Chapitre 37

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Je ferme le rideau de fer du bar et me tourne vers ma meilleure amie.

Moi : T'es garée où ?

Suzy : J'ai pas ma voiture, elle est au garage. Je vais prendre le métro.

Moi : À cette heure, t'es pas un peu barge !

Elle me regarde en biais. Ouais, elle est barrée, elle l'a toujours été.

Moi : Ok, oui, tu t'es barge, je sais, mais inconsciente, ça je l'ignorais. Allez viens, je suis garée sur le grand parking à l'angle, je te ramène.

Suzy : Poulette, c'est pas du tout ta route. T'inquiète, ça ne me dérange pas de prendre le métro.

Moi : Moi, ça me dérange que tu le prennes. Viens, il fait froid.

J'attrape son bras et la traine en direction de ma voiture. En fait, je crois que c'est plus moi qui avais besoin de soutien pour aller jusqu'à ma voiture. La dernière fois que je l'ai rejoint de nuit, je me suis faite enlevée... En marchant, je ne peux m'empêcher de scruter les alentours.

Une fois toutes les deux dans la voiture, je verrouille discrètement les portières avant de mettre le contact. Je roule en direction de chez Suzy en musique. L'angoisse monte à nouveau en moi et je cesse de regarder dans mon rétro pour m'assurer que nous ne sommes pas suivis.

Suzy : Mary...

Au son de la voix de ma meilleure amie, je sursaute.

Moi : oui, quoi ?

Suzy : ça va toi ?

Moi : Oui.

Suzy : Ne me prends pas pour une idiote... T'es tendu comme un string. La preuve, t'as fait un bond de dix mettre quand j'ai dit ton prénom.

Moi : C'est juste que j'ai tellement pas l'habitude que tu m'appelles par mon prénom...

Suzy : Bien tenté, mais ça prend pas. Je... on se fait du souci pour toi...

Moi : Qui ça "on" ?

Suzy : Théo, Davis et moi... Théo lui a dit pour les anxiolytiques et Davis me l'a dit...

Moi : Il n'était pas obligé de le crier sur tous les toits...

Suzy : Il avait besoin de se confier à son meilleur pote. Et je pense que toi aussi, tu ferais bien de te confier. Je t'ai vu t'enfiler les deux shots de vodka ce soir... Puis aussi regarder partout autour de nous. Aucun de nous ne peut prétendre savoir ce par quoi tu es passée, mais ne laisse pas cet événement te bouffer.

Je pile et de toute façon la route est déserte.

Moi : Comme tu l'as dit, vous savez pas par quoi je suis passé. Je les ai vus balancer l'homme que j'aime dans un ravin ! J'ai été jeté dans un coffre ! Puis, passé à tabac en me demandant si le prochain coup ne serait pas celui qui me tuerait ! Ensuite, je les ai entendus de la façon dont ils allaient me marquer, me violer et me balancer comme une poubelle chez les Crow !

D'un revers de la main, j'essuie les larmes qui perlent au coin de mes yeux.

Moi : On a dû se barrer. C'était pas des vacances, c'était une fuite. Dès que mon cerveau n'est plus occupé, j'ai des flashs de ce cauchemar. Quand je commençais à me sentir un peu mieux, j'ai servi d'appât pour avoir les deux Colombiens qui avaient réussi à se faire la malle qui nous traquait Théo et moi. Qui en plus savait précisément où nous étions !

Suzy : Quoi, c'est quoi cette histoire ?

Moi : à Atlantic City, Théo m'a emmené dans un resto sous les consignes de Sanders pour que les Colombiens viennent nous attaquer et que l'équipe sur place en finisse avec eux. Sans me le dire bien sûr ! Et tout s'est passé comme prévu puisqu'il y avait une taupe au sein des Crow ! Qui me dit qu'il n'y a plus un seul colombien ou traitre dans le coin ? Qui me dit qu'il n'y aura pas une autre guerre des gangs ? Qui me dit que toi et moi, on va pas être des dommages collatéraux ? J'ai cette boule au plus profond de moi ! Cette peur toujours tapie dans l'ombre ! Mais qu'est-ce que je peux faire ? hein ? Quitter Théo ? Quitter le Minnesota ? Non, parce que je l'aime et que c'est ici que je me sens chez moi ! Alors, je fais avec ! Et puis parfois, j'ai besoin de prendre un verre ou un cachet pour me rassurer et m'apaiser ! C'est si grave que ça ?

L'ombre du corbeauOù les histoires vivent. Découvrez maintenant