XXXIV : Irreversible

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Moi : Cette tragédie nous a bouleversé, commençais-je. Chiara en a été profondément traumatisée. Il y'avait eu un genre de fracture entre son père et elle, si je puis dire cela comme ça. Et je ne pouvais pas en vouloir à ma fille. En ce qui me concerne, j'étais totalement dévastée par la paralysie de mon fils. Il ne pouvait plus bouger les membres. Seulement sa tête. À chaque fois que je le regardais, je sentais qu'il ne comprenait pas ce qui lui arrivait et ça me brisait le coeur.

... : Et Lorenzo ? Comment a-t-il réagit à tout cela ?

Moi : Même confronté à la réalité de ses actions et aux conséquences désastreuses de son comportement, il refusait d'y faire face. C'était comme si son esprit ne l'acceptait pas. Les premiers jours, quand on était à l'hôpital il n'est pas venu nous voir. Puis quand on est rentré, il restait dans son coin. On sentait qu'il était gêné. Qu'il avait honte. que ça le perturbait. Je ne lui ai pas adressé la parole pendant des semaines. Je dormais avec Chiara, ou alors dans la chambre d'Enzo. Je lui en voulais énormément. J'étais aussi submergée par la dépression.

... : Qu'en était-il du reste de la famille ?

Moi : Livia avait une grossesse difficile. Elle était toujours malade et ne pouvait plus venir aussi souvent. On se parlait juste par téléphone, et toujours en présence de Lorenzo et quand il n'était pas là on était sûres d'être sur écoute. Je ne pouvais donc rien lui confier. Elle savait dans quel état se trouvait désormais Enzo, mais pas dans les détails. Je m'en voulais beaucoup parce qu'elle m'avait proposé de prendre Enzo avec elle car elle sentait le pire arriver. Si j'avais dis oui, on aurait évité tout cela...

Elle ne dit rien. Au fond, elle savait que j'avais raison.

Moi : Doña Sofia quant à elle n'a pas manqué de me tenir pour responsable alors qu'elle savait pertinemment que son fils en était l'auteur. Elle en a profité pour exercer une pression psychologique supplémentaire sur moi, me contraignant même à mentir sur les circonstances de l'accident.

Elle fronça les sourcils.

... : Comment cela ?

Moi : Au lieu de blâmer Lorenzo, elle le défendait et l'encourageait en quelque sorte. Et pour ça, elle n'hésitait pas à être menaçante. Mesquine. Elle m'a fait jurer de ne jamais dire à personne ce qui était vraiment arrivé. Livia y compris. Surement parce qu'elle savait que jamais sa fille ne cautionnerait de telles choses. Il fallait dire qu'Enzo jouait dans la cuisine sans surveillance et était malencontreusement tombé sur un couteau qui l'avait fatalement blessé. J'étais outrée qu'on fasse indirectement croire que c'est de sa faute à lui ou de la mienne pour ne pas l'avoir surveillé, alors que non. Mais je n'avais pas le choix.

... : Vous êtes forte, Kenaya. Tout ce que vous avez enduré, ce qui est arrivé à votre fils... Personne ne devrait avoir à traverser cela. Dans ce monde, beaucoup de femmes sont victimes de violences conjugales et des tas d'enfant y sont exposés et en subissent les conséquences. Vous n'en croirez pas vos yeux si vous voyiez les statistiques. C'est juste ahurissant.

Moi : J'aurais dû éviter ça à mon fils, dis-je. Il ne méritait pas ça. Ça aurait dû être moi au lieu de lui...


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5 ans plus tôt
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Ça faisait deux mois qu'Enzo était paralysé, mais je n'en revenais toujours pas. C'était encore plus difficile à gérer qu'avant car il avait besoin de plus d'assistance. De plus d'attention. Je me dévouais corps et âme à lui et je dois dire que parfois je m'en voulais car par moment, ça pouvait donner l'impression que je négligeais Chiara alors que ce n'était pas le cas. Et heureusement, ça ma fille le comprenait.

Jusqu'à ce que la mort nous sépare.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant