Chapitre 10-2

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Pendant une seconde, je me demandai si sa dernière phrase était une menace à mon encontre, ou une constatation générale plus alarmante ? Les yeux rivés sur les menottes, je m'interrogeai sur ce que je devais faire ? Puisque l'option de leur sauter à la gorge pour les lacérer de mes crocs n'était malheureusement plus envisageable pour le moment...dommage !

— Passez ces bracelets de votre plein grès, si vous ne voulez pas que nous vous y contraignions ! m'ordonna l'adjudante chef d'un ton martial.

À cet ordre, je sentis une vague de chaleur, profonde et primitive, sourdre du plus profond de moi, tandis qu'un grondement sourd montait du fond de ma gorge et que je relevai mes lèvres sur mes dents en un sourire carnassier et agressif. La vieille carne recula si vite en me voyant m'approcher d'elle à quatre pattes sur le lit, qu'elle se cogna contre le mur et faillis perdre l'équilibre. Je jubilai ! Elle avait beau être moche et vieille, sa chair serait certainement succulente sous mes crocs quand...

« Kami ! Reste à ta place !» rugis-je mentalement à la panthère vengeresse, en essayant de reprendre mes esprits et de comprendre ce qu'il venait de se passer. Un grondement mécontent me parvint, mais je sentis l'esprit du félin se retirer dans l'ombre de ma conscience, là où dans ce corps, sa place se trouvait.

— Que ce passe-t-il ici ? demanda soudain la voix assurée du docteur Banes, alors qu'elle entrait dans la pièce en fronçant le nez. Ça sent le fauve ici ! s'exclama-t-elle surprise, avant de reporter son attention sur l'étrange tableau que nous formions.

— Vous n'avez rien à faire là, vous ! Sortez immédiatement ou j'en réfère au professeur Shaw !

— Détrompez-vous, mademoiselle...Barlow...c'est ça ? lui répondit la doctoresse, en la regardant avec un grand sourire faux. Je viens d'être nommée médecin référent de cette aile à la place du docteur Kempt.

— Pardon ?! C'est une plaisanterie ? Cela m'étonnerait beaucoup que le professeur Shaw approuve ça...

— Oh, il n'a pas le choix ! L'ordre vient directement du Général Jacobs, lui répondit-elle avec une jubilation évidente, qui commençait même à être contagieuse. Maintenant, je vous prierais de sortir d'ici afin que je puisse examiner ma patiente.

Comme aucun des deux ne faisait mine de bouger, elle s'avança et força le passage pour parvenir jusqu'au lit.

— Nous devions l'emmener à l'infirmerie pour...

— Je suis au courant et je m'en charge ! Ne vous inquiétez pas, je sais très bien ce que j'ai à faire, merci ! la coupa-t-elle en la congédiant d'un simple regard.

— Je suis certaine que c'est un coup de bluff ! Je vais immédiatement aller voir le professeur !

— Mais faites donc ! Et n'oubliez pas ça, ajouta-t-elle en lui balançant les menottes, qui atterrirent sur le sol dans un bruit désagréable.

D'un signe de la main, elle ordonna au jeune homme de ramasser les entraves et c'est au pas de charge et en nous lançant un regard lourd d'avertissement, qu'ils quittèrent la pièce. Une fois qu'ils furent enfin sortis, elle s'approcha de moi et à ma grande surprise me tendit la main.

— Je m'appelle Rebecca Banes. Je n'avais jamais pu me présenter dans les formes.

J'hésitai un instant, encore un peu sonné par ce brusque retournement de situation, avant de lui tendre une main hésitante.

— Vous connaissez déjà le mien, il me semble, lui dis-je d'une voix rauque et fêlée.

Pour toute réponse elle me sourit gentiment, puis gardant ma main dans la sienne, elle me tira doucement vers comme pour m'aider à me relever.

— Je suis là pour vous emmener passer des examens. Venez vite, il faut se dépêcher, me chuchota-t-elle à l'instant où nous nous retrouvâmes debout l'une à côté de l'autre.

Le regard inquiet et fébrile qu'elle me lança, si différent de son aplomb face à l'autre mégère, me fit penser que son numéro devait contenir une partie de bluff et que le temps nous était compté. D'un côté cela me rassurait un peu, car pendant un court instant...j'avais craint un nouveau piège. Je suivis la jeune femme qui m'entraîna dans un labyrinthe de couloir identiques qui aurait perdu n'importe qui. Arrivées devant un sas, elle passa d'une main tremblante une carte magnétique dans un lecteur avant de taper un code, que j'essayai aussitôt de mémoriser 924587.

L'absence de gardes m'étonna, mais c'est docilement que je suivis mon nouvel ange gardien, en me répétant ces six chiffres comme un mantra. A peine le poste de sécurité passé, je fus subitement assailli par des ondes de profondes inquiétudes, qui faillirent me submerger et me stoppèrent net.

« Féline ! Je suis là...tout va bien » envoyai-je précipitamment à la panthère enragée et paniquée que je sentais tourner en rond dans sa cage.

« Petite sœur ?! »

« Oui, c'est moi ! Tout... »

— Venez-vite ! Normalement nous n'avons pas le droit d'être là ! Quand ils vont s'en apercevoir...

J'émergeai difficilement de ma profonde connexion avec Féline et me laissai entraîner presque malgré moi, tout en continuant à envoyer des pensées rassurantes et apaisante à mon amie.

« Petite sœur tu vas bien ? Tu as l'air...différente ! »

Sa remarque me fit un petit coup au cœur, mais je ne dis rien, me contentant de la rassurer d'une simple pensée.

— Où m'emmenez-vous ? demandai-je enfin au docteur Banes, me disant que j'aurais dû poser cette question cruciale dès le début.

— Passer une échographie, me répondit-elle en ouvrant une porte à l'aide de son pass.

— Quoi ?! Non ! Il faut que vous m'aidiez à sortir d'ici, m'exclamai-je en refusant d'entrer dans la pièce. Vous avez appelé l'inspecteur Worth ?

— Oui, mais je n'ai pas réussi à le joindre. Il est en congé maladie à ce qu'il parait. J'ai laissé un message à un homme qui a promis de lui transmettre le message. Venez, maintenant !

— Mais vous ne comprenez pas ! Je suis en danger ici, il faut que je parte le plus vite possible, lui expliquai-je en reculant dans le couloir, cherchant déjà du regard le meilleur chemin par où fuir.

— Je comprends qu'il se passe des choses pas nettes et je fais mon maximum pour vous aider, mais...vos analyses sont curieuses et je veux absolument vérifier quelque chose. Faites-moi confiance. De toute manière, le seul moyen de sortir d'ici, c'est d'accéder à l'aile du personnel et c'est là-bas que nous allons justement.

J'avais toujours le doute que ce soit un piège, mais je ne ressentais pas de mensonge dans son discours et finis donc par la suivre. Le trajet fut cours mais stressant pour mon organisme et mon esprit épuisé. Même si Féline, toujours présente dans mes pensées, me soutenait beaucoup.  Nous finîmes par arriver dans l'infirmerie où nous avions fait connaissance de manière si désagréable la première fois. Elle me fit assoir sur la table d'examen et s'empressa d'aller chercher un appareil sur roulette qui s'avéra être un échographe.

— Allongez-vous, me demanda-t-elle gentiment, mais d'une voix pressante au moment où le téléphone se mit à sonner nous faisant toute deux sursauter.

Elle lança un regard inquiet à l'appareil accroché au mur, s'en faire mine d'aller décrocher.

— Vite, nous n'avons pas beaucoup de temps, murmura-t-elle pour elle-même tandis qu'elle remontait mon tee-shirt et déposait un gel froid et visqueux sur mon ventre.

Puis sans perdre une minute, elle se saisit de la sonde de l'appareil et commença l'examen. Au bout d'à peine quelque seconde elle se figea, fixant l'écran d'un regard sidéré.

— Ce n'est pas possible ! murmura-t-elle au moment où la porte s'ouvrit à la volée, dévoilant un Krüller vert de rage.

Symbiose . Féline-Tome 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant