L'Alpha - Volume 1 : Le Clan O'Connell

Chapitre 61

— Mmh.

Brendon releva la tête. Il n'avait fait qu'écouter la respiration de Lily durant près de quarante minutes et voilà qu'elle s'agitait. Dès les yeux à moitié ouverts, elle se pencha au-dessus du bol en plastique que Laura avait déposé à son attention, tout près du divan. Elle alla pour enfoncer ses doigts dans sa gorge.

— Lily ! l'interrompit le blond en essayant de ne pas paraître en colère.

La jeune fille sursauta, stoppant son geste.

— Tu m'as fait peur, fit-elle d'une voix endormie.

Brendon ne répondit rien alors qu'elle se redressait avec misère contre le dossier. Elle balaya la pièce du regard et fronça les sourcils.

— Où est passé tout le monde ?

— La police s'est pointée pour annoncer à Alyson que son père était décédé. Elle s'est enfuie dans les bois. Les invités sont partis, Hash s'est cassé avec Shawn à moto, expliqua-t-il vite-fait. Tu ne t'en rappelles pas ?

Lily cligna des yeux.

— Vaguement, soupira-t-elle.

Elle se tâta le front en grognant de douleur. Visiblement, l'alcool avait fait bien des ravages. Elle avait l'impression que sa tête se faisait marteler à répétitions, que son estomac était en bouillie et que son cœur s'expulserait par sa gorge tant elle avait la nausée.

— J'ai un truc à te dire.

Bien que Brendon entamait un discours pour le moins important, la brune n'eut même pas la force de tourner les yeux vers lui.

— Quoi ? l'interrogea-t-elle.

— Lucas et moi on a dû aller chercher Dylan dans la forêt. Il était sur le point de s'en prendre aux policières qui étaient en train de chercher Aly et... (Il marqua une pause, craignant de recommencer à pleurer.) Lucas s'est fait tirer dessus. Par chance, la police a eu peur et on a décidé d'amener Alyson loin de la forêt, mais quand j'ai réalisé que Lucas était blessé j'ai... je ne m'en souviens pas. Ce n'est pas clair.

Lily resta muette, trop étonnée pour répondre.

— Quand je suis revenu à moi, Laura nous avait rejoints dans la forêt et elle était dans les vapes. Dylan m'a pressé pour qu'on la ramène ici, pareil pour Lucas. Il n'a pas eu le temps de m'expliquer. J'ai dû transporter Laura jusqu'à la jeep et j'ai vu qu'elle avait une marque de morsure sur le bras...

— Et ?

Brendon s'étrangla.

— Je crois que c'est moi qui ai fait ça.

Cette fois, Lily le regarda. Troublée, elle secoua la tête et demanda :

— Tu l'as transformé ?

Brendon se recroquevilla en camouflant son visage au creux de ses mains. Il savait autant que Lily ce que cela représentait et il savait aussi que si Lucas s'en sortait, jamais il ne le pardonnerait.

— J'espère que non, conclua-t-il en se levant du canapé.

Il attrapa la veste de Lily accrochée au porte-manteau et lui apporta. Encore alcoolisée, elle se leva, un peu paumée et enfila le vêtement.

— Et ils sont où, là ? demanda-t-elle, presque indifférente.

— Mitch est venu nous rejoindre et il a pris la voiture pour les ramener à la maison. Il devrait revenir nous chercher dans pas longtemps. Dylan est parti. Je crois qu'il avait besoin d'être seul.

Lily adhéra d'un signe de tête, manquant toujours à démontrer quoique ce soit, excepté sa froideur. Silencieuse, elle se dirigea vers les escaliers du hall et les descendit toute seule afin de rejoindre l'extérieur. Brendon la suivit sans insister, certain que Mitch arriverait d'une minute à l'autre dans tous les cas.

Malgré l'air rafraîchissant des petites heures du matin, Lily comprit que ce ne serait pas le remède de ses nausées ; elles persistaient. Exaspérée, elle gémit en se penchant au-dessus des buissons qui longeaient le devant de la maison et se mit à déglutir sans même le provoquer. Convaincu qu'elle se faisait vomir, Brendon se mit à hurler derrière elle.

— Lily ! Arrête ! hurla-t-il.

La brune l'entendit approcher et paniquée, elle s'objecta entre deux hauts de cœur.

— J'ai mal au cœur !

— Pas à moi. Je sais très bien ce que tu fais !

Furax, elle s'essuya le rebord des lèvres et le menton à l'aide de la manche de sa veste et se retourna vers lui. Cette fois, ce ne fut pas le reste de rhum, de vodka et de jus qu'elle recracha, mais tout ce qu'elle avait accumulé depuis des jours.

— Vraiment ?

Ne fait pas ça ! se supplia-t-elle à elle-même.

— Je suis enceinte, figure-toi !

Les traits de colères qui ornaient le visage de Brendon laissèrent place à de l'incompréhension et de la peur. Il manqua de trébucher en faisant un pas de côté. En face de cette nouvelle, il se retrouva dans l'impossibilité de rester immobile.

— Quoi ? lança-t-il, interloqué.

— Je suis enceinte.

Même si elle venait de lui répéter l'information maudite, Brendon ne réussit pas à faire le lien. Du moins, pas réellement.

— Comment ça, enceinte ?

— Coup donc ! s'écria Lily, à bout de nerfs. Est-ce que c'est moi qui suis défoncée ou c'est toi ? Est-ce que je dois te faire un dessin ?

— Est-ce que tu peux te calmer, s'il te plait ? J'essaie juste de digérer l'info !

La jeune fille croisa les bras afin de garder sa veste fermée et elle se contenta de le fixer tandis qu'il tournait en rond afin de se détendre. Puis il s'arrêta net.

— Depuis quand es-tu au courant ?

— Je l'ai su ce matin en faisant un test.

— Et l'idée de m'en parler ne t'a pas traversé l'esprit ? demanda-t-il, choqué. Tu aurais dû m'appeler !

Soudain, il se remit à marcher en cercle, trop sous le choc pour se résigner à faire du surplace. Son corps ne lui permettait pas, surtout avec tout ce qu'il avait dû encaisser ce soir-là. Et avant-même que son cerveau ne traite sa prochaine phrase, sa bouche s'agita :

— Tu as bu.

Évidemment, il ne s'agissait pas d'une question.

— Tu as bu en sachant ça ? répéta-t-il, plus offusqué

Lily resta silencieuse. Cette fois, c'était rhétorique.

Brendon péta les plombs.

— Bordel, Lily ! Qu'est-ce qui ne va pas chez toi ?! Déjà, je ne comprends même pas comment c'est possible vu ton état de santé, alors je n'imagine pas si tu te tapes une énorme cuite ! Qu'est-ce qui t'a pris de faire ça ?!

— Je ne me sentais pas bien et...

— Et alors ?! beugla-t-il sans aucun scrupule dorénavant. Tu savais ! Tu savais et tu as quand même décidé de ne pas m'en parler, de te soûler la gueule et de te ficher de ta propre progéniture ! Parce que tu es égoïste Lily et ça, c'est bien un truc qui ne changera jamais ! (Il la pointa d'un doigt tremblant.) Si ce bébé-là ne peut rien pour toi, alors je ne peux rien pour toi non plus, maintenant.

Lily ne trouva plus rien à dire. Ce qui était bien normal après un tel discours. Son bec s'était retrouvé bien cloué. Soudain, perçant le silence, la voiture de Mitch fit irruption dans le parking et le bruit du klaxon résonna, leur faisant comprendre qu'il fallait qu'ils se dépêchent.

Brendon se rua jusqu'au quatre-quatre et se dépêcha d'y monter, en colère. Il n'avait qu'à s'écouter et fermer la portière avant que Lily ne puisse entrer afin de la laisser pourrir là, mais il se résigna et la laissa grimper dans la jeep. Il venait de sacrifier son propre bien-être pour le sien. Encore une fois.