Chapitre 7 : The Bloody Mountain Call / The song of the incoming Death (fin)

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Si les Shield Maiden tombaient, elles n'étaient pas les seules si bien qu'elle se retrouva à combattre contre un homme qui n'avait pas la tenue d'un garde du corps. Il ne lui fallut que trois passes pour se rendre compte que son niveau était globalement bien inférieur et pour prendre le dessus dans le duel. Elle ne rendit compte qu'au moment de trancher son cou qu'il s'agissait d'un général. Et lorsqu'il s'effondra, la voie devant elle fut soudain libre. Elle se rua vers l'homme dont le visage semblait vert-pâle. Elle pensait le prendre par surprise mais il la vit arriver et en conséquence, il eut le temps de tirer son épée.

Il avait beau être roi, il était clair qu'il savait manier son arme. Il n'avait pas l'expérience d'un soldat de métier, encore moins de l'un de ses gardes du corps, mais il avait l'assurance de celui qui s'entraîne régulièrement. Cela n'était cependant pas suffisant.

Son assurance disparut lorsqu'il récolta une vilaine entaille au flanc droit. Il n'eut pas le temps de récupérer car elle poussa son avantage au maximum. Alors qu'elle aurait pu en finir très rapidement, elle trouva un certain plaisir à n'infliger que de profondes blessures. C'était contraire à ce qu'elle avait appris et à ce en quoi elle croyait mais elle n'était plus une chasseuse. Cet homme avait tué celle qu'elle avait été et elle venait récolter sa vengeance.

Les combats autour d'elles n'avaient pas cessé pour autant et ses camarades continuaient à tomber, si bien qu'elle fut forcée d'achever son duel. Ses attaques se firent soudain beaucoup plus rapides, noyant l'homme sous un déluge d'acier l'obligeant à rester sur une position particulièrement défensive. Et sous ce brouillard gris et cet océan de lames, elle rompit soudain le combat, virevolta en passant à côté du monarque puis se retourna violemment, détachant définitivement la tête de son corps.

La scène sembla comme se dérouler au ralenti et il lui fallut une longue seconde pour comprendre que c'était étrangement le cas, le ralenti s'accentua rapidement jusqu'à figer complètement les corps. Pourtant l'herbe et les arbres bougeaient toujours sous une faible brise, et les quelques nuages cotonneux dans le ciel continuaient leur paresseuse avancée. Elle pouvait elle-même bouger la tête et les yeux et respirer mais pour le reste, elle ne pouvait plus rien faire, comme si elle avait été soudain incapable de bouger ou même de sentir le reste de son corps. Elle était encore en plein saut mais elle ne semblait plus être soumis à l'attraction du sol. Elle restait ainsi stoppée en plein ciel, ses lames figées laissant un arc sanglant tout aussi immobile dans le ciel, tout comme la tête qui bien que libre, se contentait de rester suspendue. Cela avait quelque chose de macabre puisque la force des lames lui avait appliqué une rotation qui faisait que la combattante faisait désormais face à l'expression horrifiée du monarque au moment de sa mort.

Elle capta l'ensemble de cette scène en l'espace de quatre ou cinq secondes car par la suite, elle fut soudain aveuglée par une lumière si intense que celle émise par les Valkyries qui prenaient forme ne semblait avoir que la puissance d'une vague étincelle en plein jour. C'était comme si l'astre solaire lui-même avait décidé de se téléporter soudain sur terre et plus spécialement sur le champ de bataille. C'était une grande chance que ses paupières ne soient pas paralysées car elle put ainsi les fermer et protéger ses yeux, même si cela semblait particulièrement dérisoire.

Par chance la luminosité diminua graduellement, mais cela n'empêcha pas la jeune femme de voir flou lorsqu'elle rouvrit les yeux. Et il lui fallut quelques dizaines de secondes pour pouvoir à nouveau regarder autour d'elle.

La lumière avait pris pied en haut de la falaise au sud du champ de bataille. Il s'agissait d'une femme à l'apparence humaine mais qui même ainsi continuait à émettre une partie de cette lumière. C'est en notant cette présence surnaturelle que Æsa se fit la réflexion que même les Drakes et Valkyries, malgré leur puissance, étaient tout aussi figés que les humains. Ce qui ne laissait qu'une hypothèse pour cette personne là-haut : il s'agissait de celle que la Gardienne aux Étoiles appelées Mère : la déesse Gaïa en personne. L'ancienne chasseuse était si surprise qu'elle mit quelque temps à noter que des bois étaient sorties d'autres créatures surnaturelles qui semblaient constitués uniquement de feuilles contenues dans des sortes de tourbillons perpétuels et qui, pourtant, ne faisaient pas le moindre bruit.

- Mère. Elles ont attaqué nos terres.

C'était un Drake, et pourtant le son semblait provenir de chacun d'entre eux. Comme si en cet instant ils n'étaient qu'une seule et unique entité.

- Votre peuple bafoue les frontières établies : il a réduit en esclavage celui de vos enfants et tenté d'annihiler celui de vos épouses. J'avais ordonné un retrait de ce monde, et pourtant vous êtes ici.

- Nous n'avons fait que défendre notre peuple contre les actions de nos épouses.

- Il y a du vrai. Mais pensez-vous réellement que cette défense soit justifiée. Votre peuple a fortement dévié de la voie qui lui avait été choisie.

Les Drakes baissèrent la tête d'un même mouvement, comme honteux. Si Æsa se souvenait bien, ils étaient plus limités que les Valkyries d'après ce que Danse-Mort avait sous-entendu, ce qui expliquait pourquoi ils n'avaient pas réussi à mettre leur peuple sur une voie en accord avec les enseignements de la déesse.

Tout en se faisant cette réflexion, la jeune femme ressentit une immense satisfaction en voyant la réaction des hommes présents : l'horreur sur leur visage en comprenant que leurs divinités étaient sous les ordres d'une femme.

- Dit-moi jeune Shield Maiden, tu me sembles bien satisfaite.

Le cœur de l'ancienne villageoise faillit s'arrêter lorsqu'elle comprit que la déesse parlait de son sourire sur le visage.

- J'ai obtenu ce que j'étais venue chercher.

- Vraiment ?

- Oui. Celui qui avait ordonné le massacre de ma famille et de mon village vient juste de perdre sa tête. Je ne peux donc qu'être satisfaite.

- Ah. La douce satisfaction de la vengeance n'est-ce pas.

Elle avait comme l'impression que c'était ironique. Et cela se confirma lorsque la déesse continua.

- Vos vies n'auraient-elles pas été plus utiles à recréer les vies perdues ?

- Non. Nous sommes insignifiantes aux regards des pertes qu'on subit les Frimarques. Des dizaines de communautés ont été exterminées : autant de diversité et de talents que nous ne pourrons remplacer. Mon peuple a été condamné à une longue et lente agonie. On ne peut pas me reprocher de vouloir la seule chose que je peux encore obtenir : la mort de tous ceux qui en sont responsables.

Intérieurement, elle fut surprise d'être capable de tenir ainsi sa position face à la Déesse de toute chose. La chasseuse qu'elle avait été n'aurait probablement même pas osé prononcé le moindre mot, alors aller jusqu'à la contredire... D'un autre côté, depuis le début de cette mission suicide, elle était comme anesthésiée, incapable de ressentir la moindre peur. Comme morte à l'intérieur.

- Je dois reconnaître qu'il y a du vrai, même si vos méthodes ne me plaisent pas. Je ne peux cependant accepter que cette situation perdure sans fin et que mes filles perdent à terme leur peuple. Je suppose qu'il est temps de remettre certaines pendules à zéro.

Elle étendit le bras et avant même qu'elle n'ait le temps de fermer les yeux, Æsa perdit connaissance.

Shield MaidenOù les histoires vivent. Découvrez maintenant