Last Night

48 - Zaven.

Mardi 5 Septembre 2023.

Installés tous les cinq dans ma chambre, nous ne parlons pas. Tous les cinq, c'est évidemment Amaël et moi, mais aussi Zéphyr, Eléonore et Loukas. Et c'est le dernier jour de nos vacances que nous allons passer tous ensemble. Demain, Amaël et moi resterons tous les deux pour profiter de notre dernière journée de vacances, ici.

Il part très tôt, jeudi. A six heures du matin, afin d'arriver chez lui au maximum à midi. Il dormira chez lui et ira à l'appartement le lendemain, où je le rejoindrai samedi.

— Je m'ennuie Zaven, se plaint mon petit frère. Comment on dit, en anglais ?

— I'm bored, traduis-je machinalement.

Mon frère essaie plusieurs fois de répéter ce que je viens de dire, sans grand succès. Ce qui m'arrache enfin un sourire, et suite à ça, il ne faut pas très longtemps pour que la vie reprenne le contrôle de ma chambre. Loukas commence à parler, rapidement suivi d'Eléonore, et même mon amoureux rejoint la discussion. Je fais comme eux, mais le cœur n'y est pas trop.

J'ai peur.

Peur de voir l'angoisse sur le visage d'Amaël, demain ou jeudi. Peur de le voir pleurer. Peur de ne pas être capable de le consoler, peur qu'il stresse. Je veux être capable de faire fuir ses angoisses si loin, mais je n'arrive qu'à les éloigner pour un temps. Elles reviennent toujours, et j'ai l'impression d'être inutile, impuissant. J'aimerais tant être en capacité de lui venir complètement en aide. Je suis amoureux de lui, comme un fou, et je sais qu'il m'aime aussi. Mais ce que je sais également, c'est qu'il doute énormément, et que parfois, il oublie à quel point je l'aime et que je suis prêt à tout pour lui.

La journée passe au ralenti. Les heures s'étirent comme des élastiques, sauf que ces élastiques ne reprennent jamais leur forme initiale. Les minutes sont longues, chaque seconde semble en compter vingt de plus. Mais quand le moment de me retrouver seul avec Amaël, parce que Loukas et Eléonore vont bientôt s'en aller, la déception de les voir partir me comprime le cœur.

— J'ai un cadeau pour toi, Amaël. T'as pas intérêt à nous oublier ! menace Eléonore.

Elle fouille dans la grande poche de son pantalon - ce dernier appartenant sûrement à Loukas, vu la taille - et en sort un tout petit paquet cadeau. Un peu hésitant, mon copain déchire l'emballage, ouvre la boîte :

— Qu'est-ce que c'est ? demande-t-il, interloqué.

Il fait tourner le pendentif devant ses yeux, sans comprendre. J'avoue que ce n'est pas évident.

— Si tu scannes le collier avec ton téléphone, ça va capter un QR code. Essaie, s'exclame joyeusement Loukas.

Perplexe, Amaël s'exécute. Debout en plein milieu de ma chambre, il visionne la vidéo qui vient de s'afficher sur l'écran. Il semble ému. Cette vidéo, filmée petit bout par petit bout, est un récapitulatif de cet été : certaines sorties que j'ai faites avec lui, où l'on voit seulement nos ombres et le lieu où nous sommes, nous quatre, par exemple sur la plage, des endroits que nous avons visité, et je sais qu'il y a des petites phrases clairsemées dans la vidéo.

— Je sais que tu n'es pas tactile, mais est-ce que je peux te faire un câlin, pour te dire au revoir ? demande ensuite mon meilleur ami.

Loukas est clairement mon meilleur ami, comme avant.

Mon copain hoche lentement la tête, il rend l'étreinte à Loukas. Eléonore et moi les rejoignons pour un câlin de groupe, j'en profite pour déposer un baiser sur la tempe d'Amaël.