Chapitre 9

63 5 6
                                    

Il était vingt-et-une heures. Le ciel avait laissé place au drap noir de la nuit et aux étoiles depuis un moment. Le feu dans lequel Lucas et Brendon avaient mis tant d'efforts, de fous rires et de cœur, brillait désormais plus que jamais. Les trois jeunes gens avaient abondamment eu le temps de profiter de leur soirée. Mais la réalité du moment les rattrapait ; Laura allait devoir partir. Depuis leur petit, mais agréable délire de danse improvisée, elle avait adopté la manie de regarder l'heure et donc, de consulter son téléphone à répétition, presque maladivement.

Ce qui pouvait lui arriver de pire serait qu'elle rate son bus. Au moment d'acheter son billet, elle avait sélectionné le départ le plus tardif. C'est-à-dire à vingt-trois heures trente. Ironiquement, Laura était censée se trouver chez Alyson à cet instant précis, en train d'anticiper des aux revoir déchirants. Elle qui avait tant espéré profiter de sa compagnie le plus possible.

L'une des raisons primaires qui la rendait si nerveuse et obsédée par le fait de vérifier l'heure, était qu'elle voulait s'en tenir à ce plan ; passer du temps avec sa meilleure amie. Pour sa grande peine, c'était une chose qu'elle serait forcée de faire à l'hôpital. Si seulement elle avait su que les évènements prendraient un tel tournant dramatique, elle aurait menotté le bras d'Alyson au sien durant la soirée maudite. Elle aurait pris leurs sacs qui trainaient sur le canapé et elle l'aurait amenée ailleurs. Elle s'en voulait d'avoir sauté si vite aux conclusions, ce soir-là. Elle rageait contre elle-même en se disant qu'elle aurait dû envoyer plus de textos à Aly avant de quitter la soirée, quitte à ce que ça ressemble à du harcèlement. Elle se répétait qu'elle aurait dû sentir que quelque chose n'allait pas.

Si seulement.

En ce qui concernait les raisons secondaires qui la rendait si nerveuse et bien... Laura était pompette. Très pompette, même. Lucas avait gagné la bataille en lui faisant goûter le nectar qu'était la bière des brasseries d'Ontario et elle avait été séduite. Même si en règle générale, la bière n'avait jamais fait partie de son top trois d'éphémères distractions de soirées entre amis. Cependant, à force de boire autant d'alcool, il n'y avait pas que ce délicieux breuvage qui réussissait à l'aguicher et à l'affrioler.

— Je vais pisser ! déclara Brendon en insistant sur chaque syllabe.

Les deux autres se moquèrent ouvertement de lui lorsqu'il entreprit la direction de l'eau pour uriner. Comme c'est charmant ! se dit aussitôt Laura. L'alcool avait plaqué le blond au sol comme l'aurait fait un joueur de football américain. Il était bien amoché, ce qui n'était pas étonnant vu le nombre de bières qu'il s'était enfilé.

Lucas, lui, avait déjà vécu pire. En bref, il avait déjà été plus ivre. Même si son état d'euphorie lui donnait le courage d'observer la rousse avec plus d'attention quand leurs échanges lui en donnaient la possibilité. Il ne serait pas allé jusqu'à prétendre qu'il la regardait d'une manière différente, ni même qu'il la matait, mais plutôt qu'il étudiait sa gestuelle. Son non-verbal ainsi que le langage de son corps. Comme tout ce qu'il avait lu sur la psychologie le disait si bien ; le corps dit beaucoup de choses.

Quand il n'eut plus que le bruit de Brendon qui se vidait la vessie au loin, il décida de briser le silence :

— Qu'est-ce qui t'est arrivé sur le campus, ce matin ?

L'Alpha - Volume 1 : Le Clan O'ConnellOù les histoires vivent. Découvrez maintenant