Chapitre 37

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Consciemment ou pas, Lily Dishau m'a vendu un poison

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Consciemment ou pas, Lily Dishau m'a vendu un poison.

Par miracle, je parviens à enlever le collier alors qu'il scintille étrangement, laissant une marque sur ma peau. Je l'observe prudemment, persuadée que c'est lui qui m'a mise en danger.

Dans le doute, mieux vaut se débarrasser du bijou. Lentement, je tends mon poing fermé au-dessus de l'écume, priant pour ne pas tomber en même temps que le collier.

Au même moment, une main étreint la mienne, accompagnée d'un picotement caractéristique lorsque nos poignets se touchent complètement. Plus étrange encore, le contact rassurant parvient à dissiper une partie de ma colère. Pour une fois, il ne me dérange pas.

Ni Gauthier, d'ailleurs.

Quand je suis plus apaisée, le Diamant entreprend de décoller un à un mes doigts du pendentif. Une fois qu'il a fini, il détache doucement ma main de la sienne – à laquelle je me suis agrippée sans même m'en rendre compte – et remet la chaîne autour de mon cou en murmurant :

— Je suis désolé.

Je contemple l'étendue noire un instant et me tourne vers lui, offrant un maigre sourire à qui veut bien le saisir.

— J'ai été égoïste, confesse-t-il, je nourrissais l'espoir de clore un projet de longue date ici, et je me suis emporté.

— Tu as pu le réaliser, au moins ? répliqué-je du tac au tac.

— De quoi ?

— Ton fameux projet.

— Non. J'avais rendez-vous, mais personne n'est venu.

— C'est bien dommage, ironisé-je, retrouvant mes motifs colériques.

— Effectivement.

Je m'appuie sur la rambarde, sans savoir s'il réalise ou non le malin plaisir que je prends à fureter avec la mort alors que lui-même joue avec le feu.

— Ce n'est pas un certain Aaron que tu attendais ?

Par habitude sans doute, je note l'étonnement et la frustration lisibles sur ses traits.

— C'est possible, pourquoi ?

Je m'avance prudemment pour mieux étudier sa réaction.

— Nous nous sommes rencontrés aujourd'hui même.

Après quelques secondes, il s'approche de moi, plus anxieux que jamais :

— Est-ce qu'il t'a fait du mal ?

— Non, au contraire ! Il m'a sauvée.

Pour toute réponse, j'ai le droit à un haussement de sourcils interrogateur qui m'encourage à poursuivre :

— J'étais appuyée contre le bord, l'eau m'attirait de façon irrésistible. Je serais tombée s'il n'était pas intervenu. En échange, il m'a juste demandé de te passer le bonjour. J'étais éblouie... Il me donnait l'impression de jouer avec son ombre.

Je présume que Gauthier va me demander comment j'ai pu être éblouie par la nuit, mais il n'en fait rien. Au lieu de ça, il déclare d'un ton détaché, comme s'il s'en fichait royalement : 

— Je parie qu'il t'a fait son numéro de charme.

Mes joues rougissent d'elles-mêmes en repensant aux mains qui se sont enroulées autour de ma taille. Des mains rouges de sang...

— « Cœurs et peurs, telle est la devise du Tenebrosus et du Mysteriosus », récite-t-il alors.

Tenebrosus, c'est le nom que t'a donné la femme dans la taverne, tout à l'heure, je remarque, suspicieuse.

— Oui, c'est un mélange de latin et d'espagnol.

— D'où ça vient exactement ?

— Aaron et moi avons un passé commun relativement sombre, Rubis. Nous œuvrions pour une organisation à laquelle nous étions tous les deux redevables. J'avais quatorze ans, lui treize.

— Ça ne m'explique pas l'origine de vos pseudonymes, argué-je d'un ton plus froid que je le voulais.

— C'est arrivé lors de l'une de nos missions. Ce n'est pas la pire chose qu'on ait faite, loin de là, mais nous avons dû suffisamment terroriser le gosse pour qu'il nous donne ces surnoms. Nous l'apeurions pour qu'il ait des cauchemars et les raconte aux autres, le faisant ainsi passer pour un aliéné. Ses proches s'en sont rapidement aperçus, mais ils n'y pouvaient rien. Chaque nuit, nous étions là à l'attendre, prêts à l'effrayer davantage. Petit à petit, nous avons réalisé qu'il mélangeait sa langue maternelle, l'espagnol, avec du latin. Pourquoi ? Je n'en ai pas la moindre idée. Ça faisait partie de son histoire, et ni moi ni Aaron n'en avions été avertis. Il était plutôt malin, pour son âge. Dommage qu'on nous ait forcés à le terroriser. Ses parents le savaient, mais ils ont marché : il a été interné quelques mois plus tard.

Gauthier achève son récit à bout de souffle, comme si c'était la première fois qu'il se décidait à inspirer un peu d'oxygène échangé avec son CO² personnel, ses méfaits les plus concrets.

— Ça remonte à trois ans maintenant. Moi-même je n'en avais que quatorze, mais je me rappelle cette fameuse nuit, lorsqu'il a claqué entre ses dents, dans son langage personnel, « Tenebrosus, mysteriosus ». Ses terreurs, ses mystères. Bien qu'Aaron m'ait toujours affirmé le contraire, je me demande encore aujourd'hui s'il parlait de lui... ou de nous. J'ai voulu revoir le petit plusieurs fois, histoire de vérifier qu'il s'en sortait, mais ça ne faisait pas partie du contrat. Aaron me l'interdisait formellement, jusqu'à me menacer de révéler d'autres de mes atrocités au grand jour.

C'est quasiment impossible à pardonner. Alors que Gauthier m'avoue littéralement qu'il a torturé un enfant durant des semaines, à la solde d'un mafieux totalement détraqué, la seule chose à laquelle je pense, c'est son âge. S'il avait quatorze ans il y a trois ans, il doit en avoir dix-sept aujourd'hui...

Il s'interrompt et passe sa main dans ses cheveux, un geste qu'il répète chaque fois qu'il est embarrassé ou gêné.

— Je peux accepter ça, murmuré-je du bout des lèvres. Je crois. On commet tous des erreurs, on est tous influencés au moins une fois dans notre vie. Ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi vous avoir donné l'ordre de persécuter un jeune garçon ? Et quelle est l'organisation malsaine que tu évoques ?

 Ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi vous avoir donné l'ordre de persécuter un jeune garçon ? Et quelle est l'organisation malsaine que tu évoques ?

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Après leur différend, Gauthier a accepté de dévoiler une part de son passé à Rubis. Il dit la vérité, vous croyez ? 

– Oui ! 🥰

– Pas si sûr... 🤔

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