Dylan s'immobilisa devant l'entrée de son établissement scolaire et senti un énorme frison le parcourir. De la plante de ses pieds jusqu'en haut de sa nuque. Sur le portail en pierre s'érigeait une énorme croix sur laquelle était crucifié cet homme connu du monde entier. C'était la première fois que Dylan se retrouvait face à face avec ce personnage historique depuis qu'il était devenu immortel. Pour des raisons qu'il ignorait, il avait su dès la seconde où son cœur avait cessé de battre qu'il finirait par se sentir méprisé par cette figure, et là, cette réalisation s'imposait clairement à lui.
Il riva ses yeux vers le sol, tentant d'oublier l'image des épines acérées implantées dans le front de Jésus. Malgré lui, il s'imagina la couleur et l'odeur du sang, et d'un coup, sa gorge tressaillit. Il dû se mordre la langue pour se soulager.
Rappelle-toi ce que Mitch t'a dit. Retiens ta respiration.
Ce qu'il fit.
Il inspira profondément avant de traverser les portes principales. Bien qu'il fût impatient de recommencer les cours et de reprendre un train-train quotidien à peu près normal, il ne pouvait s'empêcher de se demander si ce n'était pas trop tôt. Après tout, il se contrôlait à peine. Mitch, l'alpha du clan des métamorphes ou plus communément appelés les loups-garous, avait des techniques assez radicales. Il lui avait assuré qu'il n'y avait pas de meilleur moyen d'apprivoiser sa soif qu'au milieu de gens aux vaisseaux sanguins bouillonnants.
— Hé, fais gaffe ! s'exclama une voix inconnue.
Dylan s'excusa maladroitement, réalisant qu'il venait de bousculer quelqu'un. Visiblement, les simples pensées sur le sang, les veines ou tout ce qui se rapprochait de quelque chose de comestible pour lui, accaparait toute son attention. Il tenta tant bien que mal de se concentrer sur les nombreuses rangées de casiers qu'il croisa tandis qu'il se rendait à sa salle de cours. Il essaya de se focaliser sur les cadenas, sur les chiffres gravés dessus, même s'il jugeait cette démarche complètement absurde et dénuée de sens. Pourtant, au bout de quelques couloirs traversés, sa soif semblât s'estomper. Bien que ce simple constat lui rappelât que sa gorge réclamait du sang, le faisant réaliser qu'il était coincé dans un cercle vicieux et sans fin.
Je n'y arriverai pas.
Je n'arriverai pas à rester assis au milieu d'une salle bondée de gens pendant plus d'une heure, se répéta-t-il en se grattant nerveusement la nuque.
En dépit de son flagrant manque de confiance en sa maîtrise de soi, il franchit la porte de son cours d'histoire quelques secondes plus tard. Heureusement, il comptait parmi les premiers arrivants. Il aurait donc le temps et l'opportunité de s'habituer à chaque nouvel élève qui passerait la porte.
Pour des raisons évidentes, Dylan s'installa dans la dernière rangée où persistait une certaine pénombre. La journée était pluvieuse, ne laissant donc pas passer beaucoup de lumières dans les classes. C'était un miracle pour le jeune homme dont les yeux avaient beaucoup de mal à s'accoutumer à la lueur du jour. Le Tout Puissant n'était peut-être pas si méprisant à son égard, finalement ?
Alors qu'il reprenait peu à peu confiance en la situation, la personne qu'il redoutait le plus croiser ce jour-là entra dans la classe ; Alyson Williams. Elle était habillée de son attirail vestimentaire habituel : leggings noirs, bottes au style rétro des années quatre-vingt-dix et un pull imposant. Contrairement à d'habitude, ses cheveux courts étaient attachés en toque derrière sa tête, exposant son cou. À cette vue, Dylan s'agrippa aux barres en fer qui soutenaient son pupitre et ne laissa plus passer d'air dans ses narines. Malgré tous ses efforts, il pouvait humer son parfum. Et pour couronner le tout, la jeune fille prit la décision de s'asseoir dans la même rangée, à deux tables de distance de la sienne.
Dylan fut dans l'incapacité de la quitter des yeux dès son arrivée, poussant l'enseignant à le ramener à l'ordre lorsqu'il commença son cours :
— Monsieur Harisson ? J'aimerais que votre attention soit dirigée vers l'avant, s'il vous plaît.
Les mains de Dylan se crispèrent davantage et il réprima un grognement sourd dans sa gorge. Oh putain, la honte. Il s'efforça d'écouter attentivement le professeur qui présentait le plan de cours pour les mois à venir. Toutefois, les battements de cœur rapides et désordonnés d'Alyson résonnaient à ses oreilles, lui rendant difficile de demeurer immobile. Il tordait ses chevilles si fort contre le sol qu'il songea que ses os finiraient par céder. Si cette musique organique ne cessait pas, il serait obligé de prendre la fuite ou pire, de remédier à la situation.
Non, tu ne feras pas ça.
Il jeta un regard furtif supplémentaire en direction de la brune, et dans un gloussement d'effroi silencieux, il identifia la source de son malaise. Alyson se grattait simplement le bras gauche, par-dessus la manche son pull noir. Le problème, c'était qu'une odeur de sang terriblement prononcée s'en dégageait. Elle s'est coupée, j'en suis certain. Et ses coupures sont profondes, songea-t-il douloureusement. Sinon, ça ne saignerait pas autant.
Soudain, la pire des situations arriva ; Alyson leva la main à l'intention du professeur, demandant si elle pouvait s'éclipser pour aller aux toilettes. Tandis qu'elle brandissait son bras dans les airs, Dylan s'imagina des coulures de sang serpentant le long de son avant-bras, sous la manche de sa veste. Il se cramponna aux rebords de sa chaise pour ne pas aller vérifier sa théorie.
Ayant reçu la permission de l'enseignant, Aly se leva de sa chaise et se dirigea vers la porte de la classe avant d'en sortir. À partir de là, Dylan ne tint pas plus de dix secondes avant de la suivre. Le rebelle qu'il était ne demanda même pas l'avis du professeur. À l'extérieur de la classe, il repéra Alyson à l'extrémité du couloir. Avant même qu'il ne puisse penser à la suivre, ses jambes se mirent en mouvement. Il se retrouva à avancer très rapidement en sa direction, partagé entre son envie de lui demander ce qui n'allait pas et son envie de l'attraper et enfoncer ses canines dans sa jugulaire.
Il n'était plus qu'à un mètre d'elle lorsque, subitement, une force surhumaine équivalente à la sienne le propulsa contre une rangée de casiers. Il se retrouva alors comprimé contre la paroi métallique, enserré par les mains de son meilleur ami, Shawn.
— Qu'est-ce qui te prend ? contesta Dylan, offusqué.
— Non mais tu t'es vu ?! rétorqua Shawn d'une voix paniquée. Tu étais à deux doigts d'en faire ton repas !
Voyant qu'il était parvenu à le ramener à la réalité, Shawn relâcha son ami qui ne tarda pas à s'emporter de nouveau.
— Donc tu me suis si je comprends bien ? Super ! C'est Mitch qui t'a demandé d'être mon chaperon ? (Shawn ne répondit rien, lui donnant raison.) Je ne suis pas un gosse, merde !
— Peut-être, mais en attendant, je me demande bien ce qui se serait passé si je n'avais pas obéi à ses ordres. Et crois-moi, au moment où tu voudras d'elle plus que tu la voulais déjà quand tu étais humain, tu seras reconnaissant que je sois là pour t'arrêter.
VOUS LISEZ
L'Alpha - Volume 1 : Le Clan O'Connell
ParanormalLaura, une étudiante timide, fait son entrée à l'Université de Kincardine. Une nouvelle vie intrépide pour la jeune fille qui n'a dès lors jamais connu le monde extérieur, ayant vécu avec sa grand-mère la majorité de sa vie. Tout semble bien aller j...