CHAPITRE 73

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Cette visite de son cousin n'était décidément pas prévue ce soir. Je les observe patiemment, monter sur sa moto et la démarrer pour Derek, et me rejoindre dans la voiture pour Benjamin.

Mon meilleur ami met le contact, monte de quelques décibels le volume du poste de radio et prend la route jusqu'à chez moi.

Pendant quelques mètres nous restons silencieux, mais je sens Benji me lancer quelques regards insistants du coin de l'oeil. Je le connais. Deux. Un.

— Alors ?

Je souris discrètement d'amusement. Le fils bien aimé de Rose a craqué en moins de temps qu'il n'en faut pour dire « Oups ».

— Alors quoi ?

— Ça va toi ? Je t'ai vu tu sais...

Je lève les yeux au ciel en l'écoutant tout tenter pour me faire parler de Derek, de la bimbo peroxydée qui s'est pointée au pique-nique et de ce que j'en ai ressenti. Rien du tout. Son cousin adoré peut bien faire ce qu'il veut, il ne me doit rien et moi non plus d'ailleurs.

— Vu faire quoi ?

— Tout faire pour ignorer Derek toute la journée.

— Et alors ? Il l'a dit, nous ne sommes pas ami lui et moi. Et je te ferais remarquer qu'il n'a pas non plus cherché à parler avec moi. Nous sommes quittes.

— Tu comptes lui reparler un jour ? Parce que je pense que vous devriez vous poser et discuter de tout ce qu'il s'est passé entre vous.

Je ne réponds pas à mon meilleur ami. Il a raison au fond. Ce serait ce qu'il y a de plus mature à faire dans cette situation. La question est : en sommes-nous seulement capables ?

J'ai le sentiment étrange qu'inévitablement nos conversations se terminent de quatre façons possibles. Soit je termine dans un coin à pleurer comme une madeleine.

Soit nous finissons en séance crêpage de chignons à se taper dessus. Soit dépités par des décisions qu'on ne pensait pas prendre.

Ou soit...nous finissons confus, sans que nous ne sachions vraiment s'il en est sorti quelque chose de cette entrevue.

— Je sais... mais c'est difficile quand c'est lui.

— Je sais.

Benji hésite une seconde avant de secouer la tête et de poursuivre dans sa lancée.

— C'est difficile pour lui aussi quand c'est toi.

Je ne réponds rien à ça, mais je regarde longuement mon meilleur ami qui conduit. Ses yeux sont rivés sur la route. Pourquoi j'ai cette foutue envie de sourire maintenant ? Je me mords la lèvre de toutes mes forces pour m'en empêcher.

— Et sinon ? Pas trop en pétard avec l'arrivée surprise de cette fille ?

Le cousin de Derek me surveille du coin de l'œil, attendant ma réaction. Je n'ai plus envie de sourire désormais.

— Pourquoi il m'a dénoncée à mes parents Benji ?

Silence dans la voiture. Puis il soupire d'un bloc et m'adresse un regard lourd de sens.

— Il faut que tu lui demandes Chloé. Ce n'est pas à moi de vous mâcher le travail.

Je déteste lorsque Benji a raison comme en ce moment. Il a une trop bonne analyse des choses à mon goût.

Évidemment que Derek et moi devons parler, mais c'est tellement dur à faire en pratique.

Mon cerveau me dit que je devrais le faire, mais il me joue également le scénario d'un mini moi courant dans la direction opposée à l'objet de mes tourments.

— Et au cas où... il ne lui a pas demandé de venir.

— Tais-toi idiot, soufflé-je. Je n'ai rien demandé.

— Mais je le dis.

J'essaye de lui montrer que je ne suis pas réceptive et que limite je boude, sauf qu'un sourire me barre le visage. Je peux le pincer dans tous les sens et grimacer à loisir pour tenter de le dissimuler, mais il semble incrusté. Comme un Gremlins, impossible de s'en débarrasser.

A Lightning ChristmasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant