Æsa tira sa dernière flèche et sans s'encombrer d'hésitation prit son élan et sauta sur le quai, à presque deux mètres de là. Elle se réceptionna et amortit le choc en s'accroupissant. L'adrénaline pulsait violemment dans ses veines et elle n'était capable de ressentir ni la douleur ni la peur.
Une première Shield Maiden la dépassa en courant suivi par quelques autres puis par Lyvanya qui lui tendit au passage un carquois plein.
D'un mouvement d'épaule, elle abandonna l'autre sur le quai, enfila le nouveau puis se saisit d'une nouvelle flèche tout en courant.
Elle s'arrêta une demi-seconde le temps de viser un archer qui s'était placé sur le toit et qui avait failli toucher la toute première des combattantes à mettre le pied sur les pierres du port. Elle n'attendit pas que sa flèche fasse mouche pour reprendre sa course, juste derrière Lyvanya et encocher une nouvelle flèche.
Déjà, elles avaient atteint le bout de la jetée. Les premières Shield Maiden faisaient reculer pas à pas les miliciens débordés dont certains gisaient déjà en sang au sol. La barrière humaine qu'ils avaient formée alors qu'elles étaient encore au large n'était plus qu'un souvenir. Un combat idéal pour les Shield Maiden.
Lyvanya bondit littéralement vers le premier homme qui lui fit face, l'emportant, sous le poids de son corps et de la surprise, au sol pendant que l'une des lames de la guerrière se frayait un chemin entre ses côtes, à travers la cuirasse sensée le protéger. Il était mort avant de toucher violemment le sol.
De son côté, à quelques pas derrière la combattante, Æsa tira, presque à bout portant, dans le front de l'homme qui se dirigeait vers Lyvanya pour porter secours à son compagnon, puis, sa vision périphérique repérant un mouvement, elle sortit une nouvelle flèche, l'encocha, tira la corde et la relâcha dans un même mouvement fluide et presque instinctif, elle ne disposa que d'une fraction de seconde pour modifier la trajectoire du trait lorsqu'elle se rendit que ce n'était pas un soldat qui courait le long des maisons, à une cinquantaine de mètres de là. En conséquence, le trait toucha tout de même sa cible, même s'il se contenta semble-t-il de ficher le col du vêtement de la femme au bois. Elle hurla mais ne pensa pas à se dégager, son cerveau probablement paralysé par la peur comme l'avait été celui de la chasseuse presque deux semaines plus tôt. Sans s'attarder, elle encocha une nouvelle flèche et regarda ce qu'il se passait autour d'elle mais tout était déjà fini.
Les miliciens étaient deux fois moins nombreux que les Shield maiden et ils avaient déjà perdu des hommes avant même le début du combat. Elle ne vit aucune tête aux cheveux blancs parmi les cadavres abreuvant les pierres de leur sang et elle en fut soulagée. Elle était consciente que cela ne durerait pas mais elle prenait ce qu'elle pouvait.
Les Shield Maiden commencèrent à s'avancer dans la rue principale et dans les autres ruelles qui débouchaient sur le port, par petits groupes vigilants. Les arcs étaient prêts à lâcher leurs flèches et les lames étaient sur leurs gardes, capable de détourner un trait en une fraction de seconde. Il leur fallait s'assurer qu'aucun autre groupe de soldats ne se dirigeaient vers les Shield Maiden qui n'avaient pas participées au combat et qui commençaient déjà à décharger les navires. Une fois que les autres groupes les auraient rejointes, il leur faudrait fouiller les maisons une par une pour s'assurer de leur sécurité.
La femme, ignorée par toutes, continuait de crier depuis ce qu'il semblait des heures alors qu'au fond d'elle-même la chasseuse savait qu'il ne s'était écoulé qu'une dizaine de secondes depuis son dernier tir. Tout allait si vite et si lentement dans son esprit. La seule fois où elle avait connu cela, encore que son esprit était alors partiellement pollué par la peur, c'était lors de son tout premier combat, contre les deux hommes qui l'avaient poursuivie dans les bois.
Aaditya les avait rejointes, Lyvanya et elle, et tandis que sa mentor se relevait, elle commença à bouger vers la femme, ses yeux volant sans cesse d'un toit à l'autre, et d'une ombre à l'autre. Toute aussi prudente, Aaditya gardait elle aussi son arc bandé tandis que la plus âgée des trois combattantes monta ses lames devant elle, prête à les défendre toutes les trois.
- Silence ! Finit par hurler Æsa qui avait l'impression que ses oreilles saignaient maintenant qu'elle n'était plus qu'à deux mètres de la villageoise.
Son cri cessa aussitôt et quand bien même elle était clouée au mur par la flèche et son vêtement, elle tenta de reculer pour se fondre dans la pierre. Elle sanglota et ferma les yeux lorsque la chasseuse approcha sa main. Elle poussa un bref cri de frayeur lorsque cette dernière arracha la flèche du bois, la libérant par la même occasion.
Cependant, la femme ne chercha pas à s'enfuir. Elle se laissa simplement tomber sur le sol et éclata en sanglots.
- Laissons-là, il nous faut avancer, intervint Lyvanya.
Sachant qu'elle avait raison, aucune de ses deux compagnes ne contesta son ordre et ils reprirent leur progression.
Il était particulièrement stressant de progresser ainsi dans les rues désertes de ce village inconnu et qui ne ressemblaient à rien de ce qu'elles connaissaient. Chaque recoin, chaque porte fermée pouvaient, en plus, abriter un ennemi prêt à surgir sur leur passage mais elles ne croisèrent pas âme qui vive jusqu'à la dernière maison qu'elles atteignirent cinq minutes plus tard. Elles n'avaient guère fait plus de deux cents mètres mais elles avaient avancé avec prudence.
Au loin, elles aperçurent des Shield Maiden qui s'approchaient au pas de course, probablement celles du navire qui avait accosté le plus à l'ouest du village. Elles les attendirent puis une partie d'entre elles s'installa à une distance respectable du village pour prévenir toute fuite et être à l'abri tandis que les autres accompagnèrent les trois guerrières vers le port, au pas de course, toujours, mais avec prudence.
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Shield Maiden
FantasyIl existe au nord des terres déchiquetées, des milliers et millions d'îles et d'îlots battus par les vents et couverts de glace pendant la majeure partie de l'année. Des terres qui sont si inhospitalières que les gens qui vivent là n'ont pas même le...