Chapitre 39 - Kane

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Sept minutes seul avec ma poison Lyly?

Mes prières ont été entendues?

Il y a donc quelqu'un là-haut?

— Bon que ce soit bien clair, je n'ai pas l'intention de faire autre chose que rester assise là, sans un mot, jusqu'à ce qu'on revienne nous chercher!
heu?!...


La porte vient de se refermer, on est dans le noir le plus complet et je n'ai qu'une idée approximative de là où elle se trouve par rapport à moi. Sauf que je l'entends s'éloigner en maugréant un truc incompréhensible. Dès lors, je ne suis plus en mesure de nous situer l'un et l'autre.
— ça risque d'être long...
Il faut que je la fasse parler au moins pour pouvoir la situer.
— en même temps c'est pas comme si on avait des choses à se dire...
Ah, c'est à ma droite...

Avec précaution, comme un con, les mains en avant pour éviter de me prendre un mur dans la poire, j'avance pas après pas dans sa direction.
— peut-être bien que si..
— mais bien sûr...
— on a peut-être plus de points communs que ce que tu t'imagines...
— c'est ça... Bougonne-t-elle.
Environ deux mètres plus loin, mes mains trouvent un mur, et il me semble que sa voix est toute proche.
— en tout cas je sais qui est "ton mec"...
Elle ne répond pas mais j'entends sa respiration un peu plus bas. Elle doit être assise contre le mur.
— Je sais comment vous vous êtes rencontrés...
— Et comment tu sais ça?
Le ton suspicieux dans sa voix me fait sourire, et heureusement qu'il fait nuit noire à cet instant.
— Je vais souvent sur le toit de la bibliothèque avec mon amie.
— Ton ami? sur le toit?
— Oui c'est notre QG.
— Oh...

Je l'ai retrouvée, je viens m'installer près d'elle, souriant de plus belle dans le noir.
— C'est pour ça que je t'ai vu manger une de mes barres de céréales!
"perspicace"
— Ouais, elles sont très bonnes d'ailleurs, merci...
— De rien..
Il y a un petit silence qu'elle comble par:
— Comment il s'appelle?
— Qui?
— Ton ami....
Elle ne sait pas que je parlais de Cam, que c'est amiE et pas amI... merde, qu'est-ce que je réponds ?
— Il ne veut pas le dire...
Forcément, elle se marre.
— Ouais en fait t'en sais rien! T'essayes de m'arnaquer Kane...t'es rien qu'un arnaqueur!

Je la sens qui se relève et d'un bond je me mets debout aussi, sentant qu'elle est en train de monter dans les tours et que ça pourrait vite partir en cacahuète une fois de plus.
— mais non...
— alors qu'est-ce que tu connais d'autre, hein?
Elle se tourne vers moi, et même dans l'obscurité je sens ses prunelles de feu braquées sur moi.
— qu'est-ce qu'il t'a raconté, ton grand ami, hein? Qu'est ce que tu sais sur lui et moi, alors?
— je sais que...
Elle s'approche de plus en plus et je sens la chaleur de son corps contre ma peau, son souffle sur mon torse et l'odeur de son parfum qui chatouille mes narines...
— tu es sa muse.
— n'importe quoi... t'es vraiment qu'un vil menteur Aldrin!
Outch, le nom de famille venant d'elle, c'est dur.
— mais non c'est vrai.... tu l'inspires!
Cette fois je me prends un coup de poing sur le torse.
— c'est quoi ton cirque là? qu'est-ce que tu inventes encore?
Un deuxième coup tombe. Elle est à fleur de peau et tout ce que je peux dire sera retourné contre moi.
— tu dis ça pour te moquer c'est ça?
— mais pas du tout!
— menteur !

Cette fois, j'arrive à intercepter son petit poing qui vient de nouveau frapper mon torse.
— Mais pourquoi je te mentirais Laely?
— parce comme je te l'ai déjà dit, je sais que tu me déteste depuis le début! T'as toujours été là, à me mettre hors de moi comme si ça te faisait marrer, comme si t'avais que cet objectif!
— mais pas du tout, je te dis!
Alors que j'ai gardé son poing dans ma main, je sens cette fois que je me prends un coup de pied dans le tibia.
— Aïe ! mais t'es pas bien? Pourquoi tu me frappes?
— Si je le fais pas en premier, c'est toi qui t'en prends à moi!
— mais pas du tout, enfin!
Ma voix déraille un peu.
— bien sûr que si!

Il y a des tremolos dans sa voix, je sens qu'elle va se mettre à pleurer, et ça, clairement je ne vais pas supporter.
— Hey, Lyly...
— Ne m'appelle pas Lyly ! Ne m'appelle PLUS Lyly!
La crise de nerf qu'elle avait eu après le départ de Flanders avait commencé de la même façon. Il faut que je la calme de la même façon.
— doucement... hey ... viens par là... calme-toi.

Lentement je l'attire à moi pour finir par la prendre dans mes bras comme ce samedi dans les Everglades où les choses ont basculé.

Je viens poser ses mains sur mon torse et je l'enlace avec précaution, on sait jamais, elle pourrait se rebeller à nouveau.
— Je ne suis pas ton ennemi Laely...
— j'en suis pas si sûre...
Je plonge le nez dans des cheveux pour poser un bisou sur le haut de sa tête, et je confirme:
— crois-moi, je ne le suis pas.

Un instant je ferme les yeux pour profiter de ce moment dont j'ai rêvé depuis des jours: je tiens ce petit bout de femme dans mes bras, cette nana qui me rend zinzin, cette gonzesse qui me tient au creux de sa main et me fait tourner bourrique d'un seul sourire.

Je sens que ses larmes se calment et au bout de quelques instants elle reprend:
— Si ce que tu dis est vrai, qu'est-ce que tu sais d'autre sur lui et moi?
— Je sais...
"qu'il est dingue de toi comme t'as pas idée?" ... non .. trop direct...
— qu'il t'as regardé dormir toute la nuit l'autre fois et qu'il te trouve merveilleusement belle....
Je sens son sourire contre mon torse.
— qu'il est inspiré par toi .... Ses textes ne parlent que de toi depuis qu'il te connait.
Ma Poison Lyly s'éloigne un peu, mais moi je ne veux pas rompre ce contact. Non!
— Il a adoré te voir rougir au milieu de l'amphi quand il t'as dit qu'il ne voyait que toi...
Je veux voir ses iris hypnotiques, j'ai besoin de m'y noyer maintenant...
— il t'as trouvé divine en maillot de bain à la piscine... tu es une déesse Laely...
Je veux ses lèvres. J'en meurs!
— il rêve de t'embrasser depuis des semaines, il ne rêve que de toi, tu es sa force et sa faiblesse à la fois.
— Kane...
"laisse-moi t'embrasser"
— c'est pas .... faut pas faire ça...

Je sais que je ne suis qu'à un souffle de sa bouche, malgré le noir ambiant, je le sens.
— c'est ton ami.... Il ne faut pas me parler comme ça!
— tu n'as pas compris... c'est..
— C'EST FINIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIII !!!!
La porte s'ouvre en grand sur le prince de la loose, et en une fraction de seconde, ma poison Lyly s'éloigne de moi, me laissant un trou béant dans le bide.
— Ah, c'est pas trop tôt!

Comme une tornade, elle sort de la cabine et dévale la passerelle qui la ramène sur le sable parmi les autres.
— Alors Cap'tain?... tu as enfin scoré ?
Je toise de la grand black méchamment:
— Mais ta gueule M'Gondo... sérieux, ferme-la!

J'ai besoin de sortir prendre l'air, j'étouffe et j'ai froid à la fois...

J'étais aux portes du paradis il y a cinq secondes et me voilà de retour au purgatoire! ô Joie!

Fly me to the Moon - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant