Ce fut un bourdonnement rythmé et répétitif qui se chargea de réveiller Alyson. Lorsqu'elle émana du sommeil, elle fut perturbée par la froideur de l'endroit où elle se trouvait, elle qui, deux minutes auparavant, était plongée dans cet endroit peuplé de rêves ou dans ce gigantesque néant où il lui était donné de ne rien ressentir. Elle adorait dormir durant de longues heures pour cette raison ; elle flottait, elle se sentait sereine, aucunement consciente des événements qui se produisaient autour d'elle.
Lorsqu'elle réalisa que les bruits qui l'avaient réveillée étaient des gazouillements et qu'elle se trouvait dehors, elle hoqueta de panique en se redressant. Elle avait passé la nuit dans l'aire de jeux.
Sur cette révélation, son ventre se noua et laissa place à une nausée incontrôlable. Elle extirpa son portable de la poche de son jean et soupira en réalisant qu'il était presque dix heures.
— Merde ! Merde ! Merde ! s'exclama-t-elle en continuant de fixer l'écran de son téléphone.
Aussitôt, Dylan se réveilla à son tour, désorienté. Par réflexe, il attrapa le bras de la jeune fille et demanda d'une voix pleine d'inquiétude :
— Qu'est-ce qui se passe ?
— Je n'ai pas dit à ma mère que je découchais, expliqua-t-elle en se levant précipitamment. Elle doit être en pleine crise d'hystérie !
Elle s'empressa de descendre du module tout en replaçant ses cheveux ébouriffés et le col de sa veste dans l'intention de camoufler ses bleus le mieux possible. Dylan la suivit.
— Tu veux rentrer, là, maintenant ?
Alyson se retourna vers lui.
— Je n'ai vraiment pas le choix, s'excusa-t-elle. Sinon, je vais me faire engueuler. En fait, c'est déjà sûr à cent pour cent que je vais me faire engueuler.
Ce fut donc encore à moitié endormi que les deux jeunes adultes avaient entamé leur trajet en direction de leurs demeures respectives. Ils avaient traversé les sentiers du petit parc dans un silence presque malfaisant. Alyson était trop plongée dans ses pensées pour parler, car elle réfléchissait sans cesse à la conversation qu'elle avait eu avec Dylan. Les sujets abordés, déjà qu'ils ne fussent pas très joyeux, avaient ébranlés la jeune fille. Tellement qu'elle se demandait si elle n'avait pas rêvé. Il n'était plus seulement question d'elle, mais de Dylan aussi. Il avait traversé ce qu'elle endurait dans le présent et il semblait s'en être remis d'une facilité exemplaire et très frustrante.
Frustrante, oui. C'est bien le mot.
Elle voulait savoir son secret. Comment avait-il fait pour arriver à s'en sortir ? Alyson ne le savait pas et c'était bien dommage. Néanmoins, elle avait espoir que c'était possible, désormais.
Une fois devant chez elle, Alyson freina sa marche. L'envie de passer la porte était morte et enterrée, simplement parce qu'elle savait ce qui l'attendait. Elle se contenta alors de fixer les fenêtres et les volets bleus de sa chambre, sans voix.
— Bon, fit Dylan en espérant une réaction de la part de la jeune fille. Mon travail ici est terminé. Tu es chez toi saine et sauve.
Alyson ricana.
— Ton travail ? répéta-t-elle en fronçant les sourcils. Tu considères ça comme un job ?
Les yeux du jeune homme s'illuminèrent alors qu'il esquiva un sourire. Il fit un pas vers la brune et attrapa sa main afin d'y poser un baiser.
— Tu sais très bien que non, répondit-il d'un ton exquis.
Alyson recula d'un pas. Ces petits gestes de tendresse ne la dérangeaient plus, c'était plutôt l'envie évidente de Dylan de vouloir aller sur le chemin d'une relation. Elle n'était pas du tout prête pour ça.
Elle persista à ne laisser paraître aucune réaction, de peur que ses pensées se reflètent à travers ses yeux, mais il était trop tard. Dylan avait senti la tension entre eux et songea qu'il aurait pu la sentir même si elle était rentrée chez elle.
Il opta alors pour des aux revoir moins théâtrales.
— À plus.
À la porte, la brune jeta un dernier regard vers le jeune homme qui avait enfin décidé de lui faire volte-face et elle mit un pied dans la maison, le cœur battant. Elle se répétait dans un mensonge déconcertant que tout allait se passer. Que Manon et Benoît passeraient par-dessus de ce malentendu qu'elle avait elle-même créé en ne rentrant pas dormir. Mais il était évident que ce serait le total inverse.
— Aly ?!
C'était officiel. Manon était hors d'elle. Sa voix l'avait trahie en moins d'une seconde.
— C'est moi, lança sa fille d'un ton menacé.
Lorsqu'elle avança en direction de la cuisine et du salon, elle remarqua que Benoît était installé devant la télévision. Il faisait mine que tout ça ne le concernait pas alors qu'au contraire, il avait tendance à beaucoup trop s'impliquer dans les disputes de sa femme et d'Alyson. Ce qui fâcha la brune sur le moment, fut le regard de son beau-père dirigé vers la télé plasma sur laquelle les images défilaient, alors qu'aucun son ne s'en émanait. Il allait déguster le moment où sa mère la gronderait.
Salaud.
— Où étais-tu passée ?! hurla Manon en apparaissant dans le couloir. Je t'ai appelé au moins vingt fois depuis ton départ d'hier soir ! J'étais morte d'inquiétude !
Alyson songea rapidement à l'idée de courir et de s'enfuir de la maison afin d'aller se réfugier chez son voisin d'en face, mais se résigna, trop pétrifiée pour mettre ce plan à exécution.
— J'étais...
Pense vite, Aly. Allez !
— Je suis allée rejoindre Laura sur le campus, expliqua-t-elle d'une voix étranglée. Elle voulait que j'aille la visiter et que je vois sa nouvelle chambre. On a beaucoup parlé et on a fini par s'endormir. C'est tout.
— Et prévenir ta mère, c'était trop dur ? commenta Benoît qui était toujours installé sur le canapé.
Un grognement de frustration se fraya un chemin dans la gorge d'Alyson.
— Je viens de m'expliquer ! On n'a pas du tout vu le temps passer et je n'ai pas eu le temps de vous prévenir avant de m'endormir. Vous n'allez quand même pas m'en vouloir pour ça ?
Lorsque son beau-père prit enfin l'initiative de s'extirper de son trône qu'était le divan de cuir noir, il rejoignit le couloir ainsi que sa femme pour lui porter main-forte. Alyson savait qu'il s'apprêtait à lui faire la morale ou à lui annoncer sa punition. Il avait l'autorité d'un père.
Sauf qu'il n'est pas mon père. Il ne le sera jamais.
— Tu es privée de sortie pour le reste de la semaine et du weekend, déclara Benoît d'une voix stricte. Et si tu sèches les cours demain, ça sera la même chose pour la semaine prochaine.
La jeune fille ne put s'empêcher de lâcher un petit rire de gorge qui l'insupporta elle-même. Si la punition avait été énoncée par sa mère, la pilule aurait probablement mieux passée. Mais là, une avalanche de colère s'était déferlée et abattue sur elle.
— Compte dessus, répliqua Aly avec sarcasme. Ça tombe très mal pour toi, car je fiche le camp chez mon père.
Lorsqu'elle atteignit l'étage du dessus et qu'elle entra dans sa chambre, le cri de fureur qu'elle poussa fut la seule chose qui se fit entendre dans la maison. Malgré tout, Benoît avait gagné ; sa porte n'était toujours pas revenue.
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L'Alpha - Volume 1 : Le Clan O'Connell
FantastiqueLaura, une étudiante timide, fait son entrée à l'Université de Kincardine. Une nouvelle vie intrépide pour la jeune fille qui n'a dès lors jamais connu le monde extérieur, ayant vécu avec sa grand-mère la majorité de sa vie. Tout semble bien aller j...