Chapitre 62 - Rachele

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Rachele

Je ne saisis pas véritablement ce qu'il vient de se passer, mais alors que le démon me dépose à terre, je suis prise d'un haut-le-cœur. Surprise, je me penche en attendant de calmer les soubresauts qui secouent mon corps. Jacob, quant à lui, fait les cent pas dans la pièce puis, sans prévenir, sous la colère, détruit la lampe de chevet, nous plongeant ainsi dans le noir. L'estomac comprimé, je pose une main sur mon diaphragme, une autre sur mon front en sueur. Je comprends sans mal qu'il m'a téléportée dans un lieu où personne ne pourra venir nous trouver. Un lit, deux tables de nuit, une commode qui supportait l'objet balancé, ainsi qu'un vieux tapis poussiéreux. C'est tout ce que possèdent ces appartements de luxe. Un rire jaune m'échappe mêlant folie et fatigue. Si je pouvais demander pardon à mes personnages, je le ferais. Vivre une chose est une aventure bien différente de lorsqu'on la raconte.

Au moins, je ne risque plus de mourir gelée.

Je masse avec douceur mon ventre pour détendre mes muscles afin de calmer les contractions de mon sternum. Puis, alors que mes envies de rendre s'estompent, mon corps épuisé tombe mollement sur le côté à l'instar d'un poids lourd. Des fourmillements s'étendent dans mes membres. J'inspire profondément pour tenter de soulager les picotements, mais grimace en inhalant l'odeur du motel. Un mélange de cigarettes et d'eau de Cologne bon marché emplit la pièce. Les haut-le-cœur ne sont peut-être pas dus qu'à la téléportation en fin de compte...

Le silence qui règne est écrasant. Seule ma respiration sonore se distingue du reste. Quand est-ce que tout cela prendra fin ? Épuisée, une perle salée coule sur ma joue. Mon père me disait souvent « les larmes sont une manifestation de la faiblesse », mais j'ai toujours pensé que les larmes sont la preuve de notre combat. À l'égal des cicatrices qui montrent notre acharnement, elles signifient qu'en dépit de tout, on est encore là. Elles sont un exutoire temporaire pour nous permettre d'étendre nos limites.

— Tu pleures alors que je ne t'ai encore rien fait, raille-t-il de sa voix démoniaque.

Je l'entends se déplacer dans la pièce avant de sentir ses bras chauds m'entourer puis me porter jusqu'au lit. Il m'assoit en me maintenant droite et soulève mon menton pour me forcer à le regarder.

— Je te fais si peur que ça ? demande-t-il en frôlant mes lèvres avec les siennes.

— Qui n'a pas peur de la damnation ?

Il se rapproche de moi.

— Ne t'inquiète pas, princesse, il y a toujours une part de plaisir dans la souffrance.

Si cette phrase avait pour but de me réconforter, il n'en est rien.

Avec légèreté, le monstre approche son visage du mien alors que le bout de sa langue chaude vient récupérer mes larmes. Cet acte qui aurait dû m'effrayer déclenche dans mon corps une série de frissons appréciateurs.

Comment puis-je réagir ainsi dans un moment pareil ?

Le geste tendre s'efface aussi vite qu'il est venu, emportant avec lui l'aise qui s'infiltrait en moi. Amusée par ma réaction en total désaccord avec mon esprit, inappropriée à la situation, la créature se redresse. Un doigt sous mon menton, il continue de me forcer à le regarder dans les yeux.

— Pourquoi est-ce que tu me fais ça ?

Un nouveau ricanement grave résonne dans la pièce.

— Ma princesse serait-elle fatiguée ? murmure-t-il lascivement à mon oreille. Pourtant la partie n'est pas finie...

Mon pouls s'accélère.

— Je ne veux plus jouer...

Des flammes dansent dans ses iris alors qu'il scrute mon visage dans la noirceur de la nuit.

— Je vais te confier un petit secret pour te remotiver ! continue-t-il. Sache, ma tendre, que peu importe mon nom, que l'homme en face de toi soit celui qui te berce ou celui qui te punit, ta destinée reste la même. Tu es ma Liin. Avoir en face de toi le démon ou l'humain ne change rien. Ton énergie m'appartient, ton cœur aussi, même ton corps reconnaît son maître. Il n'y a pas d'issue à notre lien. Pas de fin à notre histoire. Tu es ma moitié que tu le veuilles ou non. La couleur de mes iris n'y change rien non plus. Qu'elles soient d'un rouge sang ou d'un noir corbeau, toi et moi, c'est plus qu'un orgasme et un millier de fois plus qu'un battement de cœur.

Perturbée par ses mots, mon regard cherche à démêler le vrai du faux. Sans que je m'y attende, ses lèvres se posent avec vigueur sur les miennes. Leur incandescence me saisit. À l'instar d'une puissante drogue qui se répand dans mes veines, un torrent enflammé me consume de l'intérieur. Il m'embrasse avec hargne alors que ses dents me mordillent comme un avertissement. Son corps se fait plus pressant sur le mien et son baiser devient plus urgent, se nourrissant de tout ce qui traverse mon esprit.

Mon besoin de lui devient incontrôlable.

J'oublie où, quand, comment, pourquoi, jusqu'à nos identités. En quelques secondes, toute mon attention revient à nos bouches entrelacées. Comme si ses mots avaient déverrouillé le cadenas passionné de mon âme, je meurs à chaque fois que ses lèvres menacent de se détacher des miennes. C'est mal, mais je ne peux pas m'en empêcher. S'il se nourrit de mon flux vital, je me nourris du sien. Ce n'est pas du vol, c'est un échange. Ma bouche épouse la sienne comme si ma vie en dépendait.

« Ne me quitte pas... », lui murmure mon inconscient.

Des larmes coulent sur mes joues à l'apparition de cette pensée parasite, mais le démon ne rompt pas notre étreinte pour autant. Il passe un bras autour de ma taille avant de me serrer contre lui. Sa bouche se promène ensuite le long de ma mâchoire, de mon cou. Je peux sentir son sexe gonfler d'envie contre moi et je ne peux me retenir de réagir à son corps.

Soudain, il se relève, laissant un vide intense se créer en moi. Comme si je ne contrôlais plus ni mes actes ni mes pensées, j'en redemande. En réponse, il me lance un regard animal avant de m'arracher mes vêtements qui finissent en lambeaux au sol. Féroce, il revient au-dessus de moi tandis qu'un besoin vital de lui se presse dans mon cœur. Je passe alors mes bras autour de son cou pour le maintenir contre moi et il fait de même pour me clouer sous lui.

Je devrais être gênée ou même dégoutée de réagir ainsi à lui, mais la bienséance n'appartient plus à nos étreintes depuis longtemps. La seule chose qui a de l'importance en cet instant c'est nos caresses. Il s'est ancré si profondément en moi que je ne peux lutter contre cette danse enflammée en dépit de tout le reste. Sa main descend avec lascivité le long de ma hanche et effleure ma cuisse tandis que ses lèvres sillonnent mon cou. Je gémis de plaisir en me laissant emporter par la scélérate vague de désir qui explose en moi.

Son majeur parcourt ensuite l'intérieur de ma jambe jusqu'à mon intimité. Il sait parfaitement ce qu'il fait. Il connaît mon corps par cœur. Doucement, son doigt entre en moi en m'arrachant un murmure. Il n'a pas d'efforts à faire, je suis déjà trempée. Des frémissements de désir saisissent mon enveloppe charnelle. Ses va-et-vient sont envoûtants, mon corps en demande toujours plus. Son instrument de torture rencontre alors mon point G tandis que sa langue vient caresser mon clitoris. Prise d'intenses convulsions d'ivresse, j'attrape ses cheveux. Il répond à ma requête silencieuse en changeant de rythme. Je ne peux que gémir plus fort. Puis, au moment où je suis au bord de la jouissance, il décide de s'arrêter.

Je geins de frustration.

Il me regarde de manière joueuse et animale en entendant s'échapper ma supplique. Un sourire malin se peint sur ses lèvres. Il remonte son visage à mon niveau, ses deux mains venant se positionner de chaque côté de ma tête.

— Je n'en ai pas fini avec toi, me susurre-t-il.

Certains diront que je suis folle, d'autres que je suis faible, mais jedéfie quiconque de prendre ma place face à une entité démoniaque de sonenvergure. La seule chose que l'on peut faire c'est se perdre en lui jusqu'à cequ'enfin il décide de nous libérer.

Call Me MonsterOù les histoires vivent. Découvrez maintenant