Chapitre 52

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Cela faisait plus de deux heures que Lily se retournait dans son lit, changeait la position de ses oreillers et effectuait des exercices de respiration pour tenter de se calmer. Mais rien n'y faisait. Il était presque six heures. Malgré tout, le ciel se révélait toujours aussi noir qu'au milieu de la nuit et Lily réalisa qu'en vue de ses pensées trop actives, elle n'arriverait jamais à se rendormir. En se retournant vers le lit vide de sa colocataire, elle songea que la journée de travail entre Laura et Lucas devait s'être bien passée puisqu'elle n'était pas rentrée dormir. Pour la peine, Lily aurait parfaitement pu aller passer la nuit au chalet de Mitch et Anaïs et dormir bien au chaud dans les bras musclés de son blondinet, mais... elle savait. Elle savait très bien que Brendon aurait remarqué son humeur morose, sa panique intérieure qui avait fleurit en elle depuis sa visite à l'hôpital.

Alors qu'elle venait tout juste de se redresser dans son lit et de poser les deux pieds par terre, son téléphone vibra. Elle venait de recevoir un message d'Hashley, sa petite sœur.

« Merci. »

Ce remerciement était dû au texto que Lily lui avait envoyé la veille pour la féliciter de s'être trouvé un emploi. Mais ce message inoffensif fut rapidement suivi d'un second.

« Est-ce que tu penses qu'on pourrait se voir ? J'ai besoin de te parler de quelque chose. Je crois que je suis dans la merde. N'en parle surtout pas à maman ! Elle ne doit pas être au courant ! »

Lily s'empressa de fouiller dans un de ses tiroirs et d'en sortir un pull afin de se protéger de la température glaciale qui régnait dans la chambre. À peine le vêtement enfilé et le col passé sous son menton, elle répondit :

« Maintenant ? Je ne suis même pas sûre qu'il y ait un bus qui puisse t'amener en ville à cette heure. »

« Je suis déjà en ville, mais non. Plus tard. Je suis avec un ami pour le moment. »

« Ça marche. Je passerai te prendre en début d'après-midi. Tu n'auras qu'à m'envoyer un message pour me dire où tu es ou je t'enverrai l'adresse du campus pour que tu puisses me rejoindre. »

« Ça marche. »

Leur conversation prit fin lorsque les deux sœurs s'envoyèrent des émoticônes en forme de cœur mauve. Après une courte réflexion sur le pétrin dans lequel Hash avait bien pu se mettre, Lily revint à ses propres problèmes. Bien qu'elle tentât toujours de les renvoyer dans les abysses de sa cervelle dès qu'elle le pouvait.

Elle s'habilla un peu plus chaudement, rassembla son téléphone, ses écouteurs ainsi que son portefeuille et quitta la chambre en prenant soin de verrouiller derrière elle. La maladie expliquait bien plus sa petite marche matinale que la simple envie de prendre l'air afin de se changer les idées. Comme d'habitude, elle souhaitait brûler le plus de calories qu'elle le pouvait même si son état l'empêchait de pratiquer un quelconque sport depuis des mois.

Une fois en bas de l'immeuble, elle poussa contre la porte en verre et fut saisi par le vent glacial et sec de l'extérieur. Le ciel s'éclaircissait de plus en plus, annonçant la venue du jour et de belles heures ensoleillées. Elle fourra son portefeuille dans la poche de son manteau du mieux qu'elle le put et entama sa marche en direction de la plage.

Dès arrivée là-bas, elle prit place sur une des chaises pliantes qui restaient toujours aux alentours du feu de camp qui était éteint à ce moment-là. Elle tremblait malgré ses nombreuses couches de vêtements, mais ne pouvait s'empêcher de s'en réjouir ; le froid forçait son corps à créer de la chaleur et donc, à brûler des calories. Il s'agissait d'une autre de ses techniques maladives afin de se débarrasser ne serait-ce que de quelques calories.

Elle resta sur la plage durant une trentaine de minutes à regarder les vagues en écoutant de la musique à l'aide de son casque audio. Elle songeait à aller voir Anaïs et à lui raconter ce que l'infirmière avait tenté de lui faire croire, mais ses doutes sur la question l'en empêcha. Il fallait qu'elle s'en assure. Si elle n'était bel et bien pas enceinte, elle se permettrait d'en rire avec cette dernière plutôt que de l'inquiéter pour du beurre.

Sur cette décision, Lily rejoignit la rue de nouveau et dévia sa trajectoire en direction du boulevard et la rangée de magasins qui s'y trouvaient, y compris une pharmacie. La pauvre dut attendre une autre demi-heure avant que le commerce ouvre ses portes en dépit de l'heure hâtive. Ce ne fut qu'à sept heures et deux minutes exactement qu'une vieille dame aux cheveux blonds cuivrés vint décadenasser les portes principales et permit à Lily de se balader librement entre les rangées de la pharmacie. Naturellement, elle trouva vite la tablette sur laquelle reposaient les tests de grossesse d'un paquet de marques différentes. Elle se cassa la tête à en choisir un. Puis dans un élan de paranoïa, elle décida d'en acheter deux par peur qu'un seul ne suffise pas et lui donner un résultat erroné. Avec deux tests, au moins, elle aurait l'esprit tranquille.

En sortant du magasin, Lily s'arrêta au Starbucks qui se trouvait juste à côté et but un café corsé sur place. Inconsciemment, elle repoussait le moment où elle ferait les tests.

Puis vint le moment de rentrer au dortoir.

Lily entra en trombe dans la chambre et balança toute ses affaires sur son lit à l'exception des tests de grossesse. Elle referma la porte avant de longer le couloir jusqu'aux toilettes. Je vais en finir avec ça une bonne fois pour toute ! pensa-t-elle rageusement en baissant son pantalon avant de s'asseoir sur la cuvette. Elle urina sur les deux bâtonnets avant de remettre leurs capuchons en place, et elle sortit de la cabine afin de se laver les mains. Ensuite, elle retourna dans sa chambre et posa les deux tests sur sa table de chevet en attendant que les résultats s'affichent. Elle était confiante, même si elle sentait qu'elle l'était davantage au moment de les acheter. Là, ses jambes tremblaient et une énorme envie de vomir la persécuta alors que des motifs commencèrent doucement à se dessiner sur les bâtonnets en plastique.

— Non.

Lily se frotta les yeux, au point que sa vision devint floue durant quelques secondes. Sa gorge se resserra plus fortement encore lorsqu'elle constata que les deux tests se révélaient tous deux positifs. Elle revérifia le mode d'emploi et braqua de nouveau ses yeux sur sa table de chevet. C'était positif, donc négatif.

— Non, non, non, non...

Elle s'empressa de les empoigner et de les balancer dans la petite poubelle en aluminium posée près du réfrigérateur. Elle déchira la notice avant de lui faire subir le même sort.

— Ce n'est pas vrai ! pleura-t-elle en empoignant sa chevelure à deux mains.

Elle retrouva rapidement le silence, car l'angoisse qui lui entravait la gorge lui parut trop douloureuse pour qu'elle se permette d'hurler davantage. Elle se résigna alors à retourner dans son lit, en pleurs, la tête en feu. La fatigue l'assomma qu'une fois que les larmes eurent raison d'elle.

L'Alpha - Volume 1 : Le Clan O'ConnellOù les histoires vivent. Découvrez maintenant