Chapitre 108

260 19 0
                                    

Je n'en croyais pas mes yeux. Cette maison était plus grande que je ne le pensais, et pourtant, comme si mon instinct avait su où aller, il m'avait guidé jusqu'à une salle. C'était une salle à manger immense, rendue très lumineuse par les nombreuses fenêtres, et haute de plafond. Cependant, malgré la richesse et l'opulence évidente de cette pièce, la table, les chaises, les couverts et les différents ornements étaient au sol, fracassés pour la plupart, alors que deux personnes, à peine perceptibles par la vitesse de leurs coups, combattaient. Au moment où je m’étais aperçue de la présence d’autres personnes, je m’étais faufilée derrière une armoire renversée que j’avais repérée un peu plus tôt. Je restai à couvert un moment, m’attendant à entendre des bruits de lutte, des éclats d’épée et de la casse d’objets, mais, étrangement… Rien. Tout était silencieux, comme si, dans cette pièce où pourtant deux personnes échangeaient de violents coups, tout était d’un calme olympien. Je fronçai légèrement les sourcils d’étonnement. Aucun son ne résonnait, et pourtant, il me suffisait de jeter un simple coup d'œil hors de ma cachette pour voir de nouveau ces adversaires se battre. 

Je crois me souvenir d’un certain fruit du Démon, mentionné dans l’Encyclopédie. Qui permettait de rendre silencieux des objets, des personnes et des espaces. L’un des deux combattants devaient sûrement en être le détenteur et l’utilisait en ce moment pour que personne ne s’alarme. Cela ressemblait bien à une tactique du CP0, quoi que… non. L'un des adversaires, tout vêtu de blanc, s'était subitement arrêté, et je réalisai qu'il s'agissait de Rob Lucci sous sa forme hybride de léopard. Son ennemi, une femme brune à la peau mate vêtue d'un uniforme d'officier de la Marine, s'arrêta, et les deux se firent face. Aucune parole ne put être prononcée mais tout fut dit en un regard. Ils allaient s'entretuer. 

Ce combat n'était pas le mien. Rester ici à le regarder ne m'apporterait rien, et cet atout provenant sûrement du Nagi Nagi no mi m'était plus qu'utile pour mon infiltration. Je jetais un coup d'œil vers les adversaires, posai une main sur le sol et commençai à me relever, avant de me figer. Les sourcils froncés, je tournai à nouveau la tête vers les combattants. Mon sang ne fit qu'un tour, et mon visage se détendit pour revêtir un air de surprise. 

Cette femme. Je la connaissais. Mais cela remontait aussi loin que mes amis d'enfance… parce qu'elle était de la même époque. Ce n'était pas une de mes amis, loin de là, et elle adorait à l'époque se comporter comme une fille modèle et dire à sa mère, ma nourrice, toutes les bêtises que je faisais.

Abigail. Ma sœur de lait. 

La fillette sage avait bien changé, et je ne parlais pas uniquement de ses cheveux devenus étrangement lisses pour avoir été de grosses boucles dans l'enfance. Non, elle avait changé pour s'en prendre directement à la souche directrice de ce monde. Je déglutis. Si j'avais bien raison, si il s'agissait bien de ma sœur de lait, Abigail, je ne pouvais pas la laisser face à un homme de l'envergure de Rob Lucci. Je m'excusais mentalement à mes deux amis pour cette attente prolongée, puis sortis discrètement la tête de derrière ma cachette. Abigail et Lucci avaient repris leurs combats, mais maintenant que j'avais identifié les adversaires, j'avais plus de facilité à les suivre. Le corps sous tension, j'observais avec attention le combat, avant de lancer mon cri vers Lucci. Le léopard se prit l'attaque de plein fouet et alla s'encastrer dans le mur. Son opposante, surprise, s'arrêta et contempla l'agent du CP0. C'est le moment où je choisis de sortir de ma cachette et de m'approcher du combat, les bras croisés. 

- De rien, Abby.

La jeune femme, s'entendant interpellée, tourna un visage colérique vers moi, qui se transforma en surprise. Tout à coup, ce qui semblait être une bulle de surdité disparut. Abigail, délaissant Lucci derrière elle, se rapprocha de moi et avant que je ne puisse faire le moindre geste, elle me saisit par le col et m'avança vers elle.

- Toi… Tu… mais c'est pas possible. Qu'est ce que tu fais là ?! 
- Je pourrai te retourner la question, tu sais. 

Je lui offrais un sourire en coin avant de saisir sa main, la forçant à me lâcher. Elle s'écarta d'un pas puis me fixa des pieds à la tête. Je levai un sourcil et croisai les bras, intriguée par sa réaction. 

- Bonjour à toi aussi. Oui, tu m'as manqué également. 
- Je pensais ne jamais te revoir. 
- Moi aussi. Le Frisé et la Girouette m'avaient dit que t'y était passé, durant la destruction de notre île. 
- Tu… Tu as revu Sorën et Noah ? Comment vont-ils ? Ils n'ont rien ? 

J'haussai les épaules, et lui souris. Un soupir soulagé lui échappa. C'était si surprenant. La Abigail dont je me souvenais nous détestait, moi et mon groupe, et n'avait jamais eu un comportement aussi… amical. C'en était presque inquiétant. 

Ma réflexion fût coupée net par un bruit sourd provenant de ma gauche. Abigail et moi tournâmes la tête simultanément vers l'objet de notre curiosité pour y voir un Lucci, sous forme hybride, sorti des décombres. Sans dire un mot, il épousseta un peu de poussière sur la fourrure de son bras, le regard fixé sur ma sœur de lait, avant que ses yeux ne s'orientent dans ma direction. Il resta un moment silencieux, puis un sourire carnassier fit son apparition sur ses lèvres, lui donnant un air encore plus dément qu'auparavant. 

- Je savais que ce n'était qu'une question de temps avant que je ne te trouve, mais je ne pensais pas que tu viendrais de toi-même te jeter dans la gueule de la Justice. 
- La Justice, ce mot est répugnant dans ta bouche. 

J'avais répondu du tac au tac, les sourcils froncés, le considérant avec dégoût. Cet homme était loin de le faire peur, mais je sentais que les ennuis ne faisaient que commencer. 

Une Question de Justice [One Piece]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant