18 - Amaël.

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Lundi 24 Juillet 2023.

Zaven a tenu sa promesse. Presque à chaque fois que je me réveillais durant la nuit, il était en train de caresser Abby pour vérifier les deux choses que je lui avais dites, ses battements de cœur et sa respiration. Je ne me suis pas redressé une seule fois quand il était réveillé, choisissant de lui faire confiance.

Et maintenant, à neuf heures du matin, Abby va très bien. Je ne l'ai pas surveillée moi-même toute la nuit, mais elle va bien. Et ça me rassure.

Et j'ai vraiment mieux dormi. J'ai toujours des cernes et une tête de mec fatigué, mais je le suis beaucoup moins, fatigué. Je sais que ça ne va pas durer et que mon épuisement recommencera forcément, mais je peux au moins profiter d'une journée sans ça.

Tu veux un thé vert à la menthe, comme la dernière fois au café ?

Le café, quel mauvais souvenir, à cause du serveur.

Oui, s'il te plaît.

Je m'assois en face de lui, autour du plan de travail dans la cuisine, une fois mon thé et son chocolat chaud préparés. Lorsque nous nous sommes levés, il y avait un mot sur ce même plan de travail, nous indiquant que mes parents, la mère et le beau-père de Zaven ainsi que Zéphyr étaient partis tous ensemble dans un parc ou quelque chose comme ça, et ce pour toute la journée.

En conclusion, je suis seul avec Zaven toute la journée, car il m'a expressément demandé de passer la journée avec lui.

Je passe la journée entière seul avec le garçon dont je suis déjà en train de tomber amoureux alors que je le connais depuis moins d'un mois et que je repars à la fin des vacances. Je veux me pendre.

T'as fini le lycée aussi, tu vas où après ? lâché-je brusquement.

Je ne pose visiblement pas assez souvent de vraies questions, il manque de faire tomber sa tasse de chocolat chaud.

Si tout se passe bien, à la New school, à d-.

Mon coeur tombe au fond de mon estomac et je le coupe :

A deux heures trente d'ici, et deux heures trente de chez moi.

Je le sais, parce que ma future université est exactement entre ici et chez moi. Pile au milieu.

C'est là que tu vas ? comprend-t-il.

Ouais.

Il reste immobile un très court moment, puis un grand sourire prend place sur son visage.

J'espère vraiment qu'ils m'accepteront, alors, ça me fera une raison de plus d'y aller. Je suis en attente partout vu que je reviens à peine d'Angleterre, explique-t-il ensuite.

S'il est pris à la New school, ça me donne une chance de plus. Tout n'est peut-être pas perdu, finalement. Moi et mon charme légendaire - si légendaire qu'il n'existe pas, en fait - commençons à avoir de l'espoir.

Je bois une gorgée de mon thé, silencieux. Je refoule rapidement mon espoir comme j'ai refoulé la question à propos du câlin hier, pour la même raison : j'ai trop peur d'être déçu.

J'ai les résultats la dernière semaine d'août, parce qu'ils sont lents.

Il finit son chocolat chaud et pose la tasse sur le plan de travail en annonçant qu'il a la flemme de faire la vaisselle. Je pose ma tasse aussi, également vide.

Les cheveux de Zaven ont l'air tellement doux, j'ai envie d'accrocher mes doigts dedans.

Oula.

Arrêtons de le regarder, je crois que ça vaut mieux.

Et je vais tout de suite arrêter de parler comme si j'étais plusieurs dans ma tête. Ou comme si nous étions plusieurs dans ma tête ? Je ne suis pas trop sûr de la formulation, je l'avoue. Dormir ne m'a visiblement pas trop réussi, je divague un peu. Mais seulement un peu.

C'est à cause de Zaven ça, il me retourne complètement le cerveau.

Si seulement ce n'était pas que le cerveau.

AU SECOURS JE VEUX ARRÊTER DE RÉFLÉCHIR PAR PITIÉ.

Tu veux encore du thé ?

Oui ! lâché-je précipitamment.

Au secours, qu'est-ce qui m'arrive.

Il ne s'en formalise pas, de toute évidence, et il recommence à parler.

Donc, pour mercredi...Il faudrait que tu viennes un peu avant Loukas et Eléonore, je vais avoir besoin de ton aide pour installer ma chambre, puisque vous restez tous dormir.

À quelle heure ? demandé-je, ayant enfin fait fuir mes pensées.

Quinze heures, ça te va ?

Je hoche la tête. J'aimerais bien un câlin comme hier, mais comme je ne sais toujours pas pourquoi j'y ai eu droit, je n'oserai jamais lui en faire un moi-même. Je suppose que je vais devoir attendre qu'il ressente l'envie de me serrer dans ses bras...

C'est si compliqué de tomber amoureux de quelqu'un.

Je me mure dans le silence en caressant la tête d'Abby, pensif. Zaven se lève pour aller ouvrir le réfrigérateur, et il s'exclame :

Je sais ce que j'avais oublié, je dois faire les courses aujourd'hui ! Ça te dérange de venir avec moi ?

Courses. Magasin. Bruit. Beaucoup de gens. Beaucoup de bruit.

Non, ça ne me dérange pas.

Menteur.

Je vais le coller comme un chiot apeuré colle sa mère. Peut-être parce que je suis comme un chiot apeuré à l'idée de découvrir le monde extérieur. A dix-huit ans, je suis incapable d'aller dans un magasin tout seul.

Et dire que je vais vivre seul en septembre...Je ne vais pas survivre très longtemps, mes parents sont inconscients de me laisser avoir un appartement. Je ne vais manger que quand je rentrerai à la maison le week-end et je ferai un stock d'ice tea à chaque fin de semaine.

Tout ça pour dire que je suis trop angoissé pour ce monde.

J'ai peur de la foule, soufflé-je sans réfléchir.

Je n'ai pas peur de la foule. J'en suis littéralement terrifié, mais il n'a pas besoin de savoir ça.

Si tu restes près de moi ça ira ? Je peux même te tenir la main, si tu veux.

Pas besoin d'en arriver là, dis-je prudemment, perdu entre "il flirte avec moi" et "il se moque de moi.

Ça ne me dérangerait pas.

Je crois qu'il flirte avec moi. Et je crois que ça me terrifie. 

Last NightOù les histoires vivent. Découvrez maintenant