Chapitre 67

820 87 3
                                    


Antoine

- Encore une fois ? Antoine sérieusement ? Je regarde le téléphone posé sur mon bureau avec si peu d'intérêt, que je m'en dégoûte moi-même. T'avais promis que cette fois tu serais là pour elle, c'est juste une soirée, et même ça c'est trop compliqué ?

Elle aurait même pas besoin de m'en mettre une si j'étais en face d'elle, j'ai déjà envie de me baffer seul. Elle me demande des explications, mais je suis bien incapable d'en trouver une, de foutre des mots sur le peu de choses que je ressens à chaque fois qu'elle m'engueule. Ça me passe au-dessus, je capte pas pourquoi. Par contre, ce que je capte parfaitement, c'est à quel point je la blesse à chaque fois.

- C'est quoi cette fois ? Elle finit par poser sa question favorite, pour qu'on en arrive à son sujet favori. Il a fait une connerie avec Lili ? Il a un showcase ? Une séance studio que tu ne veux pas rater ?

Je ferme juste les yeux, et je refais pas la même erreur que la dernière fois, aujourd'hui je souffle bruyamment dans ma tête, mais seulement dans ma tête, et pas devant le micro du téléphone. On est partis pour 25 minutes à débattre sur ma relation avec Mathieu. Ou plutôt, c'est un débat qu'à ses yeux à elle, moi j'écoute juste.

------

Est-ce que je suis trop impliqué avec Mathieu ? Oui ou non.

Est-ce que je devrais être aussi heureux d'aller assister aux entraînements de foot d'Enzo ? Oui ou non.

Est-ce que j'aurais dû me retenir de pleurer en voyant Michka marcher pour la première fois ? Oui ou non.

Est-ce que je passe trop de temps avec Mathieu ? Oui ou non.

Est-ce que c'est normal que j'aille manger chez lui le week-end pour le voir lui et sa famille ? Oui ou non.

Est-ce que le sourire que j'affiche à chaque fois qu'il remplit une salle ou qu'il gagne une certification est justifiable ? Oui ou non.

------

La liste n'est pas exhaustive. C'est juste pour donner un aperçu.

- Antoine, elle finit par souffler, et je relève les yeux de mon téléphone, jusqu'à la photo d'elle et de ma fille, posée sur le coin de mon bureau. Je veux juste comprendre, je te jure que j'essaie.

- Comprendre quoi ? Cette fois, je souffle sans m'en cacher. T'essaies de capter un truc qui dure depuis plus de 10 piges, que je me bats pour que t'acceptes depuis plus de 10 piges, et ça fait plus de 10 piges que ça fonctionne pas.

Silence. J'ai fini par arrêter de compter le nombre de disputes qu'on a eues à ce sujet-là, ou la liste des endroits où on s'en est gueulés dessus.

- Je pensais que ça te passerait, son murmure me fait froncer les sourcils, que ça t'amusait au départ de t'occuper de lui, quand il était plus jeune, quand t'étais pas encore papa. Maintenant, ça me fait juste peur, il a 27 ans, et tu te comportes comme si t'étais vraiment le père d'un jeune papa. Par contre, être le père de ta fille de 9 ans, ça ne fonctionne pas.

- Tu pensais que ça me passerait, je répète à voix basse la phrase qu'elle vient de me sortir, que ça m'amusait juste, je retiens pas le rire nerveux qui m'échappe.

- Tu réagis jamais à ce que je dis quand je te parle de moi, ou de ta fille, elle enchaîne, t'as jamais l'air blessé, tu restes juste silencieux. Suffit qu'on parle de Mathieu pour que tu répondes à chacune de mes phrases, que tu t'énerves, qu..., je la laisse pas finir.

Nexus · PLKOù les histoires vivent. Découvrez maintenant