Fruits confits

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Ses dents vinrent timidement mordiller la peau tendre de sa bouche tandis qu'il ne pouvait s'empêcher de laisser un petit rire lui échapper, ses pas le menant lentement mais sûrement jusqu'au petit appartement qu'il partageait avec son père. La soirée avait été pour le moins mémorable, oui c'était définitivement le mot à employer dans cette situation. Peut importe les heures le séparant de ce baiser échangé avec Jihyun, il ne pouvait que sentir encore et encore la sensation de ses lèvres charnues sur les siennes. C'était doux, loin d'être innocent il fallait l'avouer, mais particulièrement plaisant. Avaient-ils parlé par la suite ? Absolument pas. Aucun mot tendre n'avait été échangé par la suite, pas de déclarations enflammées, aucune promesse. Rien d'autre qu'un sourire complice, avant de revenir à la charge. Il n'en savait trop rien pour son camarade, même s'il de doutait fort de la réponse, mais pour lui ce fut la première fois.

Ce fut la première fois que quelqu'un lui démontra qu'il pouvait compter, ou qu'il pouvait être désirable d'une quelconque manière que ce soit. Ce fut la première fois depuis le départ de sa m

mère qui se sentit bien, vraiment bien. Était-ce de l'amour ? Non, définitivement non. Il tenait énormément à Jihyun, c'était certain, mais pas comme l'on pourrait tenir à un amant. C'était plus que cela, indéfinissables alors qu'ils se connaissaient depuis quelques mois maintenant. Avait-il donc eu peur de le perdre suite à cet échange ? Non plus. Jihyun ne l'avait pas repoussé, Jihyun n'avait pas semblé dégoûté, Jihyun était celui qui avait réitéré la chose. Maintenant, encore fallait-il savoir ce que tout ceci signifiait pour l'adolescent, mais Jungkook était persuadé que tout comme pour lui, cela semblait aussi limpide que trouble. Drôle de sensation sur laquelle il était impossible de mettre le moindre mot. Une connexion était là, présente. Mais la définir aurait été lui faire perdre de sa valeur.

La brise nocturne, plus fraîche et virulente que lors de son départ pour la petite fête, arracha un frisson au jeune garçon qui s'empressa de refermer son gilet. Gilet qui ne lui appartenait d'ailleurs pas, il l'avait emporté avec lui dans l'euphorie du moment, après l'avoir trouvé sur le sofa. Qu'importe. Au-dessus de sa tête, le ciel était bien plus sombre, plus inquiétant qu'en début de soirée. Mais tout comme les vagues glaçantes qui le traversaient, Jungkook s'en moquait. Rien, rien ne semblait pouvoir le faire redescendre. Son petit nuage, celui qu'il tentait désespérément d'effleurer, aujourd'hui il avait fait bien plus que cela. Il l'avait agrippé si fermement, qu'il semblait impossible de l'en décrocher. Comme il se trompait. Ses pas le menèrent naturellement jusqu'à son petit appartement miteux. La moisissure ne le dégouta pas comme à l'accoutumée. Il n'y prêta même pas attention tandis que ses jambes escaladaient les escaliers en vieux bois rongés par le temps et les mites. L'odeur de clope et d'urine ne le fit même pas plisser du nez, non il gardait simplement ce sourire idiot sur les lèvres tandis qu'il enfournait la clef dans la serrure bancale de sa porte d'entrée.

La lumière filtrant sous le jour de la porte à une heure pareille aurait dû lui mettre la puce à l'oreille. Peut-être même aurait-il dû demander à dormir chez quelqu'un, Jihyun, ou n'importe qui. Qu'importe qu'il ne connaissait pas vraiment ces gens avec qui il avait bu et dansé ce soir. Tout aurait été préférable à la situation qui allait suivre. À peine ses chaussures foulèrent-elles le planché grinçant de son petit hall, que sa joie retomba. L'euphorie avait disparu, écrasée par la peur grandissante, l'angoisse dévorante. Là, à une dizaine de mètres seulement, son père l'attendait, toujours debout, assit à la table de la cuisine une bouteille de whisky dans la main droite. Sa tête dodelinait dangereusement, preuve de son état d'alcoolémie particulièrement avancé, mais il était toujours assez lucide pour lui jeter un regard transcendant, glaçant, tandis que son index venait lentement tapoté le cadran de la montre à son poignet. Dix-sept heures. Comme chaque jour il aurait dû rentrer à dix-sept heures. Mais cette fois il ne l'avait pas fait, pire encore il était sorti. La chaise sur laquelle il était assis racla le sol dans un crissement désagréable. Son père fit un pas, puis deux, avant de se rattraper lamentablement au mur le plus proche. Ça ne suffit pas à freiner son avancée, bien au contraire et Jungkook pensa sérieusement à rebrousser chemin, fuir tant qu'il le pouvait encore. Pourtant.

𝙼𝚞𝚏𝚏𝚒𝚗Où les histoires vivent. Découvrez maintenant