Chapitre 85

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Après avoir dansé et dansé, bu et mangé sans m'arrêter, comme si l'instant présent se répétait en une boucle sans fin, j'avais commencé à me sentir un peu à l'étroit à force de côtoyer autant de personnes dans un climat aussi renfermé, au point que je finis par décider de sortir prendre un peu l'air. En me faufilant parmi les différents fêtards, je parvins à m'échapper de cette foule, suivie de Sabo qui, m'ayant vu agir, avait proposé de m'accompagner.

Après quelques instants étouffants, je finis par atteindre la porte. En me retrouvant dehors, je remarquai qu'il n'y avait plus un seul nuage dans le ciel, laissant celui-ci  révéler un ciel sombre sans soleil, annonciateur des ténèbres nocturnes à venir. J'écarquillai les yeux. Lorsque la fête avait commencé, il ne devait pas être plus de midi. J'avais oublié à quel point le temps passait vite lorsqu'on s'amusait...

- Apparemment, tout le monde est trop occupé à s'amuser à l'intérieur.

Le révolutionnaire appuya sa remarqua d'un coup d'œil jeté aux alentours. J'eus un petit sourire. Hormis nous, il n'y avait personne et pas un seul bruit. Le pont était totalement désert, devenant à la fois hostile pour ceux qui cherchait de la compagnie, et accueillant pour les chercheurs de tranquillité.

- Il n'y a que nous, on dirait. Faisons tout de même attention, certains dont je ne citerai pas les noms ne seraient pas gênés de nous observer.

Il hocha la tête, tout en gardant son optimisme sur le visage. Après un moment, il finit par s'éloigner vers le bord et il s'accouda à la rambarde du navire. Je le suivis et m'installa à côté de lui. Son visage s'éclaira légèrement, mais, sûrement désireux de profiter du moment présent en silence, il n'ajouta rien, se contentant de venir timidement prendre ma main dans la sienne. Je sentis mon cœur rater un battement. Je voulus fermer les yeux et me laisser aller contre lui, mais quelque chose m'en empêchait. Ce simple contact ravivait en moi ce moment où, devant la Marine presque au complet, et au pire moment possible, nous avions partagé un ardent premier baiser, sans se soucier de la situation où des conséquences qu'une telle marque d'amour pouvait nous valoir.
Je ne regrettai rien. En ce qui concernait ma relation avec Sabo, je ne regrettai rien et je serai prête à recommencer, mais je ne pouvais m'empêcher d'être envahie par des inquiétudes.

À présent que j'étais libre, je n'avais plus rien à craindre pour ma vie, et bien que la Marine ne m'effraie pas, au contraire, celle-ci connaissait à présent ma plus grande faiblesse. Sakazuki était malin. Si, un jour, il voulait plus que tout me capturer, il n'allait pas hésiter à manipuler ma faille jusqu'à réussir à me faire chanter.
À cette pensée, ma main se resserra sur celle de Sabo, mais un sourire dégoulinant d'insolence apparut sur mes lèvres. Qu'il essaye un peu, j'adorerai le voir échouer... À nouveau.

- À quoi tu penses ?

Sortie de mes pensées, je tournais mon regard vers mon homme, qui m'observait avec un sourire. J'haussai les épaules.

- Rien de spécial. Seulement que Saké doit sûrement être en train de brûler tout son QG dans sa rage.
- Saké ?
- Sakazuki. Littéralement tasse de saké.

Je lui offris un clin d'œil et il éclata d'un rire amusé.

- Ça lui va bien ! Je pense qu'il a de quoi être en rogne, mais il a perdu cette bataille. Son ego devra le supporter.

Le jeune blond se tourna totalement vers moi, son sourire devenu espiègle sur ses lèvres. Sa main lâcha la mienne pour venir se poser avec délicatesse sur ma joue gauche. De son pouce, il caressa avec précaution la cicatrice qui barrait ma joue. Nous nous regardions silencieusement un long moment, et, n'y tenant plus, nous rapprochâmes nos lèvres, mais avant qu'elles puissent se toucher, je me stoppai.

Alertée par mon Haki de l'observation, je me détournai vers le rivage, où, sous la lumière précédant la nuit, marchaient deux hommes. L'un, très grand, vêtu d'un bonnet, de lunettes rondes et d'un manteau, semblait pris en pleine conversation avec son interlocuteur, un peu plus petit et portant des lunettes noires qui cachaient son regard.
En les voyant, je sentis tout élan d'amour, de tendresse et de joie s'envoler hors de moi. Je perdis mon sourire et les contemplai en fronçant les sourcils. Lorsque les deux personnes remarquèrent ma présence, sur le Red Force, à les observer, elles cessèrent immédiatement de parler. Nous restâmes tous les trois immobiles, moi les regardant, eux les yeux posés sur moi. Je sentis une intense colère et une grande interrogation bouillonner en moi. Ces deux-là... J'aurai cru qu'ils seraient partis, depuis l'exécution ratée. Mais ils étaient là, un peu trop détendus à mon goût, et étrangement, avec une certaine alchimie entre eux...

- Tu devrais aller les voir.
- Hum ?

Je tournai la tête vers Sabo, surprise. Il poursuivit :

- Tu as des questions à leur poser et des mystères à éclaircir. Vas-y. Je t'attendrai.

J'adorais son sourire. J'adorais sa façon d'être, et surtout, j'adorais cette tendance qu'il avait de comme lire dans mes pensées.

- Merci. Je t'aime.

Après lui avoir donné un baiser, je descendis à terre et m'avançai vers Aokiji et Every. Mon père et l'épéiste me suivirent du regard et m'attendirent sans bouger un muscle, sans sourire, sans manifester la moindre joie de me revoir sur pied et en bonne santé. De la part d'Every, je n'étais pas étonnée, mais la gravité exceptionnelle dont faisait également preuve mon père me confortait dans l'idée qu'il savait parfaitement pourquoi je venais jusqu'à lui.
J'agis comme eux en restant stoïque. Pas un sourire, pas d'enthousiasme, la situation ne s'y prêtait pas. Arrivée face à eux, je me stoppai et les regardai tour à tour en fronçant à les sourcils.

- Il faut qu'on parle.

Une Question de Justice [One Piece]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant