Une Question de Justice [One Piece]

Chapitre 96

Lorsque j'eus quitté le navire et posé pied à terre, je suivis les deux hommes à travers la forêt qui constituait la côte. Ces arbres me rappelaient des souvenirs loin d'être agréables… Je me revoyais encore, marchant aux côtés de deux autres hommes que mes deux amis, nous enfonçant dans les bois jusqu'à ce petit camp, où j'avais enfin tout appris. 

Je croisai les avants-bras, venant attraper mes bras avec mes mains comme pour me réchauffer. Je ne prononçai pas un seul mot, et je tentai de rester stoïque. Je n'avais pas envie de me rappeler de tout cela, ni même d'y songer, mais la pensée qu'une chose traumatisante était arrivée à mes amis par le passé ne me paraissait pas plus enviable à réfléchir.

Je jetai un coup d'œil devant moi au dos de Sorën. Le jeune homme ne nous avait pas attendu et avait presque accéléré, nous forçant, Noah et moi, à le rattraper. À présent, nous marchions à un rythme soutenu, sans jamais perdre notre ami de vue. Je craignais que sa rancœur le pousse à vouloir agir tout seul, loin de tout secours, mais je restai vigilante, essayant d'anticiper ses mouvements et me concentrant sur mon Haki de l'Observation. Je n'allais pas le laisser se faire tuer simplement parce qu'il était en colère.

- On arrive…

Noah s'était penché à mon oreille pour me chuchoter ces simples paroles, auxquelles je répondis par un hochement de tête. En effet, on semblait arriver : il ne restait que quelques arbres devant nous, derrière lesquels semblaient se trouver de petites bâtisses. Des maisons.

Le silence qui régnait et l'absence d'activité faisaient penser que les habitants n'étaient pas encore levés, ce qui, dans cette aube naissante, était compréhensible… À moins qu'il n'y ait plus d'habitants de ce côté.

Je posai mon regard sur la Girouette, mais il ne tourna pas les yeux dans ma direction. Il semblait trop occupé, trop concentré par ce qu'il voyait devant nous. Pourtant, sa main tenant le pistolet tremblait.
Avant que je ne puisse rassurer Noah, mon autre ami avait prit la parole.

- Les pirates se trouvent au centre du village. Ne faites pas de bruit.
- Quels sont leurs capacités ?
- C'est bien un truc de soldat de la Marine ça…

Sorën ricana sans aucune joie dans la voix. J'échangeai un regard surpris avec Noah, qui sembla aussi étonné que moi. Je fronçai les sourcils et croisai les bras. J'avais beau vouloir être patiente dans son cas, je n'allais pas non plus me laisser marcher dessus.

- La stratégie n'est pas un truc de Marine, Sorën.
- Si tu le dis.
- Tu veux bien arrêter de faire le difficile ? Si tu sais quelque chose qui pourrait nous permettre une meilleure victoire, dis-le nous.
- "Le difficile" ?!

Il jeta le pistolet à terre et bondit dans ma direction, les poings serrés levés, prêts à me frapper. J'eus un soupir. Sans prendre la peine de m'aider du Haki de l'Observation, j'attrapai Sorën par les poignets et le retourna en lui faisant une clé-de-bras. Le jeune homme glapit de surprise et tenta d'échapper à mon emprise. En vain, je le serrai trop fort.

- À moins que tu veuilles te retrouver avec un bras cassé, ne bouge pas.
- Espèce de--
- Pour quelle raison tu m'insultes ? Ce n'est pas moi qui ai essayé de te frapper, à ce que je sache.

Je resserrai ma prise. Il poussa un couinement de douleur. Je finis par le relâcher, et tandis qu'il se tenait le bras, je m'écartai de lui en allant aux côtés de Noah. Sorën releva la tête et me fusilla du regard. Je soutins ces yeux sans ciller. Il finit par soupirer.

- Le chef a un fruit du Démon. Les autres manient des pistolets.
- C'est tout ?
- Sorën a omis un détail…

Je me retournai vers la Girouette et d'un signe de tête, je l'invitai à continuer.

- Ils … Ils ont le drapeau de Barbe Noire.
- Teach ? Tu veux dire que c'est son équipage ?
- Pas tout à fait… On l'aurait reconnu si ça avait été eux. Non… C'est plus un équipage subordonné.

Le fameux Barbe Noire, envers qui Shanks semblait si méfiant… Je fronçai les sourcils. Que Teach ne soit pas directement responsable de cette attaque était une bonne nouvelle, mais risquait de rajouter plus d’enjeux que je ne le croyais. 

- Je ne crois pas Teach assez idiot pour permettre à des faibles de porter son drapeau.
- Ce qui veut dire…
- Il va y avoir plus de complications. 

Après avoir jeté un regard à la Girouette, je me tournai vers mon autre compagnon. Il semblait toujours aussi renfermé, mais je n’y prêtais aucune attention.

- Va retrouver Shanks en lui disant que je t’envoie. Dis-lui ce qu’il se passe.
- Ne me donne pas d’ordres.
- Arrête de te comporter comme un enfant et fais ce que je te dis.

Je le jaugeai un long moment du regard, jusqu’à ce qu’il détourne les yeux, semblant irrité. Il fit volte-face et n’ajouta rien avant de se mettre à courir pour rebrousser chemin. Un soupir m’échappa. Bon sang, j’étais à la limite de plus apprécier Tashigi que lui, à présent… C’était comme si je ne le connaissais plus.

- Isiris…
- Hm ?
- Tu auras dû m’envoyer. Sorën est le chef du village, si il lui arrive quelque chose, tous les habitants en subiront les conséquences.
- Il est plus débrouillard que toi. Ne t’en fais pas. Tu le connais, il sait se défendre.

J’offris un sourire à mon ami, sourire qu’il me rendit après une légère hésitation. Sa peur ne s’était pas envolée, mais je préférais veiller sur lui plutôt que de l’envoyer seul, car je doutais fortement qu’il ose utiliser son arme même si sa vie était en danger, au contraire de Sorën.

- Bien. Il ne nous reste plus qu’à attendre sans faire trop de br--

Alertée par mon Haki de l'observation, je détournai la tête et levai les yeux, avant de brusquement attraper la Girouette pour nous jeter tous les deux à terre. Un sifflement effleura mon oreille, alors que mon ami laissa échapper un couinement surpris, ne comprenant pas ce qu’il se passait. 

- Ne bouge pas.

Il hocha la tête, répondant à mon ordre. Au-dessus de nous, des sifflements surgissaient en nombre, accompagnés des petits projectiles en métal destinés à nous blesser, voire nous tuer. Je serrai les dents, revêtit mon poing du Haki de l’armement et frappa en plein dans une des balles, l’explosant en de milliers de petits morceaux sous mon poing.

Que la fête commence.