Chapitre 57

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« Je t'aime. »

Cette toute petite phrase avait provoqué l'effet d'un électrochoc chez la jeune fille. Lucas n'avait jamais exprimé son affection de cette façon. Il ne s'était jamais caché, certes, mais il n'avait jamais employé ces mots exacts.

Laura se mit à battre des pieds et à nager jusqu'à la sortie conventionnelle de la piscine, c'est-à-dire les escaliers. Dans son envie de mettre Lucas à la flotte, un peu plus tôt, elle les avait presque oubliés.

— Laura, l'interpella le brun.

Le jeune homme pensait devoir affronter une seconde mission de course-poursuite, mais alors qu'il allait se presser de la rattraper, elle se posa dans les escaliers de sorte que la moitié de son corps soit toujours immergé sous l'eau afin de se garder au chaud.

— Ne t'en fais pas, le rassura-t-elle. Je ne vais pas m'enfuir.

Elle rit. Lucas fit pareil, car le rire de Laura n'était pas nerveux, ni jaune. Elle semblait rire d'elle-même dans une autodérision des plus franches. Le jeune homme s'avança tout de même jusqu'à la rangée de trois escaliers, jusqu'à être mesure de pouvoir mettre ses pieds sur le parterre.

— N'importe quoi, soupira la jeune fille en tordant ses cheveux.

— Tu parles à moi ou au monstre ? À moins que tu me considères comme un monstre, maintenant ?

Laura soupira de nouveau, toujours avec un drôle de sourire aux coins des lèvres.

— Je me parlais à moi-même. Je suis le monstre.

Lucas resta de glace, se résignant à l'écouter parler. Sans qu'il ne s'y attende, la jeune fille leva sa main en l'air pour lancer d'une manière plus animée :

— Mais c'est ma faute après tout, non ? Tu avais déjà essayé de me le faire comprendre sur la plage, mais je n'avais saisi jusqu'à maintenant. En fait, ce n'est pas moi qui m'inflige ça, c'est ce comportement odieux que ma mère a toujours...

Elle soupira de nouveau, le regard fuyant. Lucas, lui, l'écoutait avec attention.

— Elle est passée par tellement d'amants et de coups d'un soir que je me suis toujours demandé s'il elle avait l'énergie et la force de donner ne serait-ce qu'un peu d'amour à chacun d'entre eux. Elle se rendait malade à l'idée de vouloir aimer, mais elle le faisait très mal. Comme moi, désormais.

Un dicton dit que nous sommes le reflet de nos aînés. « La pomme n'est pas tombée loin de l'arbre. » C'était ce que tout le monde me répétait sans cesse. Surtout mes oncles et mes tantes, car ils ne me connaissaient pas. Inconsciemment, ils parlaient de ma mère. Ça se devinait aux allusions sur les choses généralement atypiques et moralement malsaines qu'ils me disaient. Telle la remarque comme quoi qu'une fois un peu plus vieille, il me serait sûrement donné d'avoir des hanches aussi étroites que les siennes.

Très bien, cela dit maintenant, supposons pendant une minute que je sois une pomme et que je sois à nouveau liée à cette famille. Je préférais me faire croquer plutôt que d'écouter ce genre de propos généralement dit par des gens trop culottés ou trop souvent ivres. Ma mère n'avait pas toujours eu de bonnes fréquentations.

La rouquine aurait voulu être noyée sur le champ ou alors, cette pensée était seulement une manière de pallier qu'elle avait déjà la forte sensation de couler.

— Tu n'es pas comme elle, objecta Lucas.

— Je sais, répondit-t-elle aussitôt. Quelque part au fond de moi, je le sais. Mais je ne peux pas m'empêcher de croire que ses addictions ont empiété sur ma vie et sur ce que je suis et que comme elle. Que je ne sais pas aimer modérément.

L'Alpha - Volume 1 : Le Clan O'ConnellOù les histoires vivent. Découvrez maintenant