Chapitre 32 : Lisa Richmond

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Je ne m'attendais certainement pas à cela.

A vrai dire, nombreux ont été mes fantasmes en imaginant ce que révélerait le passage. Tout au plus, je me voyais atterrir dans un sanctuaire, regroupant je ne sais quelles reliques sacrées de l'Institue. Ou encore, tout simplement, un espace vide, totalement dénudé d'une quelconque présence.

Non, tout cela restait bien trop vague.

La réalité est en effet tout autre, et à peine ai-je franchi le seuil de la porte, que mes yeux atterrissent sur une imposante table argentée, dont les reflets contrastent avec ceux de la lumière présente sur les murs. Autour d'elle, de nombreux sièges en cuir blanc viennent lui tenir compagnie tandis que, derrière moi, la porte se referme sans un bruit.

Mon attention se profile ensuite vers l'un des murs, comme attiré par une force invisible. Sur la surface, se regroupent une multitude de tableaux, pour la plupart ternes mais étrangement intrigants. Mes yeux s'habituent rapidement à la luminosité de la pièce, à croire que ma rétine y trouve son goût et ses plaisirs.

D'une certaine manière, je ne pourrais pas lui en vouloir, mais maintenant que je sais à quoi ressemblent les arbres et, surtout, les roses de toutes les couleurs, mon esprit ne cesse de réclamer de nouvelles merveilles, afin de calmer son intense envie de découverte.

Le blanc a enfin laissé place à l'imaginaire.

Désormais, plus rien en ce monde ne semble pouvoir arrêter mes envies de savoir, et je compte bien en profiter avant de disparaître pour de bon.

- Bonjour.

Cette voix.

Je m'attendais à l'entendre. Rien n'aurait pu contrer sa présence. Rien n'aurait pu l'effacer dans l'oubli, ou encore moins la perdre dans l'éternel. Non, il fallait qu'elle reste présente, afin de me ramener à la réalité, qui puis est point très réconfortante.

- Alors comme cela, vous me redites bonjour. Maintenant.

Les mots sortirent de ma bouche comme une évidence, et je moque bien de leur possible conséquence. Mes yeux, jusque-là rivés sur les tableaux, se détournent enfin vers l'autre bout de la table, où siège tel un roi l'homme de toute ma souffrance. Sa blouse blanche habituelle vient contraster avec ses cheveux d'un noir troublant, presque hypnotisant. La lumière créée par le plafond vient même s'inviter dans sa chevelure qui, avec grâce, reflète de doux éclats dorés sur l'ensemble de la pièce.

Son visage fin et régulier souligne un sourire perçant, dont les dents blanches émanent une certaine brillance. Et sans se soucier plus de ma remarque, il se sert un verre d'eau, et repose la cruche en cristal avant de boire d'une gorgée pressante.

- Vous savez, réplique t-il ensuite, je pense que nous sommes partis du mauvais pied, vous et moi.

Ceci est l'exemple même de ce que peut formuler un manipulateur. Et Elon White ne fait pas figure d'exception. Bien entendu, je ne m'en attendais pas moins de lui mais, d'une certaine manière, j'espérais qu'il en soit autrement.

Du plus profond de nos cœurs, nous croyons toujours en la perfectibilité de l'être humain. Comme s'il s'agissait d'une évidence. Personne n'est fait de blanc ou de noir. Non, un mixe est bien présent. Suffit-il seulement d'espérer que le bien gagnera toujours sur le mal.

- Vraiment ? sifflé-je, d'un ton ironique.

- En effet, et de ce fait, j'ai jugé nécessaire de prendre le déjeuner en tête à tête avec vous, afin de calmer nos différences sur un pied d'égalité.

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