Une Question de Justice [One Piece]

Chapitre 25

- C'est moi qui l'aurait !
- Non, moi !
- N'importe quoi !
- Aïe ! Pousse pas !

Sabo courut vers le bastingage, Koala lui sauta dessus en essayant de le faire tomber. Ils ne se rendaient pas compte qu'ils me laissaient le champ libre, et je saisis l'occasion pour courir vers le bord. J'attrapai un cordage défait, le nouai à mon poignet et sautai hors du navire. Je pris une grosse inspiration et j'eus le temps d'entendre des cris d'épouvante avant de plonger.

J'étais à présent totalement immergée, et rapidement, je sentis mes forces me quitter. Il ne fallait pas que je perde une seule seconde, je commençai déjà à manquer d'air. D'une main, j'attrapai la forme floue qui nageait à côté de moi puis je tirai deux coups secs sur mon poignet. Privée de forces, mes yeux se fermèrent à mon insu, je me laissai couler vers les fonds marins mais une pression sur le cordage m'indiqua qu'on me remontait.
Je me retrouvai bientôt à l'air libre, à cracher toute l'eau accumulée dans mes poumons.

- Espèce de !...

Koala m'avait saisi par les épaules et me secouai violemment. Je la regardai, les yeux écarquillés. Elle finit enfin par me lâcher mais me jeta en compensation un regard noir.

- Ne me refais jamais un coup pareil ! Si tu t'étais noyée, qu'est ce qu'on aurait fait ?!

Un rire s'échappa de mes lèvres. La situation n'était pas vraiment à la rigolade, mais la réaction de ma nouvelle amie m'amusait. C'était mignon et touchant qu'elle s'inquiète et qu'elle agisse comme si elle était responsable de moi.

- Du calme, je contrôlai la situation ! Et puis, j'ai gagné.

En souriant, je levai le poisson, le trophée de ma petite noyade. Koala soupira en roulant les yeux, elle attrapa le poisson et partit avec en cuisine sans ajouter un mot.
Je me relevai et tout en essorant mes cheveux gonflés par l'eau de mer, je me tournai vers Sabo. Il était resté silencieux depuis tout à l'heure, et je remarquai qu'il se pinçait les lèvres pour ne pas éclater de rire. Il inspira un grand coup avant de croiser les bras.

- T'en fais pas, elle est souvent comme ça.
- Avec toi, tu veux dire.
- Justement, maintenant je ne suis plus le seul à subir !

Il ne put se retenir plus longtemps et s'esclaffa, pendant que je posai mes mains sur mes hanches en réprimant à mon tour un rire.
Sans Koala, qui s'occupait de cuisiner les poissons qu'on lui ramenait, nous reprîmes notre petit jeu. Le révolutionnaire était un adversaire de taille, il commençait à gagner et n'hésitait pas à me narguer, mais rapidement nous finîmes par être à égalité avec une montagne de poissons chacun. En nous voyant arriver avec tout ça, Koala resta figée de stupeur. Sabo en avait profité pour immortaliser sa réaction avec un escargophone photographique, entraînant la colère de la jeune femme qui nous chassa de la cuisine en criant.

Nous nous étions allongés sur le pont, à contempler le ciel, pour sécher en attendant le déjeuner. Un parfait silence régnait entre nous, si parfait que je crus qu'il s'était endormi. Le connaissant, c'était tout à fait possible, mais je me risquai tout de même à lui donner un léger coup de coude.

- Hm ?

Ah, il ne dormait pas. Tant mieux, autant profiter d'un moment seule à seul pour lui parler. Je lui posai alors la première question qui me vint à l'esprit.

- Sabo ? Pourquoi tu as rejoins l'armée révolutionnaire ?
- Ils m'ont recueilli.
- Mais il n'y a pas eu un élément déclencheur ?
- Sûrement, mais je ne m'en souviens pas.

Il se redressa et s'assit en tailleur, la tête et le regard tournés vers le ciel. Il avait un sourire étincelant. Je me redressai sur mes avant-bras, intriguée.

- Comment ça, tu ne t'en souviens pas ?
- Je suis amnésique. J'ai tout oublié de ce qui m'est arrivé avant l'armée révolutionnaire. Mais j'imagine que ce n'est pas plus mal.

Il haussa les épaules. Je n'avais jamais vu une telle détente face à un évènement aussi grave, ce qui ne manqua pas de me surprendre. Que lui était-il arrivé, pour qu'il perde la mémoire ? À sa place, j'aurai cherché à savoir, mais lui ne semblait pas plus préoccupé que ça. J'espérai que son zèle ne lui jouerait pas de mauvais tours.

- À table !

À l'appel de Koala, je chassai mes pensées de ma tête, me levai puis aidai Sabo à se mettre debout. Nous rejoignîmes la salle à manger ou plus exactement le réfectoire des Marines et nous nous mîmes à manger et parler tous les trois, avant que Beckmann finisse enfin par nous rejoindre. L'homme aux cheveux gris s'assit à ma droite en soupirant d'aise, il attrapa un poisson grillé et l'engloutit. Naviguer sur un si grand navire en suivant une carte de vie ne devait pas être de tout repos. Je me tournai vers lui, et finis ma bouchée avant de m'adresser à lui.

- Tu t'en sors ?
- Ça peut aller.

Non, ça n'allait pas. Beckmann avait beau avoir un masque de neutralité, je savais lorsqu'il était soucieux.
J'essayai de le rassurer avec un sourire et l'intégrai à la conversation avec les deux autres en espérant que cela lui changerait les idées.

Il ne restait plus qu'un jour avant l'exécution d'Ace. Autrement dit, c'était demain, à 15h. Et nous n'avions toujours pas rejoint notre équipage. C'était frustrant, nous devions absolument rattraper le Red Force. J'essayai de ne pas paraître trop soucieuse pour ne pas inquiéter mon mentor, qui devait être sûrement encore inquiet que moi. Après le repas, je laissai le duo de révolutionnaires dans le débat houleux qu'ils avaient lancé et le prit à part.

- Il nous reste cet après-midi, cette nuit et demain jusqu'à 15h pour les rejoindre. On va y arriver, ne t'en fais pas.
- J'espère que tu as raison... J'espère.

Beckmann se tourna vers moi. Il me sourit, puis s'écarta en allumant une cigarette. Je le regardai partir vers le gourvernail en perdant mon enthousiasme. Même moi, je n'étais pas sûre de ce que j'avançai, mais je l'espérai. Le temps nous était compté, et le plus frustrant était de devoir totalement miser sur la chance sans pouvoir agir par nous-même.
Me tirant de mes pensées, les éclats de rire de Sabo et la voix criée de Koala parvinrent à mes oreilles. Je soupirai mais laissai échapper un sourire amusé. Ils étaient vraiment intenables ces deux-là.