9 - Amaël.

158 14 29
                                    

Mardi 11 Juillet 2023.

Nous sommes mardi, et par conséquent, je revois Zaven. Chez lui, parce qu'il pleut, et ça me stresse énormément. Je ne sais pas si je dois sonner, toquer, s'il sera seul chez lui ou pas...Je l'avoue, ça m'inquiète. Heureusement, il m'a formellement demandé de prendre Abby avec moi.

Quelqu'un qui accepte que je trimballe ma chienne partout, c'est rare. Même quand Abby n'était pas malade, je l'emmenais déjà avec moi où que j'aille. En première, une fille de ma classe semblait intéressée par moi, et comme je n'avais pas d'amis, je traînais avec elle. Jusqu'au jour où elle m'avait invitée à sortir dehors, dans un parc non loin du lycée. J'étais arrivé avec Abby, et la fille m'avait dévisagé avant de dire que "c'est nul, on ne pourra pas aller au cinéma ni au café, je rentre chez moi". Et elle était partie.

Heureusement, Zaven n'est pas du tout comme ça. Et ça me rassure beaucoup de voir qu'il y a des gens capables d'accepter ça.

Abby sur les talons, je sors du gîte et je ferme la porte à clé. Mes parents ne sont pas là de la semaine, ils sont partis faire une randonnée et d'autres trucs à une cinquantaine de kilomètres d'ici, ils me laissent donc seul au gîte.

Je traverse la rue pour rejoindre celle où vit Zaven, à petits pas pour ne pas fatiguer ma chienne. Arrivé devant sa maison, mon estomac se tord de stress, je m'immobilise devant la porte en fixant cette dernière du regard.

Moi : Je suis devant la porte.

Zaven le plus beau 👹 : Entre !!

Moi qui espérait qu'il vienne m'ouvrir...

J'appuie ma main sur la poignée de la porte et entre timidement.

Enlève tes chaussures s'il te plaît ! crie Zaven depuis une pièce, je suppose le salon.

Je m'exécute et essuie soigneusement les pattes d'Abby sur le paillasson. Je m'avance lentement dans l'entrée, ne sachant pas où aller.

Dans la cuisine, m'éclaire Zaven.

Je me trompais, visiblement. Je le rejoins dans la cuisine, où il est en train de touiller quelque chose dans une casserole posée sur la cuisinière.

Désolé, il faut que je mélange tout le temps sinon ça crame...heureusement que tu as envoyé un message pour me prévenir que tu étais là ! Assieds-toi, je t'en prie. Coucou Abby, je te ferai un bisou après, là je ne peux pas.

Il parle beaucoup. Mais ça ne me dérange pas, au contraire : j'aime bien écouter les gens parler. Ceux que j'apprécie.

Ma chienne s'assoit près de lui et penche la tête sur le côté quand il parle, me faisant lâcher un petit rire. Elle est si attentive, c'est mignon. Zaven lui envoie un bisou en riant, je cligne des yeux et réalise que je le fixe peut-être un peu trop.

Je fais du pudding à la pistache, si tu te poses la question.

D'accord.

Mais dès que j'ai fini, on peut faire autre chose ! Tu veux faire quoi ?

Je grimace, osant enfin m'asseoir sur une chaise.

Je ne sais pas, avoué-je.

Il coupe le feu sous sa casserole et verse sa préparation dans un grand saladier. Une fois ceci terminé, il s'accroupit pour dire bonjour à ma chienne avec enthousiasme. Il s'approche ensuite de moi, pour m'embrasser la joue ?!

Je le dévisage comme si un extraterrestre se tenait devant moi. C'est quoi son problème ?

Pardon, s'excuse-t-il immédiatement. J'étais ami principalement avec des filles, en Angleterre, et j'ai pris l'habitude de leur dire bonjour comme ça. Excuse-moi, je ne voulais vraiment pas te mettre mal à l'aise, c'était un réflexe idiot.

J'ai encore la sensation de ses lèvres sur ma joue, et je me bloque sur place. J'entrouvre la bouche pour parler, mais aucun mot n'en sort, je commence à paniquer. Je prends une grande inspiration, priant pour qu'il arrête de me regarder comme ça.

Amaël, je suis vraiment, vraiment désolé. Tu n'es pas tactile, moi je le suis beaucoup, et j'oublie tout le temps que les gens ne sont pas comme moi.

C'est pas grave, réussis-je enfin à articuler, avec l'impression d'être à bout de souffle.

Je me maudis d'avoir une réaction pareille. C'était juste un baiser vraiment innocent sur la joue pour me dire bonjour, pourquoi est-ce que mon inconscient en fait toute une montagne, et pourquoi est-ce que je suis mon inconscient comme ça ?

Tu es sûr que tu ne m'en veux pas ? insiste-t-il avant de totalement changer l'expression de son visage. Oh, je t'en supplie Amaël, ne m'en veux pas ! commence-t-il à dire en riant.

Je ris à mon tour, ce qui semble le rassurer au plus haut point.

Viens, on va dans ma chambre, tu pourras poser ton sac. Il y a quoi dedans ? T'as besoin d'un sac aussi lourd pour venir chez moi ?

Matériel de dessin, médicaments pour Abby et sa laisse, énuméré-je.

Tout ça ! Tu sais dessiner des gens, ou seulement des paysages ?

Il semble de très bonne humeur aujourd'hui.

Je peux dessiner tout, tant que je m'entraîne.

Trop bien ! Je t'envie, c'est trop cool de savoir dessiner. Je t'ai dit que je faisais de la danse ?

De la danse ? Non, il ne m'a pas parlé de ça. Mais il se met à danser devant moi, je ne suis pas sûr que mon cœur tienne le choc. Pour toute réponse, je secoue la tête.

Nous allons donc dans sa chambre, qui est vraiment grande, avec une grande baie vitrée. Ce mec vit dans un rêve, ce n'est pas possible autrement. Ses rideaux sont de sa couleur préférée, donc verts, et c'est plutôt joli. Le sol est un parquet lisse, assez foncé, et les murs sont beiges.

Tu as oublié de m'envoyer ta musique, m'accuse-t-il en plantant un doigt dans mon épaule. Assieds-toi, tu peux faire monter Abby sur mon lit, je changerai mes draps ce soir.

J'attrape délicatement ma chienne et la pose sur le lit avant de m'asseoir.

Tu veux le wifi ?

Enfin, il me le propose. Je ne lui aurais jamais demandé moi-même. J'acquiesce, puis je vais sur YouTube après m'être connecté au wifi pour chercher Happy death day que je mets en route, je lui passe mon téléphone pour qu'il puisse regarder le M/V.

J'aime vraiment bien, conclut-il à la fin de la musique en me rendant mon téléphone.

Je le vois quitter YouTube et je me rapproche de lui pour essayer de récupérer mon téléphone. Il m'en empêche, se dépêchant d'aller dans les messages, chercher son propre contact et s'envoyer la musique. Ce mec est fou.

Il me rend ensuite mon portable avec un sourire fier, ce qui me rend totalement incapable de lui en vouloir d'avoir pris ses libertés avec mon téléphone. Mais quand même, je n'apprécie pas trop ça, ma vie privée est partout dans cet objet. Toutes mes angoisses listées une à une dans mes notes, avec des pseudo solutions inscrites en dessous, par exemple. 

Last NightOù les histoires vivent. Découvrez maintenant