Les visiteurs

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Les jours passent et bien que le mois de septembre soit déjà bien entamé, j’ai l’impression d’être dans ces lieux depuis hier seulement. Néanmoins, j’ai pu apprendre, grâce à Flora, pourquoi je suis dans le bloc J et ce qu’il signifie.

Il s’agit tout simplement de l’unité où se trouve les plus dangereux de la prison, entre autres, ceux qui ont pris, soit la perpétuité, soit pour meurtre. Autant dire que je ne suis pas totalement rassurée lorsque je ferme les yeux le soir. Mais je suppose que c’est la même chose de leurs côtés, chacun se créer leurs propres groupes pour assurer leurs chances de survies en cas de problème.

De ce que j’ai pu constater, les émeutes entre détenus sont monnaies courantes et bien que les bâtiments soient bien gardés, aucun mattons ne cherchent à les séparer, se contentant simplement de regarder le problème et attendre qu’ils se fatiguent d’eux-mêmes. Avant de les rouer de coups pour montrer l’exemple.

J’ai aussi remarqué que les prisonniers partant pour l’isolement sont rares. De ce que je vois, ils n’y vont pas pour une simple bagarre mais pour quelque chose de beaucoup plus grave, en gros ici, c’est la loi du plus fort, tu as fait une connerie, assume de te trouver en ces lieux et surtout, survit si tu veux sortir sur tes jambes.

Comme pour mon ancienne prison, les décès entre ces murs s’enchainent, mais pour le coup ce ne sont pas les gardiens pénitencier qui retirent les cadavres mais les détenus eux-mêmes, si bien que tous les matins, sauf rare exception, nous voyons quelques corps posés sur une table à roulette en attendant d’être rapatriés pour les familles ou brûlés s’ils n’ont personnes.

C’est cela qui me fait vraiment comprendre qu’ici, bien que nous gardions notre nom de famille qui nous donne un semblant d’identité et d’appartenance au monde tels qu’il est, nous ne sommes rien d’autres que des animaux obligés de vivre en communauté sous surveillance constantes que ce soit par des gardiens ou les caméras situées un peu partout.

Etant donné qu’ici c’est le même climat qu’au Mississippi, je suis comment cet été, avec l’uniforme ouvert sur mon marcel qui laisse apparaitre mon tatouage grâce à mes cheveux attachés à la va vite.

Pour les autres détenus, la plupart d’entre eux sont torse nu mais avec, malgré tout, le marcel sur lui au cas où. Autant dire que cela m’a fait bizarre de les voir ainsi, après tout, les seuls gars que j’ai pu voir dans cette tenue sont des adolescents à peine développés. Ou des jeunes adultes aussi fins que des allumettes, sauf exception de Casey et Jacob qui bien qu'ils soient développés ont une corpulence sec.

Mais ce qui me préoccupe aujourd’hui ce n’est pas la chaleur qu’offre le soleil, en sachant qu’il n’y a aucune trace d’ombre sur le sol. Mais le fait que tous les détenus semblent survoltés, du moins plus qu’à la normale. Pourtant, ce n’est pas comme dans l’attente d’une énième émeute, c’est quelque chose d’autres, de plus joyeux.

Je profite de ce moment relativement calme pour sortir une feuille ainsi qu’une surface dure et un stylo pour écrire une lettre aux garçons. Bien que je m’en doutais, ici les lettres sont lues par les gardiens et certains même, ne sont pas envoyés. Pour ce cas-là, c’est tout simplement parce que certains en profite pour parler de leurs trafics, pas malin j’en conçois mais que voulez-vous, certains n’ont pas invité l’eau chaude.

Dans ma lettre, je leurs demande seulement comment ils vont et s’ils réussissent à trouver un juste milieu entre leurs vies professionnelles et personnelles. Ce que je souhaite avant tout pour eux, c’est leur bonheur.

Lors de leur dernière lettre, j’ai appris que Casey avait rencontrer une jeune femme qui semble lui plaire, c’est donc naturellement que je lui demande si, au moins, il lui a proposer une sortie pour faire connaissance et voir si le ressentie est réciproque.

Je suis sortie de ma bulle à cause de bruit de moteur, en levant la tête, je ne remarque rien d’étrange si ce n’est que les autres détenus commencent à se lever et crier pour ce faire entendre par les personnes qui conduisent non loin de là.

Ce n’est que quelques minutes plus tard que je vois débarquer, sous les cris hystériques des détenus, un car ainsi que deux motos. C’est donc sans mal que je comprends qu’aujourd’hui est un jour que je n’aime absolument pas, celui des parloirs.

Après tout, comment aimer le jour des visites si je n’ai jamais personnes qui vient me voir ? C’est comme aimer une fête dont cela n’a aucune correspondance avec sa propre religion, certes beaucoup la fête pour le plaisir d’être ensemble, mais qui le fait pour la véritable célébration ? Très peu de personne je pense.

Sans sommation, je vois les détenus, qui attendre probablement du monde, se lever et partir en direction des grillages pour frapper dedans, comme pour remercier devant témoins, les personnes qui ne les ont pas oubliés, de quoi me donner un léger pincement au cœur en pensant à ce qu’était ma famille.

Je ne sais pas si c’est totalement débile ou si j’aime me faire du mal mais depuis que j’ai la lettre qui annonce que je ne fais partie d’aucune famille suite à la demande de ma génitrice de me renier, je la lis tous les matins comme pour me l’imprimer dans la tête que désormais je suis seule, avec plus aucune attache, si ce n’est les personnes que je choisis.

Bien que presque tous les détenus soient agglutinés contre les grillages, je remarque les visiteurs descendre de leurs moyens de locomotion puis de marcher en direction du bâtiment central, celui qui gère tout ce qui est administratifs.

Je finis par reprendre la lettre que j’étais en train d’écrire, en plus de tout ce qui est marqué, je leur parle également de la journée des visiteurs et de ce que je ressens, sans parler des comportements de ceux avec qui je partages ma vie.

Un frisson étrange s’empare de mon corps, je ne sais pas pourquoi mais j’ai la nette impression d’être observée, je dirais même plus que ça, la sensation d’être scrutée comme si on essayait de lire en moi. En levant la tête, je remarque deux hommes en blouson de cuir me regarder avec une indifférence des plus totales.

La première chose qui me frappe sont les deux blousons de cuir malgré le soleil ardent d’aujourd’hui. Ils sont couverts de patch ayant sûrement des significations spécifiques, mais surtout, je repère celui de « président » et de « road captain ». Sans parler des surnoms tels que Fox pour l’un et Lizard pour l’autre.

De ce que je comprends, Fox est le président, un grand gaillard d’un bon mètre quatre-vingt-dix avec une corpulence relativement importante, il est brun avec les cheveux courts et une légère barbe de quelques jours. Des yeux noisette virant au doré en plein soleil, ce qui capte avant tous le regard sont ses tatouages sur le visage.

Bien qu’il ait une cicatrice qui barre un de ses yeux, c’est le petit tatouage en force de poignard avec la lame vers le ciel, s’arrêtant pile à la base de la balafre, qui attire mon attention. Tout simple et noir, le mot « freedom » est tatoué de l’autre côté en écriture gothique.

Un tatouage en forme de renard est présent sur sa main droite alors que la seconde est accrochée sur le grillage, comme s’il aimerait faire disparaitre le seul obstacle qui nous sépare.
Lizard lui, est un peu plus petit mais pas moins corpulent que son prédécesseur.

Blond avec une coupe digne des surfeurs et des yeux verts, rieurs, il porte le tatouage d’un lézard sur la base de sa mâchoire avec la tête arrivant au coin de l’œil gauche. Percé à l’arcade droit, il ne semble pas bien dangereux de base, mais tout le monde sait qu’il faut se méfier de l’eau qui dort et surtout, de la plus insignifiante des créatures.

Je reporte mon attention sur Fox, sans plus attendre, un véritable combat de regard se fait entre nous. Je ne sais pas pour lui, mais en ce qui me concerne, je suis complètement déconnectée de la réalité, lisant sans aucun problème dans les yeux de la personne qui me fait face.

Je ne connais absolument rien en ce qui concerne la vie des bikers. Dans ma ville nous avions beaucoup de violence, c’est un fait, mais uniquement des problèmes de gangs ou entre toxicomanes.

Mais je ne serais pas surprise qu’ils ne soient pas des enfants de cœurs, loin de là même. Bien que je devrais être réfractaires à l’idée d’être devenue comme une obsession pour un motard, surtout en vue de sa position, je ne bouge pas d’un iota. Attendant tout simplement le verdict final de celui qui me fait face.

Celui-ci se met subitement à me sourire, ce qui semble aussi surprendre son frère d’arme. Sans dire quoi que ce soit, Fox se détourne de mon regard avant de partir en direction du bâtiment, rapidement suivit par Lizard qui est sur le point de lui poser une question.

Ne comprenant absolument pas ce qui a bien pu se passer, je continue de les détailler du regard. Leurs démarches, à l’un comme à l’autre impose le respect, sans parler de leurs regards qui peut sûrement se montrer d’une sévère dureté.

Dans le dos de leurs blousons se trouve ce que je suppose, le signe de leurs appartenances ainsi que le nom, les Animal’s Fury. En fermant les yeux, j’essaies tant bien que mal, de me souvenir si j’ai déjà entendu parler de ce groupe, que ce soit en bien ou en mal, mais rien ne me vient.

Ne les voyant plus, je continue d’écrire ma lettre en faisant, dans le même temps, mention de ce groupe de motard qui vient de piquer ma curiosité.
Je ne sais pas si les garçons pourront me renseigner sur eux, mais je tiens à tenter tout de même, après tout, qui ne tente rien n’a rien.

Une fois terminé, je me lève et part en direction de ma cellule alors que les détenus prennent tous le chemin inverse, pressés de retrouver leurs proches.

Trente ans fermeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant