Un peu avant onze heures, je me rends à la salle de repos histoire de me faire couler un bon café. Je l'ai bien mérité après tout avec toute la peine que je me donne pour satisfaire les exigences de Meryl. Je pense qu'Emma lui correspondrait mieux mais j'aime bien dire Meryl. Ça claque mieux en bouche !
À mi-chemin j'aperçois la pauvre stagiaire en pleurs et commence à faire demi-tour avant de me souvenir que j'ai une conscience et que ce matin j'ai été dans le même état lamentable. Je soupire et m'approche de la pauvre petite créature sans défense.
— Tout va bien Prune ?
Prune. Qui a idée de s'appeler comme un fruit ? Il y a vraiment des parents qui devraient consulter avant d'avoir des enfants ou carrément se faire arrêter. J'ai entendu dire que certains donnaient à leur rejeton le doux prénom de Clitorine. Sérieusement, faites vous soigner pour le bien commun s'il vous plaît.
— Quelque chose ne va pas ? Madame Sinclair t'a dit quelque chose ?
Seuls d'horribles sanglots et un reniflement intempestif me répondent. Je n'aime pas les gens qui pleurent, je ne sais jamais m'y prendre avec eux.
— Tu sais, dans la vie professionnelle il y a des hauts et des bas et si ce qui te mets dans cet état est en rapport avec Madame Sinclair dis-toi que nous passons tous par là. Elle peut paraître féroce mais c'est la meilleure dans son domaine et nous avons énormément de chance d'apprendre à ses côtés.
— C'est vrai ? Me demande-t-elle pleine d'espoirs.
— Oui. Pas plus tard que ce matin j'étais dans le même état que toi. Ce que tu dois te dire c'est qu'il faut rebondir et faire de ton mieux pour l'impressionner par ton travail.
Ce conseil vaut également pour moi, mon dragon j'ai appris à le connaître depuis le temps que je travaille pour lui. Certes, je n'ai pas spécialement réussi à l'apprivoiser, mais on ne peut pas apprivoiser une bête sauvage et imprévisible. Je crois que par la même occasion j'ai réussi à me rebooster pour l'affronter.
— Merci Chloé.
Je lui souris, on sourit rarement à B Design. Pauvre Prune, elle est là pour 1 mois et se fait déjà dévorer toute crue dès son deuxième jour. Il y a bien le service RH au sein de cette superbe structure, mais personne n'a idée d'aller se plaindre auprès d'eux. Non, nous préférons subir dignement notre mauvaise fortune pour continuer à travailler ici.
Tout le monde rêve de travailler pour Meryl et nous à B Design avons le privilège de pouvoir le faire. Jamais nous ne renoncerons de notre plein gré à cette chance inouïe. Et puis, tout le monde dans le milieu sait que Madame Sinclair est un dragon intransigeant. Récupérant enfin mon café j'en bois quelques gorgées, cachée dans la salle de repos.
— Estella ?! Entends-je héler dans tout le bâtiment.
Purée ! Je me suis brûlée avec tout ça. Aucun moment de répit n'est permis apparemment dans cette foutue boîte. Me précipitant à mon bureau, je dépose rapidement ma tasse fumante avant de rejoindre le bureau de mon adorable patronne.
— Estella, faites-moi des photocopies de ces documents, envoyez les moi par mail, vérifiez que je n'ai pas reçu de mails urgents, passez récupérer mes vêtements au pressing, passer récupérer les devis et les plans que nous attendons depuis la semaine dernière directement auprès des prestataires j'en ai besoin pour hier. Oh ! Et commandez-moi un repas au Bô Bun je raffole de leurs nems. Je veux tout ça avant 13 heures. Les mails j'entends et mes vêtements. Et tant que vous y êtes raccompagné monsieur Pomereau nous avons terminé.
— Bien madame, réponds-je sans regarder Derek qui arbore un sourire moqueur à souhait.
Elle se fiche de moi, ce n'est pas possible. Il est 11 heures le Bô Bun doit être bondé de monde à l'heure du déjeuner. Et ma pause déjeuner à moi ? On en parle ?
— Vous serez aimable Estella, me lance ce dernier en se levant.
Derek serre la main de sa cliente par-dessus son bureau avec un sourire charmant. Je n'aime pas beaucoup la façon dans elle le regarde. Elle a l'âge de sa mère nom de dieu...au moins. Un frisson me parcours la colonne vertébrale. Est-ce que Derek aime les cougars c'est une bonne question.
— Je vous laisse voir si cela vaut la peine que j'investisse dans ce secteur Derek.
— Pas de problème, je ferai au plus vite pour revenir vers vous madame Sinclair.
Nous quittons son bureau et j'ai comme un poids imaginaire qui quitte momentanément mes épaules. Cette bonne femme me fout toujours un coup de stress monstrueux lorsque je la vois.
— Alors Estella, et si nous discutions de ce que tu vas faire pour moi pour tous ces petits services rendus ?
— Derek, je n'ai pas le temps comme tu vois j'ai des choses à faire. Et de toute façon il en est hors de question le marché ne tient plus.
Je ne prends même pas la peine de le regarder et m'attèle à vérifier les mails, scanner et photocopier les documents transmis par ma patronne avant de les lui envoyer.
— Comment ça le marché ne tient plus ?
— Tu avais besoin de ces documents pour travailler, c'est pour cela que tu es allé les chercher pas pour me sauver la mise.
— J'y suis tout de même allé Chloé alors je regrette de devoir te dire que tu vas t'y coller.
Je soupire, agacée au possible alors que j'attends que le Bô Bun décroche son téléphone.
— Ok. Tu m'en parleras plus tard.
Enfin, après une petite attente je parviens à avoir quelqu'un au téléphone.
— Bonjour ! Ce serait pour une commande s'il vous plaît.
J'espère qu'il prenne encore les commandes à cette heure. Apparemment l'univers est avec moi aujourd'hui car tel est le cas.
— Deux Bô Bun au poulet avec des nems au poulet pour Chloé merci.
— Très-bien c'est noté d'ici 15-20 minutes.
Ça va, j'ai de la chance. Le pressing est à 20 minutes à pied de B Design, je serai un peu en retard pour récupérer le repas. Attrapant mon sac, je ne réfléchis pas outre mesure et prends le chemin de la sortie.
— Je t'accompagne.
— Tu ne devais pas aller à ton studio photo ?
— J'ai déjà récupérer ce dont j'avais besoin. Ne t'en fais pas pour moi, je viens.
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A Lightning Christmas
RomanceChloé mène une vie banale où jamais rien d'intéressant ne lui arrive. Elle joue les larbins dans le cabinet de ses rêves et n'est pas appréciée à sa juste valeur. De même à la maison, il n'y a personne qui partage sa vie. Elle n'a que ses amis : son...