Chapitre 113

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- Tu peux arrêter de faire la tête deux secondes ? 
- Comment tu veux que je reste calme ?! On parle de pirates, tu t'en rends compte au moins ? 
- Oi, j'en suis une aussi. 
- C'est bien dommage. 
- Rien ne te force à nous suivre. Tu peux tenter de t'en sortir toute seule. 

Impassible, je soutenais le regard irrité d'Abigail. Nous avions à peine fait quelques mètres avant que son caractère insolent ne ressorte, et, évidemment, j'étais toute aussi têtue qu'elle, si ce n'est plus. Depuis que nous nous disputions, je voyais du coin de l'œil Beckman nous fixer, l'air mi-amusé mi-ennuyé, et je commençais petit à petit à partager son second état. 

Ma sœur de lait était, avec Sorën et Noah, tout ce qui me restait de mon enfance, de cette petite famille avec laquelle j'avais partagé tant de choses. Même après autant de temps loin d'elle, même après notre relation infantile plutôt chaotique, j'étais consciente que j'étais prête à tout pour la protéger, bien que ce soit une envie de protection un peu différente de celle que j'éprouvais pour mes deux autres amis. Sûrement parce que le lieu dans lequel nous étions en ce moment était d'un danger absolu. 

Un danger absolu… et pourtant nous trouvions le moyen de marcher comme si de rien n'était, et même de nous envoyer des piques, et je n'en éprouvait aucune incommodité. Inconscience, ou témérité ? Sûrement un mélange des deux. 

Après avoir jeté un dernier regard appuyé vers mon interlocutrice, je reportai ma concentration au devant de nous, me taisant par la même occasion. Par prudence, j'avais posé une main sur la garde de l'un de mes saï, prête à le dégainer. C'était étrange. Je ne connaissais pas Lucci plus que cela, mais je le voyais mal abandonner aussi facilement, et cette atmosphère de calme et de pseudo-sérénité n'était sûrement que le calme avant la tempête. Tant que nous n'étions pas partis d'ici, nous n'étions pas sortis d'affaire et de tout danger. 

Et j'avais eu raison. Alors que nous atteignons l'une des extrémités de la ville, les soldats du Gouvernement avaient laissé place à l'agent du CP-0. Il était seul, la main négligemment nichée dans sa poche de pantalon, le regard vide posé sur nous. Il n'était pas terrifiant, mais sa simple vue m'était insupportable. Cet homme, aussi puissant qu'il était, n'était en fait qu'un monstre tolérant et défendant les intérêts des Dragons Célestes et du Gouvernement Mondial, et si ma priorité n'était pas de fuir d'ici, je me serais fait un plaisir de lui mettre une raclée. Mais j'arrivais à rester lucide sur ce que je voulais : ce n'était pas mon objectif premier. Il était cependant bien devant nous et nous allions devoir nous en occuper, car je doutais qu'il nous laisse passer bien gentiment. D'un coup sec, je dégainai mes deux saï et fis quelques moulinets avec avant de mélanger vers lui, quoi que puisse me crier Abigail. 

Au moment où j'abaissais mes lames dans sa direction, elles furent immédiatement détournées par un violent coup. J'entrevis une paire de griffes s'approcher durant le bref instant où je fus déséquilibrée et j'expulsais un souffle ardent de mes poumons en utilisant mon cri. Le feu brûla le poil tacheté de mon ennemi, mais sans plus. Un éclair passa devant mon regard. J'utilisais rapidement le Haki de l'armement sur mon poing et le plaçai devant mon visage avant qu'il ne m'atteigne, puis j'essayais de lui donner à mon tour un coup. Nous nous échangions ainsi des attaques et des contre-attaques, sans ajouter un mot, sans se regarder ne serait-ce qu'une fois. Je m'appliquai à enchaîner coup sur coup, en essayant de ne jamais le laisser respirer, mais il finit par briser mon stratagème en m'attaquant par derrière. Je serrais les dents. Il était fort, très fort... Mais fort ne voulait pas dire invincible.

- Isiris !

Bien que je ne pouvais détourner le regard sous peine de baisser ma garde, je tendis l'oreille en entendant Beckman s'adresser à moi. Je ne comprenais pas pourquoi lui et Abigail n'en avaient pas profité pour contourner l'élément perturbateur, mais j'étais trop occupée par ce dernier pour demander bien gentiment.

Une Question de Justice [One Piece]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant