Chapitre 44

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Daodu

Je me suis fait refiler cette responsabilité-là y a putain de masse de temps déjà, je me rappelle même plus exactement quand ça a commencé, à quel moment j'ai capté que jouer juste au grand-frère, c'était terminé, maintenant fallait que je sois plus que ça, parce que y avait personne qui aimait assez Lili pour le faire à ma place.

Bats les couilles en réalité, ils savent pas ce qu'ils ont raté, ils savent pas ce qu'ils ratent.

Y a juste des jours où c'est plus compliqué que d'autres, des jours où faut s'opposer à elle bien nettement, et tous ceux qui connaissent Lili savent que c'est pas la chose la plus facile à faire, elle est coriace, têtue, salement bordée, et beaucoup plus forte et cassante que la plupart des gens.

Mais ça m'a jamais fait peur, tant que je m'oppose à elle pour qu'elle aille mieux après. Sa force est réelle, mais quand elle est dans le mal, sa pseudo-force, c'est juste une façade. C'est dans ce genre de situations qu'elle l'utilise à mauvais escient : pour blesser les autres, pas juste pour se défendre. J'ai dit r hier, quand elle m'a raconté ce qu'elle avait sorti à Adeline, sans avoir l'air d'éprouver le moindre regret ou la moindre compassion, et ça c'est juste pas Lili.

Blesser Adeline volontairement, c'est pas Lili dans un état normal. Elle ira sûrement pas le dire en l'état actuel des choses, mais elle a pas besoin de me l'avoir dit noir sur blanc pour que je sache qu'Adeline, c'est sa maman, qu'elle a jamais considéré la nôtre comme telle, elle en avait déjà une, et une incroyable.

J'ai rien dit hier, parce que je savais que peu importe ce que je dirais, elle était trop énervée pour m'écouter sainement, je l'ai juste laissée se vider de son énergie jusqu'à ce qu'elle s'endorme devant les dessins animés, exactement comme quand elle était petite. Puis peut-être que c'est dur à avouer, mais j'ai même plus l'impression d'être la meilleure personne pour m'occuper d'elle, c'est pour ça que j'ai hésité au moins 35 fois déjà à appeler Polak.

J'ai pas besoin de le voir lui pour savoir qu'il est presque sûrement dans le même état que ma soeur actuellement : un semi-fantôme avec le sang prêt à bouillir. Mais c'est toujours en se tapant qu'ils finissent par se calmer, j'ai pas la force de frappe du Polak quand ça concerne ma soeur, elle finira toujours par m'épuiser en premier, et je l'épuise que très peu en retour. Mathieu, c'est une autre histoire. Aussi con qu'il peut être parfois, il arrive toujours à lui sortir ce qui la pousse en-dehors de ses gonds, que ce soit positif ou négatif.

À essayer de régler le problème par moi-même, je risque d'y passer des jours, et pas réussir.

Le truc au fond, c'est que y a pas que Mathieu ou Adeline. Y a Romy, et putain de sa mère celle-ci je l'avais pas vue venir. Je compte pas le nombre de fois où le daron et moi, on s'est ramenés au centre pour chercher Lili, pour au final se retrouver avec Alex en plus sur la banquette arrière parce que ni ses parents, ni sa soeur, n'avaient jugé utile de se pointer. Au fur et à mesure, j'ai fini par croire que Romy n'était qu'un mythe, que peut-être Alex l'avait inventée aussi bien que ma soeur sait s'inventer des bails.

Apparemment nan. Elle existe. Elle a donc bien fait les erreurs que Lili lui reproche. Elle lui a bien caché qui elle était depuis qu'elles se sont rencontrées. Mais je sais que Lili est tout aussi affectée par le fait qu'elle lui ai menti à elle, que par le fait qu'elle ait fait souffrir Alex pendant des années, sans avoir l'air d'en avoir quelque chose à foutre.

Je capte Lili, pas parce que je connaissais Alex, je pourrais jamais prétendre à un centième de ce que ma soeur connaissait de lui, mais parce que j'aurais jamais pu faire à Lili ce que Romy a fait à Alex.

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