Chapitre 31

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Bordel, pourquoi j'ai pas fermé le rideau comme il faut hier ! Le fin rayon de soleil qui passe à travers, me brule les rétines. Du moins pour le peu que j'arrive à ouvrir les yeux. J'ai tout un chantier de construction dans la tête et ma bouche est pâteuse, comme collé par un vieux chewing-gum au gout de bile. Je vais vomir ! Je bondis du lit et me précipite vers la salle bain, manquant de trébucher sur les minis bouteille que je me suis vidée hier.

Je gerbe tripes et boyaux, agenouillée sur les toilettes. Je me redresse et m'approche du lavabo. J'ai même pas une brosse à dents... Je me rince plusieurs fois la bouche et passe de l'eau sur le visage. Il me faut de l'aspirine et vide. Je ne pourrais rien faire avec une migraine pareille. J'attrape le combiné près du lit et appelle la réception.

Réception : Miranda, j'écoute.

Moi : Bonjour, est-ce que vous avez une pharmacie dans l'hôtel. J'aurais un grand besoin d'aspirine.

Réception : Désolé, nous ne proposons pas ce service, mais il y a une pharmacie à l'angle de la rue.

Moi : Merci.

Je raccroche et soupire. Je ne me sens pas d'aller affronter le froid et le soleil tout de suite. Je vais commencer par prendre un bon bain chaud. Sans même allumer la lumière, je me glisse dans l'eau et plonge même la tête sous l'eau. Les événements d'hier me reviennent comme Théo a pu me prendre autant pour une conne. Je pensais pouvoir lui faire confiance, je lui faisais confiance...

Après ce bain qui m'a fait un peu de bien, même si c'est toujours pas ça, je prends mon courage en main et pars m'acheter de l'aspirine. Juste à côté, il y a un petit drugstore où je m'achète une brosse à dents, du dentifrice et un déodorant. De retour dans ma chambre d'hôtel, j'avale deux comprimés et me laisse tomber sur le lit. Pas étonnant que j'ai la gueule de bois si j'en crois les mignonnettes vides par terre. En tant que barmaid, je suis bien placé pour savoir que les mélanges, c'est jamais bon...

Sauf quand ce sont mes délicieux cocktails. Mon boulot et le bar me manquent, entre les travaux et ... notre fuite, ça fait presque un mois que je ne suis pas passé derrière le comptoir. Je crois qu'il est peut-être le temps que je reprenne ma vie comme elle était il y a encore quelques mois. Avant que Théo pousse la porte du bar... De faire comme si notre rencontre n'avait jamais eu lieu... et ce même si mon cœur se brise à cette idée. Puisque j'ai servi d'appât comme une idiote, les colombiens ne sont plus une menace, je peux donc rentrer chez moi.

J'attrape mon portable et le rallume pour consulter les vols en direction du Minnesota. Là, des dizaines de notifications me sautent dessus. Théo m'a appelé plein de fois et envoyé des messages aussi. Je ne veux même pas écouter ou lire ce qu'il a à me dire, je suis encore trop remonté contre lui... Et blessée aussi. Revenons au principal, les moyens de rentrer chez moi.

Après avoir épluché les vols en partance d'Atlantic City, j'en trouve un qui décolle à 17h52 ce soir. C'est parfait, ça me fait arriver 9h demain matin. Je pourrais demander à Suzy de venir me chercher. Je réserve mon billet et grimace. 238 dollars, ça pique, le train aurait coûté moins cher, mais passer plus d'une journée dans un wagon, ne me tente pas du tout.

Je regarde l'heure : 10h49. J'ai plus de sept heures à tuer. Allez au casino alors que je viens de vider mon compte en banque pour mon billet d'avion, non... De toute façon, je n'ai pas la tenue adéquate. Mais il y a un endroit où je ne me ruinerais pas : Steel Pier. J'aurais été à Minneapolis, je serais allée à Valleyfair pour me remonter le moral, alors.

Je rends ma chambre et quitte l'hôtel en fermant bien mon manteau parce que même si le soleil brille, le froid est pinçant. La fête foraine se trouve au bout de la promenade. Ça tombe bien, je voulais m'y balader. J'avance tranquillement au milieu des passants en contemplant les vitrines des magasins, mais je dois avouer que je ne me sens pas totalement sereine. Et si je me faisais à nouveau kidnapper ? Et si on me suivait ? J'accélère un peu le pas pour rejoindre Steel Pier. Là-bas, je serais noyé dans la masse, invisible au milieu des gens.

L'ombre du corbeauOù les histoires vivent. Découvrez maintenant