Chapitre 30 - Rachele

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Rachele

L'angoisse cumulée depuis mon arrivée commence à me démontrer des signes physiques. Ma cage thoracique se compresse de plus en plus. Mon front se couvre petit à petit d'une légère sueur tandis que mon estomac s'essaie à la boxe. L'envie de vomir frôle mes lèvres. Je n'ai rien mangé de mauvais, pourquoi ce soudain mal-être ?

Prise de sueurs froides, je jette un œil aux garçons qui m'ignorent complètement. J'ai besoin de marcher, de me détendre. Est-ce le contrecoup de l'adrénaline qui a parcouru mon corps à plusieurs reprises ? Discrète, je me lève, tremblante en posant une main sur mon front. Plus les secondes défilent, plus je me sens mal. Pourvu que Jacob revienne vite. Je ne pense pas pouvoir tenir encore longtemps. Sans me faire remarquer, je marche jusqu'au bois à quelques mètres. Avec lenteur, je remplis le plus possible mes poumons d'air frais. Je dois à tout prit calmer les haut-le-cœur qui me tiraillent. Sans les cris autour de moi, l'angoisse descend un peu. Faible, le cœur prit de palpitations, je m'appuie contre l'écorce d'un arbre, l'estomac soulevé une nouvelle fois. Le vent froid calme ma peau surchauffée par les mauvaises ondes, mais mon mal-être persiste. Mais qu'est-ce qui m'arrive ?

— Note à moi-même, vérifier la date sur les mousses au chocolat.

Frissonnante, je me penche, pliée par une énième nausée. C'est alors qu'un bruit étrange me fait tourner la tête. Le sous-bois à peine éclairé par les phares des voitures et barils enflammés, je mets quelques secondes à reconnaître la personne qui se tient un peu plus loin. Cela dit, à l'instant où ses traits m'apparaissent à la lueur de la Lune, mon sang quitte mon visage. Shanna se dresse fièrement devant moi, un sourire sadique sur les lèvres, le regard plein de haine. Si elle avait pu me torturer de ses propres mains, elle l'aurait sans doute fait. À côté d'elle, un homme d'environ un mètre quatre-vingt-dix possédant des cheveux roux, des yeux verts et une musculature conséquente. Je ne sais pas réellement ce qui m'attend, mais les présages ne sont pas bons. Shanna n'est pas venue ici par hasard. Par sécurité, je tente de me rappeler mes cours d'autodéfense, mais même avec toute ma bonne volonté, la peur bloque mes fonctions neuronales. Mon instinct me murmure que je vais devoir courir. Et vite.

— Je ne vois vraiment pas ce qu'il te trouve. Tes seins, du C ? À peine assez grands pour jouer avec ! Tes fesses sont à peine rebondies, ton ventre un peu graisseux. Et tes fringues... On en parle de ce look gangster raté ?

Dans la catégorie des poufs, elle remporte tous les succès. Je m'apprête à répliquer, mais une douleur s'empare de mon estomac. Sous le coup de l'élancement, je me plie en deux, une main sur le ventre.

— Je te présente Colin, reprend-elle. Vois-tu, Colin est un homme particulier. Il a toujours eu des envies spéciales niveau sexe, mais les femmes sont rarement intéressées par lui. À tel point que cela fait un moment qu'il n'a pas été satisfait, continue-t-elle. J'ai pensé que tu pourrais peut-être lui rendre service.

Ce dernier détaille mon corps comme si j'étais un rôti au four. Ne me dites pas que cette folle a appelé son chien pour me violer ? Paniquée, je jette un coup d'œil en arrière. Le campement est trop loin, combien de temps ai-je marché ?

L'angoisse qui m'étreint remonte en flèche, ma vue se floute, les palpitations dans ma poitrine s'accélèrent. Il ne me faut pas longtemps pour comprendre la « punition » que me réserve la garce. Elle me fait un clin d'œil avant de se retirer en me laissant seule avec le colosse pervers en face de moi. Je suis bloquée. Je tente d'appeler à l'aide, mais je ne parviens qu'à émettre des borborygmes intelligibles.

Toujours penchée, je vois du coin de l'œil Colin commencer à s'avancer lentement vers moi. Mon rythme cardiaque devient incontrôlable, ma respiration saccadée. Deux solutions s'offrent alors à moi : rester là et me faire violer, ou bien tenter de rejoindre les autres en me mettant à courir à travers les bois.

Malgré ma faiblesse, mon choix est vite fait.

L'instinct de survie prenant le dessus, mes jambes s'activent désespérément à travers la forêt. Je ne suis pas assez forte pour me battre contre ce gorille, mais la peur me donne des ailes. L'adrénaline ne met que quelques secondes pour accaparer tout mon être, tandis que le bruit de mes pas martelant la terre humide résonne en écho à ma respiration. Le contraste entre l'air frais et ma peau chauffée par ma course est violent. Mon corps est parcouru de frissons, je peine à retenir les haut-le-cœur qui me submergent. Perturbée, je me rends compte que je perds le nord. Plus j'avance et plus je comprends que je m'enfonce sans fin dans la forêt, loin des personnes susceptibles de m'aider. N'étais-je pas en train de courir vers l'équipe ?

Comprenant que ma souffrance me fait délirer, je tente de me repérer dans cette forêt noire. Je dois trouver un moyen de le contrer afin de pouvoir repartir dans l'autre sens rejoindre Jacob. Soudain, l'image du couteau dans ma chaussure me percute. Sans attendre, je me penche pour l'attraper. Ma gorge me brûle, ma poitrine souffre, je suis à deux doigts de m'effondrer, mais une fois mon arme en main, je reprends ma course. Cela dit, mon corps malade me ralentit de plus en plus. J'entends les chaussures de l'homme soulever le sol et se rapprocher petit à petit. Des larmes coulent de mes yeux. Je ne serais jamais assez rapide. Pas dans cet état...

J'accélère le pas, mais ma vue se floute une nouvelle fois et je trébuche sur une racine. La douleur pulse dans mon tibia, ma cheville m'arrache un gémissement. Consciente que je n'ai que quelques secondes pour me remettre sur pieds, j'essaie de me relever, mais mon ennemi profite de ce moment de faiblesse pour me saisir. Je hurle en essayant de frapper ses côtes, sans succès. Son poids me maintient au sol alors qu'il tord douloureusement mon poignet pour me faire lâcher mon seul moyen de défense. Je lutte, mais face à la torsion de mes ligaments, je desserre ma prise. Aussitôt, Colin s'empresse d'envoyer valser la lame. Terrifiée, je lance des coups dans tous les sens pour essayer de me libérer. Mon corps entier s'efforce de se défendre, mais je comprends sans mal que ce pervers ne doit pas en être à son premier essai. À nouveau, il tord mon bras et m'arrache un cri de douleur.

— Vas-y, crie, personne ne t'entendra ici, raille-t-il.

Mes larmes redoublent. Je ne peux m'empêcher d'appeler à l'aide dans l'espoir qu'il se trompe. Cependant, mon geste est inutile. Dans ce bois reculé, personne ne m'entend et la douleur m'empêche de répliquer. Bloquée par sa prise militaire et sa force, il profite de sa supériorité pour attacher mes poignets avec la corde dans sa main droite. Le chanvre écorche ma peau alors que le sang circule difficilement dans mes doigts. Colin me bâillonne ensuite violemment la bouche avec un tissu blanc. J'ai du mal à respirer en plus d'avaler un peu de terre. Le poids de son corps me maintient à la limite de la suffocation, mes larmes dévalent sur mon visage. Ma gorge est douloureuse et mes appels à l'aide restent vains. Satisfait, mon agresseur me retourne sur le dos puis ouvre ma veste pour soulever mon pull et exposer ma poitrine.

— Oh oui, pleurs tant que tu veux, ça me fait bander plus fort ! Vas-y, crie !

Il s'esclaffe d'un rire sadique.

— Le Corbeau ne viendra pas te sauver, se moque-t-il, il est trop occupé à baiser en levrette une de ses fans !

Trop effrayée, obnubilée par le fait de sortir d'ici, je ne prends pas en compte ses paroles. Sans douceur, il arrache mon sous-vêtement en laissant des traces rouges et violettes sur ma peau. À nouveau, mon instinct de survie s'échine à me sortir de là, mais les mains de Colin attrapent mes seins et les maltraitent sans douceur. Ce que je ressens à ce moment-là : de la douleur, de la honte, mais aussi de la colère.

— J'aime bien quand mes proies essaient de se débattre ! s'écrie-t-il en embrassant mon cou.

J'ai beau appeler, hurler à travers le tissu blanc, m'étouffer avec ma salive, personne ne vient. Lorsqu'il commence à défaire ma ceinture, je ferme les yeux. Je suis condamnée. Je ne fais pas le poids contre lui. À bout de force, je me laisse aller en rejetant mon esprit aussi loin que je le peux. Je rêve d'un monde où la violence n'existe pas, où chacun peut vivre sans que sa vie lui soit dictée par un autre. J'imagine un univers fait de sourires, de bonheur, où chacun peut aimer qui il veut, où le jugement n'existe pas. Et pendant ce temps, les mains du pervers commencent à descendre mon pantalon. Je serre les dents en suppliant pour ne plus rien ressentir.

Puis, tout à coup, le poids sur mon corps disparaît, remplacé par l'airglacial de ce mois de janvier.

Call Me MonsterOù les histoires vivent. Découvrez maintenant