Call Me Monster

Chapitre 3 - Jacob

— Il en est hors de question.

— Je t'en prie Jacob, maugrée-t-elle. Je refuse que tu retournes en prison.

— Qui t'a mis cette idée en tête ? Je n'ai aucune raison de retourner en prison. Une nounou ne me servira à rien.

— C'est évident, raille-t-elle. D'ailleurs, je parie qu'actuellement tu es sage comme une image, n'est-ce pas ? C'est vrai, je ne vois pas ce que tu peux être en train de faire, si ce n'est prendre ta vie en main. Tu n'es certainement pas chez Samuel qui est déchiré à la cocaïne, enfermé dans une pièce sombre, empestant un mélange d'alcool, de sexe et de tabac. Tu n'es pas non plus le genre à enchaîner les vendeuses de charme.

Je regarde autour de moi. Elle a vu juste. Il se pourrait que mon bras droit ait voulu fêter mon retour avec une soirée intéressante. Des corps entremêlés et des substances qui font planer. De quoi passer un bon moment ! Le problème ? Pour la première fois depuis bien longtemps, j'ai trouvé ça fade. Comme un plat qu'on adorait, mais qui nous dégoûte à force de le manger. J'ai moisi cinq ans sans pouvoir nourrir mon côté démoniaque. Pourtant, celui-ci réclame des mets plus élaborés pour passer sa frustration et ma fierté m'empêche de l'avouer à ma sœur.

— Si tu veux tout savoir, il y en a même une à mes genoux, dis-je pour la taquiner.

— Si c'est pour dire des horreurs pareilles, tu peux garder le silence, grogne-t-elle.

Un rire moqueur s'échappe de mes lèvres.

— Pour une fois dans ta vie, mon frère, écoute-moi. Rachele est une fille posée et cool. Elle a été là pour me soutenir lorsque tu m'as abandonnée. Tu me dois bien ça.

Touché — coulé. Ma petite sœur a décidément bien grandi. La voilà capable de jouer avec mes sentiments pour me retourner le cerveau. L'amertume me saisit. À quoi est-ce que je m'attendais ? Entre moi et notre père, elle ne pouvait pas rêver de meilleurs modèles.

— Cette famille a de nombreux secrets, mais tu n'es pas obligé de suivre le chemin de notre père, continue-t-elle.

Répondre à son sous-entendu me brûle un peu plus de l'intérieur. Elle aimerait que je sois différent, mais je ne peux pas. J'aurais beau essayer de toutes mes forces, Richard s'est assuré que je ne puisse jamais choisir ma voie. Mon âme humaine s'est liée à jamais avec celle d'un démon. Nous ne faisons plus qu'un. Mes pensées sont les siennes. Nos gestes s'accordent. Nos cœurs sont scellés. Si la vie en avait été autrement, j'aurais pu être ce frère exemplaire, mais je ne peux pas. L'incube est plus qu'une partie de moi, je suis ce qu'il est. Sa force, ses désirs, ses faiblesses.

— C'est là que tu te trompes Mina, je suis pire que notre père.

— C'est faux et tu le sais ! Je suis sûre qu'au fond tu regrettes tout ce que tu as fait.

Elle marque une pause. À vrai dire, l'unique acte dont je me blâme, c'est d'être tombé comme un débutant dans le piège du fils Minko. À cause de mon erreur, ma sœur a dû affronter seule le monde dont j'ai tant de fois repoussé les assauts. Cependant, je ne déplore aucune des vies que j'ai brisées. Si Mina ne peut pas l'accepter, elle doit au moins en avoir conscience. La seule humanité des incubes concerne ceux avec qui ils partagent leur sang. Si Richard est toujours en vie, c'est parce qu'un incube qui tue un membre de sa famille risque la mort. Dionyssan, créateur des ombres, nous a maintes fois prévenus. Aucune créature n'est invincible. Le mal et le bien sont une balance en constant mouvement. L'un ne peut exister sans l'autre.

— Si tu ne le fais pas pour toi, fais-le pour moi, reprend-elle.

Son innocence me désarme, mais j'ai besoin de temps pour penser à la situation. Dans mon monde, prendre des risques sans songer aux conséquences est une erreur fatale la plupart du temps.

— Je vais y réfléchir, dis-je en cédant à ses supplications.

Elle souffle de soulagement au bout du fil.

— Merci. J'espère que tu prendras la bonne décision.

— Prends soin de toi, petite sœur.

Bien que j'ai été sage avec Rachele.

Je dois avouer que je suis curieux. À l'époque, elle était du genre à rougir à chacun de mes regards, à devenir fiévreuse lorsque mes doigts frôlaient les siens. Quand est-il aujourd'hui ? A-t-elle un homme dans sa vie ? Et si je lui rendais visite dans ses rêves ?

Alors que des flashs de ses lèvres près des miennes embrasent mon désir, une des nymphes apparaît sous la lumière de la lune.

— Je vois que tu as encore de l'énergie, roucoule-t-elle en s'approchant de moi, les yeux fixés sur mon sexe.

Sensuelle, elle se colle contre mon corps et entame une danse salace en ondulant les hanches. Son parfum explosif me fait grimacer. Elle n'est pas celle dont j'ai envie, mais tant pis. Il faut que je me change les idées. Avec lenteur, je passe ma main dans ses cheveux blonds et rapproche son oreille de mes lèvres.

— Aucune ne m'a jamais mis K.O.