Fly me to the Moon - Tome 1

Chapitre 37 - Laely

— Donc reprenons...

Alors que je suis occupée à préparer de nouvelles barres de céréales dans la cuisine, Joannie à mes côtés a décidé de remplir un tableau avec les indices que l'on a sur Monsieur Ronchon jusqu'à présent.
— Il est en première année puisqu'il était dans l'amphi avec toi l'autre jour. On sait qu'il écrit de la poésie et joue de la guitare...

Elle pianote joyeusement sur sa scroll'tab et poursuit:
— La veste que tu as récupéré donne une idée de sa carrure: ce n'est pas un petit gringalet!
— et il a un parfum qui sent trop bon! j'ajoute alors qu'elle continue de noter.
— Et puis, on sait qu'il fume des joints...
Elle fronce les sourcils en signe de désapprobation...
— on sait qu'il mange tes barres de céréales et te suit partout...
— c'est léger tout ça quand même!
— mouais. ça pourrait être n'importe qui..

Elle relève le museau, pensive.
— Il faudrait que tu lui poses des questions affirme Jojo.
— je veux bien mais quoi?
— laisse-moi réfléchir...
et alors que j'enfourne ma nouvelle production, elle me fait sursauter:
— je sais !
— q-quoi?
— Tu lui prépares à manger. Très bien. Mais, si ça s'trouve il a des allergies et tu le sais pas! Demande-lui s'il y a des ingrédients qu'il ne faut pas utiliser. Et comme ça moi ensuite je pourrais m'arranger pour aller faire un tour dans le fichier médical.
— Jojo ! Mais c'est interdit!
— On s'en fout, Allez, vas-y demande lui!

Et une fois de plus je me plie à la lubie de ma folle dingue de meilleure amie:
— "Monsieur Ronchon, je suis en train de préparer ta prochaine livraison de barres de céréales et je voulais savoir si tu as des allergies. Ça serait dommage de finir à l'hôpital."
— voilà, satisfaite?
Joannie me fait un gros sourire et moi je ne peux rien lui refuser.

Il n'aura pas fallu plus d'une minute pour qu'on ait la réponse à la question: il n'a pas d'allergie mais n'aime pas la noix de coco.
— et ben voilà t'auras pas besoin de hacker le serveur du centre!
— N'empêche qu'on a quand même une info importante!
Et je la vois pianoter à nouveau sur sa scroll'tab.
— monsieur ronchon n'aime pas la noix de coco...
— ça me fait de belles jambes!

C'est là que débarquent Les mull-ang. Ça faisait longtemps!

— mesdemoiselles...
— Tu peux y aller Muller, je suis de bonne humeur, tes piques ne serviront à rien ce soir...
Nos deux colocataires se regardent puis reviennent placer leur attention sur nous.
— j'en suis fort aise!
— On voulait juste savoir si vous alliez à la soirée organisée par Aldrin sur la plage, demande Muller.
— Ah c'est lui l'organisateur...je me dis à moi même.
— hein? me questionne Jojo.
— non, rien..
— donc vous y allez? reprend La blonde.
— oui Tony va d'ailleurs passer me prendre dans pas longtemps...
— Jackson? s'intéresse la brune.
— ouais...
— beau gosse! commente la brune.
— pas touche! feule ma Jojo entre ses dents.
— oh ça va... reprend la blonde.
— j'vous ai à l'œil! poursuit Jojo suspicieuse
— ah mais c'est sérieux entre vous? demandé-je
— vous me saoulez!
Et elle se lève et part dans sa chambre en claquant la porte.
— on dirait qu'on a touché la corde sensible...

Je rigole dans ma moustache.
— et toi t'iras Armstrong? reprend la blonde.
Je soupire lourdement....
— Kimbra, Kimbra, Kimbra... combien de fois il va falloir te le dire...
Elle lève les yeux au ciel en penchant la tête en arrière car elle sait déjà ce que je vais lui dire.
— Mon prénom c'est Laely, ok? Même Kane l'a compris! Tu peux bien y arriver aussi non?
— En parlant de Kane, il parait qu'il est infernal comme capitaine d'équipe? demande Suang (oui je n'applique pas les principes que je leur impose, et alors?)
— ah ça... je vais pas démentir!
— Bon en attendant, ton capitaine organise une soirée ce soir, tu vas quand même pas refuser l'invitation? renchérit Muller.
Avec nonchalance je me dirige vers ma chambre:
— on verra... on verra...

°°°°Kane°°°°

— hey salut...
— salut.
Comme je lui ai promis, je passe rendre visite à Cam à l'infirmerie. Elle a besoin de compagnie, la solitude de l'isolement lui pèse vraiment.
La pauvre a une tête horrible: le teint émacié avec de profonds cernes, les lèvres gercées, et ces yeux... mon dieu, elle a le regard hagard, c'est effrayant mais je tente de garder une mine plutôt réjouie. Elle a besoin d'un peu de légèreté.
— Alors?
— ca va mieux..
— tes résultats sont meilleurs, tes constantes sont remontées
Elle tousse toujours autant par contre. Ça l'épuise.
— et toi, qu'est-ce que tu raconte? Dis-moi des trucs funs parce que là j'me fais chier!
— depuis le temps que t'es là tu m'étonnes!
malgré la paroi vitrée qui nous sépare je vois bien qu'elle a quand même au fond du regard la petite étincelle que je lui connais si bien.
— tu as quoi comme soirées à me raconter?
— après la soirée au bar qui a fini plus au moins en orgie dont je t'ai parlé, il n'y a pas eu d'autres fiesta mémorable... Pas encore...
— ça veut dire quoi?

Le tuyau d'oxygène qui passe sous son nez et dans ses narines la gêne visiblement, mais là, elle a besoin de penser à autre chose.
— Ce soir j'ai réuni tout le monde sur la plage pour la beach party d'octobre.
— c'est déjà le jour? merde le temps file je m'en rends pas compte depuis que je suis ici... Les jours se ressemblent tous...
Une nouvelle quinte de toux l'interrompt.
— alors franchement c'est bien pour ça que j'ai besoin que tu me racontes des trucs cools et légers.

Ma pote me fait son petit sourire plein de sous-entendus.
— t'en es où avec Stacy?
— j'ai rompu avec elle tu sais bien ...
— t'as pas remis le couvert?
— Cam...
— t'as ton petit regard de beau gosse...
Elle pointe son index vers moi. C'est un index moqueur.
— celui que t'as quand t'as une nana dans le viseur...
Et moi j'ai le sourire du mec qui s'avoue coupable.
— je le savais!
Une quinte de toux vient la secouer, mais elle sourit d'avoir trouvé un os à ronger.
— c'est qui?
— c'est compliqué...
— j'ai tout mon temps...
Elle fait un grand geste de la main pour montrer qu'elle n'a nulle part où aller.
— Notre cachette a été découverte.
— merde ! par qui?
— Armstrong
— nan...
— elle a lu mes textes, mais elle ne sait pas que c'est moi.
— sans déconner, comment c'est possible ?
— on ne s'y est jamais croisé, on ne se laisse que des mots écrits.

Puis je lui raconte dans le détail ce qui s'est passé ces derniers temps. J'ai besoin de vider mon sac et elle a besoin de se changer les idées. Tout le monde est gagnant.
— Et ça me rend marteau...
Je finis mon récit avec la mine abattue du mec qui sait plus comment faire.
— t'es mordu mon gars!
Le constat est affligeant.
— je sais...
— faut que tu lui dises que c'est toi le mec du toit.
— je sais ...mais comment faire?

Elle me dévisage comme si j'étais un débile profond (sans doute que je le suis un peu à cet instant là).
— Ben par écrit bien sûr!
Voyant que je moufte pas, elle enchaîne:
— T'as trois options mon pote: soit tu lui envoie un message avec le nom de "monsieur ronchon" et d'ailleurs, elle t'as bien cerné sur ce coup...
— ça va...
— soit tu lui laisses un mot avec les autres dans le carnet...
— mouais...
— soit tu le laisse ailleurs où tu sais qu'elle le trouvera...
— genre?
— j'sais pas, moi! dans un bouquin, sous sa porte, ou dans son string...démerde toi mec!
Elle ponctue sa phrase par un éclat de rire bruyant.
— oh ça va, calme toi ça va te faire tousser!
et comme prévu, elle finit par avoir une quinte de toux...
— tu vois...
— c'est bon, ça va...

Alors qu'elle boit une gorgée d'eau et essuie les larmes qui perlent au coin de ses yeux, elle ajoute:
— et t'as plutôt intérêt à saisir l'occasion de la beach party de ce soir si tu veux mon avis...
— t'as pas tort...
— évidemment...
— faut que je réfléchisse à tout ça, mais ça m'a fait du bien d'avoir ton avis, car ça tourne en boucle dans ma tête depuis des jours c'est l'enfer!
— et t'as conscience qu'il ne pourra rien se passer sur du long terme entre vous, pas vrai?
bien sûr que je le sais!

— Bon allez, file. Et tu viendras me raconter comment ça s'est fini surtout!

Je finis par me lever pour prendre congé de mon amie, et elle ajoute:
— et oublie pas ta guitare... les nanas adooooorent les beau-gosses qui jouent de la gratte au coin du feu le soir sur la plage!

Je lève le pouce. Une fois encore elle a raison.
Décidément j'ai bien fait de venir la voir pour lui parler de tout ça.

J'aurais même dû le faire plus tôt!