Chapitre 77

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Je reprenais doucement mon souffle. J'étais satisfaite d'avoir pu dire, si ce n'est crié tout haut, ce que je pensais, et c'était avec assurance que je plongeai mon regard dans celui de mon interlocuteur. 

Momonga resta immobile un court instant, encore percuté de plein fouet par ma prise de parole, mais il avait rapidement repris contenance. Il soutint mon regard. Il restait muet, mais je savais parfaitement qu'il n'en pensait pas moins. Comme il me connaissait, je le connaissais. Un lien maître-élève était loin d'être facile à effacer… Il m'avait en partie entraînée, en partie formée. Il avait toujours vu en moi un bon potentiel et m'avait souvent parlé de reprendre sa suite en tant que vice-amirale dans le futur. Mais toute cette confiance, tout cet avenir avait amorcé sa chute lorsque j'avais déchiré mes manches dans le bureau de Sengoku, pour finalement être totalement détruit par mon serment d'allégeance au plus jeune des Yonko. Je ne savais que trop ce que devait ressentir mon ex-supérieur en me faisant face : de la déception. Pourtant, pour être totalement sincère envers moi-même, le jugement qu'il portait à présent sur moi était bien le dernier de mes soucis. 

Je me permis, durant un bref instant, de jeter un coup d'œil aux autres marines avant de reporter mon attention sur le vice-amiral. Momonga était un homme d'honneur, mais je ne pouvais affirmer que ce soit aussi le cas de ses subordonnés, qui n'hésiteraient sûrement pas un seul instant à nous attaquer dans le dos si nous n'étions pas assez vigilants. 

Autour de nous, je pouvais encore entendre les bruits des combats et le léger crépitement des flammes que Sabo commençait à produire. Nous nous retrouvions tous les deux, seuls, contre une unité de soldats entière, mais je n'éprouvai aucune peur. Malgré mes blessures et ma défense quasi-inexistante, mon instinct me guidait. S'ils attaquaient, je pouvais toujours me servir de mes jambes et des menottes en alliant agilité et ruse. Et puis, la présence de Sabo et la puissance qu'il possédait me confortait dans l'idée que, même si j'étais réduite à l'état de demoiselle en détresse, je n'allais ni mourir ni retomber entre les mains de la Marine. Malgré tout, je préférerais être utile. Il ne me restait plus qu'à croiser les doigts, user d'intelligence et avec un brin de chance, de gagner. 

Le bruit d'un katana coulissant me fit émerger de mes pensées. Mon ex-référent avait saisi la poignée de son arme et commençait lentement à la sortir, en déclarant d'une expression contrariée :

- J'aurai voulu ne pas avoir à en arriver là, mais tu ne me laisses visiblement pas le choix. 
- Ça t'étonne ? 

Il ne me répondit pas. Le temps des paroles était terminé. D'un geste vif, il dégaina son katana puis se précipita dans ma direction. Sabo esquissa un mouvement et commença à fondre vers notre adversaire, flammes sorties, mais les soldats l'interceptèrent à l'aide de ce qui semblait être des chaînes en granit marin, dont ils se servaient en guise de lassos. Je savais que Sabo ne risquait rien, qu'il était assez fort pour se débarrasser de ce léger souci, mais qu'il n'aura pas le temps de stopper Momonga. Je me retrouvais seule, face à un homme armé qui ne reculera devant rien. Je fronçai les sourcils et posai mon pied droit devant moi. S'il voulait vraiment se battre, je n'allais pas me gêner. J'allais faire honneur à mon nouveau mentor et montrer à l'ancien ce qu'on pouvait apprendre par des pirates. 

Alors qu'il courait dans ma direction, mon adversaire se propulsa en l'air. Il arriva au-dessus de moi et commença à abaisser son katana pour m'atteindre. Je levai mes mains menottées en l'air, prête à les abattre de toutes mes forces, mais soudain, un bruit écœurant retentit et le vice-amiral fût balayé en arrière. Il tomba violemment au sol un peu plus loin. En entendant le fracas, ses subordonnés à demi-brûlés se retournèrent vers lui. Ils émirent un léger couinement de surprise lorsque le marine se redressa avec difficulté. Un léger rictus de souffrance tendait ses muscles et son costume rayé, d'ordinaire si impeccable, était à présent déchiré et nuancé d'une grande tache écarlate s'étendant de son épaule gauche jusqu'à ses côtes. Il tentait de se remettre debout, et je pus voir plusieurs fragments minces et translucides provenant de ses blessures scintiller au soleil, avant qu'il ne grimace et ne lâche par réflexe son katana pour venir appuyer sur ses blessures. Le sang coula librement entre ses doigts, les recouvrant par la même occasion, et les petits débris que j'avais aperçu semblaient en être la cause. Ils étaient venus se planter à des endroits stratégiques, assez pour causer une hémorragie, peut-être même bloquer quelques nerfs, mais sans pour autant tuer sur le coup. 

Une Question de Justice [One Piece]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant