Myrtille

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De joyeuses fêtes à vous !

Les matins étaient tous plus ou moins les mêmes depuis l'arrivée de Wooju dans sa vie. Namjoon se levait toujours à la même heure, heure fixe. Il frissonnait sous la fraîcheur du carrelage au contact de sa peau nue, puis quittait l'appartement avec RapMon pour la sortir quelques instants, laissant par la même occasion un peu plus de sommeil supplémentaire à l'enfant. Par la suite, il venait le réveiller avec tendresse, à coups de caresses et de baisers, avant de le transporter de ses bras jusqu'à la cuisine où il le déposait sur une chaise face à la table. Là, ils prenaient ensemble un petit déjeuner composé de céréales colorées, de chocolat chaud et de café serré ; avant que le père de famille ne vêtisse le garçon et ne l'emmène à l'école. Ensuite seulement, il ouvrait la librairie et commençait sa journée en étiquetant le nouvel arrivage sans pour autant oublier l'enfant. Pourtant, ce jour-là, le matin fut différent. Le rituel matinal fût le même et pourtant, il n'ouvrit pas la petite boutique. Niché sous un gros manteau en laine gris coupé façon trench-coat, Namjoon traversa la rue e regardant de droite à gauche pour regagner le porche de la pâtisserie. Les citrines de cette dernière étaient joliment décorées et une guirlande lumineuse de bleu et d'argent habillait la façade crème ordinairement nue. Un instant, il hésita. À l'intérieur, il pouvait voir ce garçon aux cheveux menthe à l'eau, penché sur son rayon et, quelques bribes de ce fameux jour lui revinrent en mémoire. Il avait été odieux.

La boule au ventre à l'idée de se faire jeter, Namjoon poussa la porte en verre et le tintement de la cloche se fit entendre. L'odeur de pain d'épice l'assaillit et il dut reconnaître qu'il appréciait. Les lieux lui semblaient bien plus chaleureux que la première fois, notamment grâce au sourire commercial de Yoongi à son entrée ; bien plus professionnel que quelques mois plus tôt. Son tablier était noué bien plus soigneusement, le garçon était également plus propre sur lui, sans farine ou toutes autres poudres de cacao sur les vêtements et dans les cheveux. À peine avait-il passé le porche qu'une formule de politesse lui avait été adressée. Un peu gêné, le libraire s'inclina avant de s'avancer, ouvrant d'une main les boutons noirs et ronds de son manteau. Au comptoir, il prit la parole.

« Pourrais-je parler avec votre supérieur ? »

Le garçon aux cheveux menthe à l'eau sembla ne pas comprendre, un voile de surprise passant sur son visage, ses traits se durcirent et ses sourcils se froncèrent. Au mouvement de son corps, Namjoon comprit qu'il venait de prendre appui sur sa jambe gauche, les bras tendus contre le meuble en bois. Le jeune père quant à lui tira nerveusement sur le col de son pull, conscient du froid qu'il venait de jeter dans la pâtisserie. Le garçon humecta ses lèvres.

« -Mon frère est absent. Je peux faire quelque chose pour vous ?

-Écoutez, je sais que nos rapports n'ont pas été des plus amicaux, et je ne cherche pas à détruire votre image. Mais je vous demanderais de ne plus faire livrer vos muffins dans ma boutique. »

De ce matin différent des autres s'était élucidé le mystère pour Yoongi. Les pertes ne venaient pas du déjeuner du matin, mais en quelque sorte du garçon au minois roux. Et la plainte que venait de déposer le propriétaire de la librairie suffire à lui faire comprendre ce qu'il se passait. Le jour même, il prit Hoseok à part dans les vestiaires. Minhyun était déjà rentré à Daegu pour les fêtes, Dieu merci. Sans cela, son meilleur ami serait déjà à la rue et sans emploi. Lui n'y participait presque jamais. Il fallait bien quelqu'un pour faire tourner l'enseigne et ils ne pouvaient décemment pas laisser les employés s'autogérer, aussi droits qu'ils fussent. Et puis, ça ne lui manquait pas vraiment, il n'avait jamais aimé Noël. La pièce n'était pas bien grande ; quelques casiers métalliques le long des murs bétonnés et nus, une ampoule grésillante accrochée au plafond qu'il n'avait pas prit la peine de changer, il n'en avait pas le temps, et l'escabeau était bancal. Au fond de la salle, un banc long de quelques mètres. Lorsque Hoseok fut entré, il ferma la porte avec brusquerie, faisant sursauter ce dernier.

𝙼𝚞𝚏𝚏𝚒𝚗Où les histoires vivent. Découvrez maintenant