— J'avoue que je suis déçu.
— Déçu ?
Je viens littéralement de lui déclarer ma flamme, et il en veut plus ?
C'est encore trop compliqué pour moi. J'ai beau être une fleur bleue, ma fierté est quand même capable de parler à ma place lorsque c'est nécessaire :
— Tu as raison, on trouvera toujours mieux.
— Comme qui ?
— N'importe... Aloïs, par exemple.
Au moment même où les mots franchissent mes lèvres, je me rends compte de mon erreur. Mentionner ma soi-disant âme sœur alors que Gauthier et moi nous sommes embrassés dans la soirée n'était sans doute pas ma meilleure idée.
— Ah, oui. J'avais oublié, ricane-t-il, désabusé.
— Tu étais au courant ?
— Alix a dû m'en toucher deux mots tout à l'heure. Je croyais qu'elle bavassait encore des ragots sans fondement... ou j'attendais que tu confirmes.
— Ce n'est pas ce que je voulais dire, tu le sais !
— Pas besoin de te justifier. Je comprends, je t'assure. Impossible de lutter contre le pouvoir des âmes sœurs, n'est-ce pas ?
Je reste interdite, consciente que rien de ce que je pourrai dire maintenant n'arrangera la situation. Son regard s'est voilé, impossible pour moi de l'atteindre à nouveau. Impossible aussi de prendre la pleine mesure de ma faute : ma seule certitude, c'est d'avoir gâché notre complicité retrouvée, et peut-être condamné notre amitié.
Comme pour faire écho à mes pensées, le Diamant remet son masque invisible et reprend la parole d'une voix glaciale :
— Maintenant que nous avons mis les choses au clair, nous devrions trouver un moyen de sortir d'ici. Je pense qu'en allumant un feu et en cumulant nos deux énergies, ce sera suffisant pour ouvrir un portail temporaire. Malheureusement, il va nous falloir brûler quelques bancs.
— Ce n'est pas un souci. Ça fera peut-être réfléchir quelqu'un sur l'obligation de laisser l'église ouverte à n'importe qui.
C'est comme si mes propos prenaient directement leur source dans les iris noirs du Diamant, plongés dans le déni le plus total.
Gauthier détourne ses yeux des miens et part rassembler les morceaux de bois qu'il me balance d'un geste mécanique, presque inconscient.
La lévitation : le meilleur moyen d'éviter tout contact entre deux êtres ! C'est mon domaine, en tant qu'asociale reconnue.
Une de mes mains se place au-dessus du tas tandis que l'autre empoigne fermement mon rubis, qui s'enfonce dans ma chair sans même que je ne m'en rende compte. J'imagine que la douleur est la seule chose qui me permet de me maintenir dans un état stable pour ne pas littéralement mettre le feu à l'église.
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ESMANTIUM
FantasySeule. Rejetée. Incomprise. Rubis n'a plus rien à espérer, mais une pierre précieuse va tout changer. *** Quand Rubis Brightwood, adolescente tourmentée et asociale, décide de se rebeller, son quotidien de lycéenne devient un enfer. Élève indésirab...