Symbiose . Féline-Tome 3

Chapitre 27-2

           

Les balles qui fusèrent soudain de partout détournèrent efficacement deux des monstres de leurs cibles initiales (c'est-à-dire nous !) mais pas le troisième, qui déjà en pleine attaque, ne se laissa pas distraire et continua à foncer droit sur moi. J'affirmai ma prise glissante sur mon poignard, conscient que je n'aurais qu'une seule chance. Je fléchissais les genoux dans l'attente de l'impact quand River m'écarta de la trajectoire du monstre à la dernière seconde, encaissant tout le choc à ma place.

— River ! hurlai-je.

Je me précipitai vers lui pour tenter de l'aider et n'étais plus qu'à quelques pas du corps à corps sanglant, quand un nouveau coup de feu résonna. La tête du mutant fut brusquement projetée sur le côté tandis qu'une fleur écarlate apparaissait sous son oreille droite et qu'il tombait raide mort, piégeant River sous son poids.

Alors qu'une fois la surprise passée, je m'approchai pour aider mon ami, deux nouveaux tirs se firent entendre, terrassant les deux autres créatures sur le coup.

— River, ça va ? lui demandai-je, alors qu'au prix de nos efforts combinés, nous réussîmes enfin à faire basculer la carcasse nauséabonde sur le côté.

— Je m'en remettrai, grimaça-t-il en se redressant la main plaquée sur la griffure sanguinolente qui déparait à présent son biceps gauche. Comment tu as fait pour le tuer ? me demanda-t-il perplexe.

— Ce n'est pas moi...

— Non en effet, puisque c'est moi ! nous dit Isaac en sautant de l'arbre qui lui avait servi de perchoir, un fusil de haute précision entre les mains.

— Isaac ?! s'exclama Hannah, bien que l'identité de notre sauveur ne fasse plus aucun doute. Mais comment...

— Avec leurs propres balles ! répondit la voix de Charles alors que ce dernier pénétrait à son tour dans la clairière. Les hommes qu'Isaac avait massacrés étaient morts, mais leurs armes encore à moitié chargées de ces saloperies, étaient intact. Nous allions les détruire, quand j'ai reçu ton message, dit-il à sa fille en s'arrêtant prudemment à quelques mètres de nous, comme s'il ne s'attendait pas à un bon accueil de notre part.

— Je ne sais pas du tout qui vous êtes...mais merci ! On vous doit une fière chandelle ! dit River en s'approchant d'Isaac, la main tendue.

— C'est mon frère et mon père...Charles, lui répondit Hannah d'une voix gênée.

— Ah ! commenta River en ralentissant l'allure avant de me lancer un coup d'œil discret, ne sachant apparemment plus trop s'il devait ou non poursuivre son geste amical.

— Heureux que vous soyez arrivés à temps et surtout de te voir sur pieds, dis-je à Isaac ce qui détendit immédiatement l'atmosphère.

— Ce n'est pas encore la forme olympique mais ça va mieux, me dit-il avec un léger sourire qui laissa transparaitre sa fatigue.

— Je ne voulais pas qu'il vienne mais il a insisté ! intervint Charles d'une voix réprobatrice.

— C'était le moins que je pouvais faire ! C'est grâce à Christina que je suis toujours en vie, ça je ne l'ai pas oublié ! me dit-il en plantant ses yeux sincères dans les miens. Où est-elle ?

— On ne l'a pas encore retrouvé, lui répondit Hannah. Depuis que nous sommes arrivés ici, nous devons nous battre contre ces satanés bestioles ! Mais d'après Féline, nous ne sommes pas loin !

Je ne pus retenir la grimace d'agacement à l'entente de la bourde d'Hannah, qui vu sa tête, avait compris en même temps que moi qu'elle aurait mieux fait de se taire.

— Nous n'avons pas de temps à perdre ! dis-je parce que c'était vrai mais aussi pour détourner l'attention de Charles des propos de sa fille.

— Attend un peu, pas si vite ! me dit Charles d'un ton suspicieux. Si Christina n'est pas là, comment pouvez-vous communiquer avec la panthère ?

« Il faut partir...maintenant ! »

J'essayai de ne pas broncher sous l'assaut psychique et pressant de Féline, qui tombait pile au mauvais moment, mais vu l'expression horrifié et choqué qui se peignit sur le visage de Charles, je sus que je n'avais pas réussi.

— C'est toi ? C'est toi qui communique avec elle ?

— Voyons c'est impossible ! intervint Isaac. Sauf s'ils sont liés...non même comme ça c'est...

— Si c'est possible. Mais pour cela il faudrait qu'ils aient enfreins toutes les règles ! rugit-il d'une voix sourde et pleine de colère.

— De quoi vous parlez ? demanda Euclide.

— Du rituel de Symbiose ! cracha-t-il comme si c'était un gros mot.

— Cette pratique est formellement interdite depuis des siècles...

— Deux pour être tout à fait précis, ajouta Charles d'une voix sinistre et grave.

— Que ce soit le cas ou non, et bien je n'ai aucune idée de ce dont vous parlez exactement, ce n'est vraiment pas le moment ! s'écria River.

— Si c'est le moment ! le contra Charles en s'approchant de moi à grandes enjambées menaçantes.

Féline se mit à feuler férocement à son approche, crocs découverts et échine hérissée. Mais cela n'empêcha pas Charles de m'attraper brutalement par le bras en ne lui accordant qu'un bref regard agacé.

« N'interviens pas ! » ordonnai-je mentalement à la panthère dans un réflexe naturel que je ne pensais pas posséder et qui cette fois ne résonna pas désagréablement sous mon crâne.

— Comment avez-vous oser faire ça ? s'écria-t-il en me lâchant brusquement comme s'il venait de se brûler !

— Nous nous sommes unis comme beaucoup d'autres couples et je ne vois pas en quoi cela te regarde !

— ça me regarde car cela a achevé le processus de Symbiose que vous avez eu l'inconscience de débuter ! Tu ne sens donc pas qu'il y a quelque chose de différent en toi à présent !

« L'ours à raison ! Je le sens maintenant que tu ne résistes plus à nos échanges. Tu sens toujours la volaille et...le félin ! »

— Mais c'est impossible ! répondis-je à voix haute, alors que des souvenirs de mon étrange métamorphose me revenait en mémoire.

— Si c'est possible ! Maintenant que la symbiose est achevée, tu as le pouvoir d'acquérir la forme animale de ta compagne.

— C'est dingue, on est d'accord ! intervint River. Mais en quoi cela serait-il une mauvaise chose ?

— Parce que la plupart du temps, le corps et l'esprit du métamorphe résiste à cette nouvelle forme et...sombre dans la folie.

Un silence de mort, suivit ces paroles alors que j'essayai d'intégrer ce que je venais d'apprendre. Ce pourrait-il que ce soit ça que j'ai ressenti lors de ma dernière métamorphose ? Cette force sombre et sauvage...ce pourrait-il que ce soit ma nouvelle forme féline ?

« Oui, je le sens en toi...mon frère »

À l'entente psychique de ces paroles, je sentis mon corps se contracter, comme si Iron résistait ne serait-ce qu'à l'idée que cela soit possible. Charles avait raison...mais qu'était-il en train de m'arriver ?

— J'y arriverai, affirmai-je avec plus de certitudes que je n'en ressentais. De toute manière je suis beaucoup trop faible pour me transformer, donc nous nous occuperons du problème quand il se présentera. À présent allons chercher Christina avant que de nouvelles horreurs ne nous tombent sur la tête.

Je n'avais pas plus tôt terminé ma phrase que de nouveaux bruits de feuillages se firent entendre tandis que Worth et Cassie déboulaient en courant, à quelques mètres de nous.

— Il faut partir...tout de suite !