Chapitre 50

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En sortant du réfectoire, je profite d'être seule avec Gauthier pour lui poser une question qui me perturbe depuis la veille

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En sortant du réfectoire, je profite d'être seule avec Gauthier pour lui poser une question qui me perturbe depuis la veille.

— Comment tu fais pour t'infiltrer dans les rêves ?

— Aaron, déclare-t-il, comme si son ancien ami était la réponse à tout. C'est au programme des Troisièmes années, alors il me l'a appris.

— Et il savait ce que tu comptais faire ?

— Non. Il ne m'aurait pas aidé, sinon.

— Il ne se fie pas à toi, c'est ça ?

— Je ne suis pas une personne digne de confiance, je crois que tu commences à en avoir conscience...

— Bien obligée. Quand on doit supporter quelqu'un toute la journée, on lui trouve forcément de bons côtés.

— Tels que ?

— Malgré ton esprit de contradiction, tu es tout de même capable de t'attacher aux gens.

Il rit, d'un rire franc et sans retenue.

— Vraiment ? J'aurais plutôt pensé à mon sens inné de la galanterie, à ma persévérance à toute épreuve...

— Et à ton narcissisme légendaire, je sais, tu me l'as déjà dit.

— Non, ce n'est pas le bon mot : tu dois confondre avec mon charme légendaire.

— Toutes mes excuses, Messire, ironisé-je. Non, sérieusement. Tu serais déjà parti, sinon.

Nous restons quelques minutes ainsi, perdus dans la foule, heureux l'un comme l'autre d'avoir retrouvé cet ami un peu particulier de qui nous n'arrivons déjà plus à nous éloigner.

Comment se fait-il qu'on s'attache toujours aux mauvaises personnes ? Comment se fait-il que la souffrance nous attire tellement qu'on la laisse envahir notre quotidien ? Comment se fait-il que je sois encore là, à l'écouter, alors que les ténèbres se lisent dans son regard ?

Face à mon mutisme, il finit par prendre la parole, comme si lui aussi avait mûrement réfléchi :

— Tu as peut-être raison, mais fais-moi confiance vis-à-vis d'Aaron : il est pire que moi.

— C'est bien ce qu'il m'a semblé, même s'il n'a pas l'air aussi monstrueux que tu le prétends.

— C'est parce que tu ne le connais pas. Reste sur tes gardes avec lui : c'est le genre de type prêt à tout pour arriver à ses fins.

— J'en prends note, mais j'ai l'impression que tu dis plus ça pour toi que pour moi.

— Absolument pas, affirme-t-il, dérouté. Pourquoi ?

— Tu as beau le réfuter, il fait ou faisait partie de tes proches. Que tu le veuilles ou non, lui aussi te connaît. Probablement mieux que personne, d'ailleurs. Alors même si c'est la plus vile créature qui soit, il nourrira toujours une affection particulière à ton égard.

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