailleur sombre. Des lunettes suspendues à son blaser, il dégage d’elle quelque chose qui peut mettre en confiance le plus réfractaire.

- Bonjour Anastasia, je t’en pries, installe-toi dit-elle d’une voix douce.

Je m’installe donc dans la chaise qu’elle me désigne, à quelques centimètres de la sienne, au moment où le gardien part, nous laissant seule. Il se passe quelques minutes avant qu’elle ne prenne la parole.

- J’ai discutée avec ton avocat, donc je n’ai pas besoin de parler de la raison qui t’a pousser à faire cet acte-là, par contre, j’aimerais parler de ton dossier depuis que tu es ici, si tu le souhaites bien-sûr.

N’y voyant aucune objection, je lui fais signe de parler avec mes mains. C’est avec un léger sourire qu’elle sort un dossier de son sac avant de le poser sur ses jambes croisées.

C’est ainsi que j’apprends que mon dossier est assez fournis, surtout dans le fait que je suis quelqu’un d’insolente et assez violente avec les autres détenues et parfois même, avec les gardiens. Apparemment, je viens même de dépasser le record des séjours en isolement en un laps de temps de trois mois à peine.

Nous continuons de discuter sur mon dossier, même si pour moi, il n’y a rien d’autre à ajouter, elle au contraire, pense que ces documents lui en apprend beaucoup sur ce que je suis.

Juste après, je suis conduite dans le réfectoire pour le repas du midi, comme toujours depuis le départ des garçons, je me mets seule, fusillant du regard toutes personnes cherchant à m’approcher. Avec le procès qui commencera demain, j’ai de plus en plus de mal de garder le contrôle, pourtant, ça fait bientôt une semaine que je tiens !

J’ai mangé mon plateau à la vitesse de la lumière, ayant touché uniquement à mon orange puis part en direction de la cour. Rester entre ces quatre murs me stresse de plus en plus, pourtant je ne suis pas sujet à des crises de claustrophobie, mais peut-être que ça finira par se faire ?

J’imagines bien la tête de l’infirmière ou même des gardiens si je dois rester en prison à vie et qu’en plus, je ne supporte pas d’être dans des endroits clos.

Juste après la douche obligatoire, je pars dans ma chambre ayant le droit à quelques minutes de temps libre avant le repas du soir. La première chose que je remarques, c’est la lettre blanche poser sur mon lit, avec un tampon rouge dessus, signe que c’est un retour à l’expéditeur.

Je me mets à froncer les sourcils, je n’ai envoyer que trois lettres, les garçons et ma petite sœur, seulement, c’est trop tôt pour que ce soit eux, je ne l’ai envoyé qu’hier, il ne s’agit donc que de ma petite sœur. Je m’approche doucement de cette lettre, le cœur battant à tout rompre, je ne sais pas pourquoi, mais je sens que ce n’est pas une bonne nouvelle pour moi.

Je l’a prend dans mes mains tremblantes, puis voir complètement rouge lorsque mon cerveau enregistre ces trois mots.

Retour à l’expéditeur

Je vois rouge, je ne suis vraiment pas loin de la crise de nerf parce que je sais très bien qu’il ne s’agit pas d’une mauvaise adresse ou quoi que ce soit d’autre, ça, c’est un coup de ma mère.

Je tente de me calmer avec les méthodes de respiration apprise par Casey, ça ne me fait aucun effet, le yoga ? Même chose. Non, pour le coup je penses que je vais vraiment devoir me battre une nouvelle fois. Je ne me serais pas tenue à carreaux très longtemps.

Alors que mes poings me démangent, j’entends la sonnerie qui signifie que c’est l’heure du dîner. Je pars doucement vers le réfectoire, les mains dans les poches de mon uniforme.

Les poings serrés au point d’avoir les jointures blanchis, je regrette de ne pas avoir de musique pour m’isoler des autres. Être dans un coin, seule, aide beaucoup, mais les entendre provoque l’effet inverse.

Je fais la queue comme tout le monde pour prendre mon plateau, fermant les yeux d’exaspération en entendant les gardiens hurler à tout va ou les autres détenues rirent comme s’ils étaient en vacances.

Je repères sans vraiment le vouloir les deux filles qui partageaient ma cellule, elles sont toutes les deux, comme toujours quand j’y penses. Mais leurs regards laisse penser qu’il se trame quelque chose, du moins, qu’elles préparent une vengeance, sauf que de ce que je sais, je suis la seule qu’elles ont à dos.

Dans un calme que je ne maîtrise presque pas, je prends mon plateau en adressant un léger sourire aux cuisinières, en signe de remerciement, puis me dirige vers une table seule.

Je prends doucement ma fourchette et pioche dans ce qui est mon repas du soir, c’est alors que l’aliment est à quelques millimètres de ma bouche que deux chaises se mettent à grincer devant moi. Je lèves doucement les yeux avant de pousser un soupir, les deux filles qui me déteste.

- Qu’est-ce que vous voulez toutes les deux ? Soupiré-je en reposant mon couvert.
- Récupérer notre place, nous sommes les plus respectées, seulement depuis que tu es là, ce n’est plus le cas ! Dit l’une d’elles en grinçant des dents.

Je ne réponds rien, préférant commencer mon repas en vue du procès qui commence demain, mais elles ne voient pas ça du même avis lorsqu’elles se mettent à énumérer des hypothèses sur mon arrivée entre ces murs.

Mais lorsqu’elles commencent à dire que j’ai fait du mal à un membre de ma famille, je me mets à voir rouge. Après avoir balancée mon plateau, je montes sur la table avant de me ruer sur l’une d’entre elles, l’autre beaucoup trop occupée à crier à l’aide.

Je ne sais pas combien de temps ça a durée, tout ce que je sais c’est que personne n’est venue pour nous séparer, une fois qu’elles ne se débattent plus, je me lèves et part en direction du quartier d’isolement pour la nuit. Espérons que la nuit passe rapidement, je ne supportes pas la pression de l’interminable attente.

Trente ans fermeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant