Last Night

21 - Amaël.

Mercredi 26 Juillet 2023.

— Je veux faire un action ou vérité, s'exclame joyeusement Zaven. Avec, hum...trois jokers.

J'ai horreur des actions ou vérité. Les actions proposées sont souvent drôles pour les autres, mais moi, je ne supporte pas de faire quoi que ce soit sous le regard de quelqu'un d'autre...Et les vérités, ce n'est pas toujours mieux.

Amaël, dix-huit ans, incapable de se comporter comme les autres individus du même âge.

— Cinq jokers, plutôt, réclame Eléonore.

— Dans ce cas, un nombre infini de jokers ! s'écrie Loukas.

Moi, je reste silencieux. Je ne vois pas ce que je pourrais ajouter, de toute façon.

Quand il n'y a que Zaven, j'ai moins de difficultés à parler. Mais là, il y a deux personnes de plus que Zaven, alors je n'y arrive presque pas. Je leur réponds avec des monosyllabes quand ils me parlent, mais ça s'arrête là.

Ils sont tous les deux super gentils, pourtant, mais je suis mal à l'aise. Il y a déjà trop de monde pour moi. Je me sentirai moi lorsque nous regarderons un film, après. Je n'aime pas trop les jeux collectifs, de toute façon...

Nous commençons donc à jouer à action ou vérité, avec, heureusement pour moi, un nombre infini de jokers. Le tour de Zaven arrive, il pivote immédiatement vers moi, un grand sourire aux lèvres. Je m'enfonce dans l'oreiller installé derrière moi, appréhensif.

— Alors...t'as de la chance, je vais être super gentil, puisque c'est toi. Action ou vérité ?

Puisque c'est moi ? Qu'est-ce que c'est censé vouloir dire ? J'ai de nouveau l'étrange impression qu'il flirte avec moi, ce que j'ai beaucoup de mal à croire.

— Vérité, dis-je sans hésitation.

J'ai peur de savoir ce qu'est une action gentille, pour lui. Il est tellement tactile. Un câlin est quelque chose d'extraordinaire pour moi, alors que pour lui, c'est un contact totalement banal.

— Raconte ton premier baiser ! s'exclame-t-il avec légèreté.

Ouch. C'est ça qu'il appelle être gentil ?

— Joker.

Je ne vais quand même pas avouer devant trois personnes que je n'ai jamais été suffisamment attrayant pour que quelqu'un ait envie de m'embrasser. Et je ne vais pas avouer non plus que je n'ai jamais eu réellement envie d'embrasser quelqu'un avant de rencontrer Zaven.

Zaven fait la moue, mais finit par hocher la tête, compréhensif.

— A ton tour, du coup !

Je pivote tout naturellement vers lui, n'osant toujours pas parler aux autres. Je sais que je suis ridicule, mais je suis comme ça.

— Action ou vérité ? demandé-je d'une voix qui me paraît tout aussi ridicule.

Je m'y attendais un peu, mais il choisit l'action. Ma main se crispe sur le drap du lit, je réfléchis à toute allure pour trouver ce que je vais lui demander de faire. Une part de moi me souffle d'en profiter, de lui dire de m'embrasser sur la joue, par exemple, mais je sais très bien que je serai incapable de prononcer une chose pareille.

— Je ne sais pas, finis-je par avouer en me mordant la lèvre avec honte.

Je suis vraiment trop nul.

Le regard de Zaven se pose une nouvelle fois sur moi. Si je le pouvais, je m'enfoncerais davantage dans le coussin installé dans mon dos. Je déglutis lourdement, je ne sais même pas ce que je fais là, je gâche totalement son anniversaire.