Chapitre 55

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Lili (Dimanche 03 mars 2024)

Y a que ça que j'arrive à remarquer, et ça a juste le don de me saouler juste un petit peu plus. À la manière dont il est assis sur le plan de travail, la nuque nonchalamment appuyée contre le petit placard des assiettes, les jambes qui se balancent dans le vide, on pourrait croire qu'il est tranquille, posé, au calme, satisfait.

Mais Dieu seul sait qu'Alex n'est jamais satisfait de la manière dont je me comporte. Il a pas lâché des yeux l'enceinte qui fait tourner la mixtape de Mathieu depuis que je suis levée, il fixe le machin comme si c'était le diable.

- J'sais pas si j'vais continuer à dire des trucs beaucoup plus longtemps, il lâche, en tournant son attention vers moi. T'écoutes pas.

Ses yeux, sa voix, la manière dont il me regarde, mes poumons se bloquent. Pourquoi ça me frappe toujours sans prévenir ? Même après 4 ans, j'ai toujours pas compris le motif, s'il y en a un. La douleur, quand j'observe son fantôme sous mes yeux, ou celui de Ben, et qu'au lieu de me sentir moins seule, je me rappelle juste que ce n'est qu'un mirage, et qu'ils ne seront plus jamais là réellement, en face de moi, comme ils ont pu l'être avant. Juste dans ma tête.

Et ça aide pas de ne jamais en parler à Mathieu. Mais à aucun moment, vraiment aucun moment, j'ai envie qu'il souffre de ce qu'il pourrait entendre si on venait à avoir ce genre de conversation. Parce qu'Alex, Alex je l'ai aimé, comme j'avais jamais aimé quelqu'un avant lui, et ça s'effacera jamais, je sais même pas si un jour ça cessera d'être une blessure à vif, loin d'être cicatrisée.

Si je n'ai jamais abordé réellement Alex avec Mathieu, y a des raisons. Beaucoup. Je suis pas débile, je sais qu'il a très bien remarqué que, rien que physiquement, il n'a aucune sorte de ressemblance avec Alex. Psychologiquement, très peu aussi. Mais au-delà de ça, la manière que j'avais d'aimer Alex n'a aucun rapport avec l'amour que j'ai pour Mathieu aujourd'hui, notre relation n'avait aucun rapport avec celle que j'aie aujourd'hui.

Il se remettrait en question, mais il n'y a aucune remise en question à opérer.

- T'avais jamais encore pensé à ça devant oim, ça le fait sourire, la tête appuyé contre la porte du placard. Big décla.

- Ta gueule, je grogne, tu me fatigues.

Son rire résonne dans la pièce, et je sais pas, ça attire mon sourire.

- Ça, il se redresse, c'est plus le genre de décla auxquelles je suis habitué. J'peux continuer à te faire chier alors ? Vu qu'askip, tu m'aimes de fou.

- J't'ai passé la bague au doigt ? Je le détaille de haut en bas. Non, je crois pas. Me faire chier : privilège réservé à une unique personne sur cette Terre. Laisse-moi finir la vaisselle.

- J'suis têtu, il descend du plan de travail pour venir s'appuyer contre l'évier, à côté de moi, le regard sur le salon par-dessus le bar, du coup je vais ignorer ce que tu viens de dire. T'es au courant qu'elle me ressemble de fou ?

Je sais que c'est déjà trop tard quand je ferme les yeux par réflexe, même si c'est qu'une seconde : il m'a vue le faire.

- Et alors ? Je dépose le saladier que je viens de laver sur le bord de l'évier. Je compte pas me taper ta soeur à ce que je sache.

- Nan, il hausse les épaules, j'me dis juste que je capte mieux pourquoi tu la regardes jamais dans les yeux. Et peut-être pourquoi t'es aussi trash avec elle alors que j'ai jamais connu plus douce que Mi aussi, c'est un réflexe ou ?

Nexus · PLKOù les histoires vivent. Découvrez maintenant