Chapitre 6-2

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Cette métamorphose, acceptée et libératrice, fut totalement différente des autres. Plus rapide et moins douloureuse, même si je sentais que l'absence de Féline à mes côtés freinait un peu le processus. Une fois pleinement transformée, je laissai Kami aux commandes, même si j'avais la pleine conscience de ce qu'il se passait. Heureuse pour une fois d'être la spectatrice et non la pleine actrice de la catastrophe à venir.

Je m'ébrouai pour chasser les derniers fourmillements résiduels et fis quelques pas sur ce sol étrange et trop sec. Il faisait beaucoup trop chaud ici et je me sentais faible et assoiffée. Apercevant une écuelle où il restait encore un peu d'eau je m'empressai d'aller m'y désaltérer, avant de grimper d'un bond souple et puissant dans l'arbre étrange se trouvant à proximité. Une fois dissimulée par le feuillage, je commençai à ramper discrètement sur l'une des branches tordues mais solide, qui s'étendait loin au-dessus du sol. Je me tapis confortablement et attendis.

Je sentais que la bipède casse-pied avec qui je partageais ce corps, cherchait à me dire quelque chose...mais je ne l'écoutai pas ! Elle m'avait laissé les commandes parce qu'elle était faible et trop...humaine. Mais ce n'était pas mon cas...et ils allaient vite l'apprendre leurs dépens.

— Vous savez que vous cacher ne vous servira à rien, n'est-ce-pas ?! dit soudain l'humain planqué derrière sa vitre.

Sa voix recelait un léger frémissement d'appréhension qui m'emplit de joie. Mais il n'avait pas encore assez peur à mon goût ! Je voulais qu'il tremble et qu'il soit terrifié, comme ma sœur Féline et mon humaine l'avaient été. Je voulais qu'il souffre avant de le dévorer lentement, en savourant chaque bouchée. Le dégoût qui me traversa subitement venait évidemment de miss chochotte à deux pattes et je m'empressai donc d'affermir ma position pour ne pas qu'elle me ravisse à nouveau les commandes. J'avais mon plan et personne ne m'empêcherai de me venger !

— Descendez de cet arbre immédiatement, où j'envoie quelqu'un pour vous déloger ! me menaça le planqué, d'une voix qu'il pensait sans doute impressionnante, mais qui ne fit qu'affirmer ma résolution.

J'avançai encore de quelques centimètres, puis ayant trouvé des appuis sûrs et solide, je me propulsai dans un grondement rageur vers la vitre, que je percutai avec violence, mon épaule gauche encaissant le choc sans difficulté. Je retombai au sol sur mes pattes, un peu sonnée mais plus que satisfaite par l'étoile scintillante qui marbrait à présent la vitre à l'endroit de l'impact.

— Arrêtez immédiatement ! me prévint l'homme tandis que des sifflements retentissaient soudain autour de moi et que de petites billes noires fusaient de toutes part criblant le sol de trous fumants.

Je m'empressai de fuir, mon esprit persécuté par mon humaine qui me hurlait d'arrêter...mais bien sûr quand les panthères auraient des ailes ! Je grimpai à nouveau dans l'arbre, l'écorce tendre s'effritant sous mes griffes. Grisée par la vitesse et l'urgence je ne pris même pas le temps d'assurer mes appuis avant de m'élancer une nouvelle fois et je frappai la vitre exactement au même endroit, entendant un craquement satisfaisant, bien que pas encore suffisant !

C'est alors que j'allais réitérer mon exploit pour la troisième fois, qu'un cri strident et perçant se fit soudain entendre et qu'une masse indistincte me tomba dessus. Je sentis quelque chose de pointu et d'acérer pénétrer ma peau tendre pourtant bien protégée, m'arrachant un feulement de douleur. J'essayai de déloger le rapace de mon dos, mais il était énorme et bien accroché à mon pelage de ses serres puissantes.

— Maintenant...tirez !

Alors que des dizaines d'impacts m'atteignaient simultanément, me faisant tomber au sol, la douleur et le choc, m'arrachèrent le contrôle et je laissai la place contrainte et forcée à miss chochotte qui allait encore nous enfoncer un peu plus dans le pétrin.

Alors que je cherchai frénétiquement ma respiration et mes marques dans mon nouveau corps, je savourai le bonheur d'être de nouveau pleinement moi et me promis que plus jamais je ne céderai le contrôle total à l'un de mes animaux. C'était vraiment trop...brrr ! Cette fois avait été différente de la précédente, car j'avais trouvé Kami plus humaine dans ses réflexions. Comme si c'était moi qui pensais mais avec une autre personnalité, sans plus de contrôle sur rien ! Un seul mot pour le définir...flippant !

Heureusement pour nous deux, les balles qui nous avaient atteinte, nous et notre agresseur à plume, étaient en caoutchouc et même si la douleur était cuisante et à la limite du supportable, nous étions au moins débarrassées du rapace qui gisait mal en point quelques mètres plus loin. Du moins c'était ce que je croyais, car à peine avais-je pensé cela que l'oiseau se remettait sur ses pattes et dardant son regard de prédateur sur moi, prit son envol dans un cri perçant et inquiétant.

N'ayant d'autres choix, je m'enfui à toutes pattes. Gênée par mes blessures et ma peur de me laisser aller complètement à ma nouvelle apparence, j'étais maladroite et pataude et n'eus pas le temps d'atteindre le couvert protecteur des arbres avant que l'aigle ne soit de nouveau sur moi, prêt à me lacérer de ses serres.

Dans un instinct que je ne pensais pas posséder, je me retournai d'un bond acrobatique et souple et repoussai mon adversaire d'un coup de patte puissant qui l'atteignit à la tête. L'oiseau battit furieusement des ailes pour s'éloigner de moi, gêné par son envergure et sa proximité avec le sol.

Alors que je fixai réellement le rapace pour la première fois, mon cœur se serra dans ma poitrine. Non...ce ne pouvait pas être lui ! Il ne pouvait pas l'avoir capturé lui aussi ? me dis-je dans une prise de conscience dévastatrice, alors que l'aigle royal qui ressemblait étrangement à Jude, se préparait de nouveau à m'attaquer.

Alors que le doute s'insinuait de plus en plus en moi et que mes forces commençaient à m'abandonner, incitant mon corps à amorcer la transformation inverse, je tentai une manœuvre désespérée. Alors que l'oiseau fondait sur moi tout bec dehors, je projetai mon esprit vers le sien, espérant qu'aucun dispositif ne bloque ma tentative.

« Jude...c'est toi ? » demandai-je avec autant d'espoirs que d'appréhensions.

Je sus au moment où mon esprit effleura celui du rapace que ce n'était pas Jude et que mon ennemi était indubitablement féminin. Elle ne me répondit pas, mais mon intrusion sembla la déstabiliser. À tel point qu'alors que son bec n'était plus qu'à quelques centimètres de ma tête, elle effectua un mouvement complexe et acrobatique pour m'éviter ! Dans le mouvement, le bout de son aile toucha le sol ce qui la déstabilisa et l'envoya percuter le tronc de l'arbre dans un bruit mat.

Je feulai d'inquiétude, m'étant aperçu au cours de notre bref contact mental que cette femme était toute aussi prisonnière que moi et ne m'attaquait que parce qu'elle y était elle-même forcée. Était-ce mon inquiétude pour cette inconnue ou mes forces qui déclinaient à vue d'œil, mais mon corps choisit ce moment précis pour entamer ma transformation, m'envoyant au sol dans un grondement de douleur.

Le processus me parut interminable et c'est à peine consciente que je retrouvai mon corps pataud et perclus de douleurs. C'est au moment où je sentis des mains me saisir rudement par les bras pour me sortir de la salle, que je jetai un coup d'œil à l'oiseau qui avait lui aussi retrouvée son apparence humaine et sentis la peur et la haine étreindre mon cœur déjà bien malmené.

Car là, devant mes yeux écarquillés, gisait une personne que je haïssais et qui ne pouvait pas être là !

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Nouveau chapitre, très difficile à écrire pour moi et pas totalement abouti ! Il sera repris par la suite, promis ;-)

Les fêtes approchants à grands pas je tenais à vous informer que les publications seront certainement moins régulière que d'habitude...réveillons obligent ^o^

J'espère que cette partie vous aura plus ?! Gros bisous et à tout bientôt *o*

Symbiose . Féline-Tome 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant