Chapitre 37

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En bientôt deux ans, c'était l'attaque la plus suicidaire à laquelle j'avais assisté. Les rookies voyaient vraiment trop hauts.
Les sabres cliquetaient, les pistolets sifflaient et les canons tonnaient dans une grande cacophonie. Certains corps tombaient au sol, mais plus chez l’adversaire que chez nous.

Je me faufilai parmi les combattants en en envoyant certains au tapis d’un coup de coude ou de saï. Un cri d’attaque me fit lever la tête, et je bloquai les lames de Killer avant qu’elles ne m’atteignent. La Supernova tenta de m’asséner un coup de pied dans le genou, je bloquai également le coup. Nous échangions plusieurs coups de lames rapides et agressifs. On ne se laissait aucune chance l’un envers l’autre.

- Abandonne !
- Toi, abandonne !

Je me servis de mon cri enflammé sur lui. Il évita le feu à l’aide d’un saut, et je dus à nouveau croiser mes saï pour bloquer ses lames. Les attaques se remirent à pleuvoir. J’arrivai à le lacérer, il recula un moment mais revint à la charge en essayant de me scalper, je me baissai et évitai ses armes. Je profitai que son bras soit tendu pour l’attraper par le coude, l’empêchant de fuir, et d’un mouvement de jambe calculé, je lui tordis le bras dans une position affreuse. Il poussa un cri de douleur, mais je ne lui laissai pas le temps de réagir et je le transperçai de mon saï. Il tomba à genoux et posa une main sur sa blessure. D’un coup de pied, je le forçai à tomber totalement au sol. Il y resta inerte, les bras en croix, les muscles tendus de son cou prouvant que sous son masque il grimaçait et serrait les dents. Je restai concentrée et je vins m’asseoir sur son ventre. Je maintins ses bras au sol grâce aux pressions de mes pieds sur les creux de ses coudes, et je posai la pointe d’une de mes armes contre sa gorge. Je le sentis se tendre mais il ne réagit pas. Je le regardai avec sévérité en fronçant les sourcils.

- Vous êtes vraiment des inconscients. Ne bouge pas si tu veux avoir une chance de rester en vie.
- Killer !

Des bruits de pas précipités se firent entendre, puis le crissement d’une lame qu’on dégainait fendit l’air et quelque chose heurta violemment le plancher du Red Force. Je jetai un rapide coup d’oeil à la situation et aperçus Eustass ‘’Captain’’ Kid agenouillé à terre. Il serrait les dents, ses yeux lançaient des éclairs mais ils étaient également empreints de souffrance, il était simplement trop fier pour la laisser transparaître. Son bras gauche sanguinolent gisait inerte à quelques pas de lui. En voyant leur capitaine vaincu, les pirates ennemis se stoppèrent, les yeux ronds de stupeur. Mes nakamas profitèrent de leur distraction pour les encercler et les tenir en joue. Ils étaient vaincus.

Shanks se rapprocha de Kid. Il tenait Griffon en main, de laquelle s’écoulaient encore quelques gouttes de sang.

- Tu te surestimes. Si tu veux me vaincre, il va te falloir beaucoup plus que ça, gamin.

Le Roux semblait si furieux que je me demandais sérieusement si la Supernova avait des chances d’avoir la vie sauve. Celui-ci, d’ailleurs, avait un rictus de rage, il ne bougea pas et ne répondit pas.

Mon capitaine finit par lever les yeux, il jeta un regard circulaire sur nous autres puis hocha la tête. À ce signal, je rangeai mes armes et me relevai tandis que mes nakamas abaissèrent leurs pistolets et leurs sabres. Killer se leva, nos adversaires baissèrent les yeux ou firent blanchir leurs jointures, et même Kid eut un soupir de fureur. Shanks rengaina son épée, puis il fit volte-face, tournant le dos au pirate devenu manchot.

- Que je ne te revois pas. Ni toi, ni tes hommes.

Kid se mit debout, Killer se précipita vers lui et les deux, suivis de leurs hommes, regagnèrent leur navire dans un silence lourd et humiliant. Dès qu’ils eurent quitté le Red Force, nous retournâmes à nos postes et nous mîmes les voiles.

La première chose que nous fîmes fût une inspection médicale, mais comme nous nous y attendions, personne n’avait été blessé. Les rires se firent bientôt entendre, la bonne humeur chassa vite la tension, Yasopp déboucha une bouteille de vin et nous nous mîmes à célébrer notre victoire avec une fête digne de ce nom.

Il en fallait peu aux pirates du Roux pour faire la fête, je le répète, et ça n'avait pas changé en deux ans. Rien n'avait changé, si ce n'est que je me sentais enfin à la hauteur de force pour être vraiment utile à cet équipage, mon équipage.

La musique battait son plein, et tandis que tous faisaient les fous comme à l’accoutumée, je me retrouvais à courir en ratissant tout le navire. Je regardai dans tous les coins et dans toutes les salles, même les plus improbables, je montais et descendais les escaliers et échelles une dizaine de fois, mais toujours rien. Je finis par regagner le pont où se tenait la fête.
J’étais en nage, et mon épaule gauche était trop légère à mon goût. Essoufflée, je me laissai tomber sur une chaise en acceptant le verre que Beckman me tendait. Je repris rapidement mon souffle et murmura entre mes dents.

- Je vais le tuer.
- C’est plutôt violent comme propos.

Le second ricana. Je gonflai mes joues et lui lançai un regard boudeur avant de boire, mais à peine le liquide eût atteint ma langue que je le recrachai en hoquetant, provoquant un fou rire général. Le rire de mon mentor était le plus fort. Le cramoisi me monta aux joues, je posai mon verre et me levai.

- Tu sais que je déteste le jerez !
- C’est bien pour ça que c’est drôle !

Ils adoraient me piéger, ce soir. D’abord Shanks, puis Beckman, qui sera le suivant ? Je croisai les bras, laissant mes nakamas rire de tout leur soûl. S'ils croyaient que j'allais me laisser faire...
Je souris en coin. Je repris le verre de jerez et sans attendre davantage, je jetai son contenu à la figure de mon mentor. Il se stoppa dans son rire et tira une expression ahurie, surpris de se retrouvé éclaboussé par de l’alcool, mais ses traits se détendirent et il s’esclaffa.

- D’accord, je l’ai mérité !

Cette fois-ci, je participai au fou rire, en regardant le quinquagénaire retirer comme il pouvait le liquide de son visage et de ses cheveux. Tandis que je lui tendais un chiffon, un rire joyeux et reconnaissable entre mille résonna dans mon dos. Je lâchai directement le chiffon, fis volte-face et attrapai Shanks par le col de sa chemise. Malgré ma mini-attaque, il ne cessa pas de rire. Mi-amusée, mi-exaspérée, je le secouai légèrement d’avant en arrière.

- Rends le moi !
- De quoi tu parles ?
- Fais pas l’innocent, Akagami, je sais que c’est toi ! Rends-moi mon manteau !

Son amusement ne quitta pas son visage et pour toute réponse, il me tira la langue. Je le lâchai et repartis à la recherche de mon manteau, mais même plusieurs dizaines de minutes plus tard, je ne l’avais pas trouvé. Je me laissai tomber contre un mur de la cuisine et je fermais les yeux en reprenant mon souffle. Je vais le tuer. Je vais vraiment le tuer.

J’étais découragée. Je n’aurai jamais dû enlever mon manteau, ça m’aurait évité de me le faire subtiliser. Je n’avais plus la foi de chercher ce soir. La Lune était haute dans le ciel, la fête avait cessé depuis longtemps et mes yeux commençaient à se fermer. Je reprendrai mes recherches demain… Je soupirai et me relevai pour ensuite regagner ma chambre.

Je fermai la porte derrière moi, allumai ma lampe et me tournai vers mon lit en commençant à défaire ma chemise, mais je me stoppai net. Mon manteau bleu nuit était là, il recouvrait mon matelas. Je m’approchai et pris le vêtement en souriant. Il l’avait donc caché ici… Quelle idiote je faisais à présent, à avoir couru partout alors qu’il était si simple à trouver.

Un éclat de rire m’échappa alors que je suspendais le manteau, et lorsque je retournai auprès de mon lit, je m’aperçus que ce n’était pas tout. Une pomme et une rose étaient posées sur l’oreiller. Je ne les avais pas remarqué avant, car elles avaient été recouvertes par le manteau. Mes lèvres s’étirèrent en un sourire. Je pris la rose entre mes doigts et la déposai avec délicatesse sur la table de chevet, puis je me laissai tomber dans mes draps. J’attrapai la pomme et croquai dedans. Si il croyait que ces petites intentions allaient le pardonner… Je levai le fruit devant mes yeux. Il était aussi rouge que ses cheveux. Il avait intérêt à être prêt. Je ne le laisserai pas s’en tirer à si bon compte.

Cet imbécile de Shanks. Il a de la chance que je l'aime bien.

Une Question de Justice [One Piece]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant