Chapitre 17

3.5K 221 35
                                    

J'ai encore son goût sur ma langue. Le goût de sa bouche. Le goût de notre baiser.
Je n'arrive pas à l'enlever malgré tous mes efforts. Je ne pense qu'à lui. À Styles et à ses lèvres.

Après m'être enfui, je suis allé me réfugier dans les vestiaires.
Mes équipiers y étaient aussi. Il n'y avait pas un bruit. Nous goûtions tous à la défaite, c'était douloureux. Je me suis planqué dans un coin, faisant mine d'être muet. J'ai fait semblant d'être en rage, lorsque je fixais le sol comme un zombie. J'étais simplement perdu dans le geste que j'ai fait. Que nous avons fait. Il m'a embrassé en premier, et je l'ai imité la seconde fois.

Je suis sensé le détester pas lui sauter dessus.

Après ces interminables secondes de silence, les gars se sont énervés. Ils n'ont pas arrêté de critiquer et d'insulter Styles à cause de notre défaite. Je restais silencieux. 

Je me suis changé en dernier pour être seul, pour retarder au maximum le retour à la maison, l'échec dans les yeux de ma famille, la déception de mon père. Je n'ai croisé personne, à part ma mère qui m'attendait patiemment à la sortie du stade. Elle m'a pris dans ses bras pour tenter de me consoler un minimum.

Je suis retourné à la maison, laissant ma mère rejoindre ma famille sur la place. J'ai enfilé une tenue plus sophistiquée en interdisant mon cerveau de penser à ce qu'il s'était passé. J'ai beaucoup trop peur d'y réfléchir.  

Je suis allé seul sur la place de Ladova pour la clôture du tournoi. C'était bruyant.
Je me suis rangé avec ma famille, sans porter attention au public qui nous acclamait. J'ai baissé mon visage, encore déçu par le match perdu. Je me suis concentré sur le discours du maire. Sur rien d'autre. Même pas sur Styles et sa famille qui étaient sur ma droite.

Le maire a annoncé les résultats du tournoi. Une épreuve gagnée permet d'obtenir quatre points supplémentaires dans le classement. La deuxième place gagne deux points.
Ma famille a obtenu 31 points, mais ça n'a pas suffit pour obtenir la victoire. Les Styles l'ont emporté avec 34 points. Nous sommes deuxième, derrière eux.

Les Styles ont sauté de joie et ma famille les a hué. Mon père ne m'a adressé aucun regard, sûrement honteux de m'avoir en tant que fils.  Comme je ne pouvais pas supporter notre défaite et la honte de finir deuxième, je me suis éclipsé de notre rang. Danielle a essayé de me retenir par le bras. Elle m'a demandé ce qui n'allait pas. Je me suis dégagé. Je l'ai dévié sans lui apporter de réponse. Je me suis réfugié loin.

Je me retrouve donc à marcher loin des cris stridents de la foule. Je déambule dans les rues vides. Toute la population est en train de s'arracher les cordes vocales pendant la remise des prix. Les Styles doivent être en train de brandir bien haut la coupe. Putain ça devrait être nous! 

Pour autant, ce n'est pas ça qui me perturbe le plus. C'est ce qu'il s'est passé avec Styles. Je repasse en boucle la sensation de ses lèvres sur les miennes, son goût, sa respiration s'échouant sur ma peau. Tout me revient en mémoire. Ce n'est pas normal. Ce qu'il s'est passé est loin d'être normal.
J'aime les filles, j'ai une fiancée, je ne suis pas censé embrasser mon ennemi numéro un. Pourtant, c'est ce que j'ai fait. J'ai trahi mes principes et ceux de ma famille en laissant le désir prendre le dessus. Qu'est-ce que j'ai foutu?

-Tu n'es pas à la cérémonie?

Je me retourne vivement et lève le visage vers la voix qui m'a stoppé dans mes réflexions incessantes.
Je vois un homme assis tranquillement, les jambes pendant dans le vide. Il se retient sur une bordure de fenêtre, à un étage de moi. Il est assez jeune, peut-être deux ou trois ans de plus que moi. Il ne porte aucune couleur des cinq familles, juste une veste en cuir noir. 

Meilleur ennemiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant