Chapitre 14

364 24 0
                                    

Je grignote du bout des dents le repas que Béa m'a préparé. Je n'ai pas vraiment faim après tout ce qui se passe ses derniers temps. Le stress constant lors des gardes, mes entraînements qui m'épuisent physiquement et mentalement, la peur de perdre mon meilleur ami au profil d'une fille que je n'arrive pas sentir, la mort de mes parents et sans oublier ce loup que je n'arrive pas à détester du tout. Aspen a été si gentil avec moi à la mort de mes parents que je ne peux pas m'empêcher de remettre en doute les causes réelles de cette guerre sans fin entre son espèce et la mienne. Je suis plus mélangée qu'un jeu de cartes et aussi confuse qu'un poisson dans un bocal.

Une semaine est passée depuis ma dernière rencontre avec mon loup. À mon grand étonnement, Noah n'était même pas fâché que j'aie disparu toute la nuit, bien au contraire. Il a été plutôt compréhensif, disant que j'avais besoin de temps pour moi. Il a seulement été inquiet qu'il me soit arrivé quelque chose puisque je n'étais plus où j'avais passé la totalité de la nuit. Sous les ordres de Milan, j'ai dû cesser les gardes de nuit afin de pouvoir faire le deuil de mes parents et me reposer correctement. Cette fois, je n'ai pas réussi à le convaincre de me laisser veiller sur la forêt environnant le village. J'apprécie l'attention, mais je n'en peux plus de voir de la pitié dans le regard de tous ceux que je croise ! Oui, c'est très dur des avoirs perdus, mais je connais les risques que comporte ce mode de vie et au fond de moi, j'étais préparé à cette éventualité. Je ne m'attendais pas à les voir partir aussi rapidement, mais je savais à chaque fois qu'ils quittaient la maison que c'était peut-être pour la dernière fois.

Mes amis me traitent aux petits onions et se soumettent à chacune de mes demandes. Ils me couvrent constamment et pour être honnête, j'en ai ma claque ! Je n'en peux plus qu'on me traite comme si j'étais une petite chose fragile sur le point de se briser. Je suis beaucoup plus forte que ça et ils devraient le savoir. Il m'est arrivé quelque chose de terrible, mais le monde en entier ne s'arrête pas pour moi. La vie continue et si tout le monde continue de me ménager, je vais devenir complètement folle.

''Tu n'es pas obligée de manger si tu n'aimes pas ça, dis-moi ce que tu veux et je remets au fourneau.'' Me dis Béa.

''Ce n'est pas que ce n'est pas bon, je n'ai juste pas d'appétit. Peu importe ce que tu prépares, je ne le mangerais pas.'' Je lui réponds.

''Cam, tu as l'air malade et tu semble à peine tenir debout... tu devrais au moins finir ton assiette. Tu n'as rien mangé hier non plus'' ajoute Noah.

''Je n'ai pas faim ! Lâche-moi avec ça, merde !''

Noah écarquille les yeux. Je me sentirais un peu mal s'ils ne me jouaient pas le même refrain à tous les repas. Il me surveille comme une mère poule et rapporte tout ce que je fais à Louka qui ne fait pas mieux que lui. Je pousse mon assiette, mais garde le thé que m'a fait Béa. Le temps commence à se refroidir et les nuits à s'allonger, l'hiver approche. J'ai troqué mes cuissards et mes corsets en cuir pour des pantalons doublés et des chandails à manches longues. J'entends la clochette de la porte de l'auberge sonnée. Louka et camélia entrent et donne un peu de vie à l'endroit. Ils ont l'air tous les deux complètement épuisés, non exténués plutôt. J'ai cru comprendre par Aspen que les loups au Sud étaient beaucoup plus agressifs que ceux au Nord. Je vais lui demander plus d'information dès que je le revois.

Il y a eu un assaut au courant de la semaine au village de Dorn, plusieurs blessés, mais heureusement aucun mort. Camélia pose la tête sur le comptoir et ferme les yeux. Louka se contente de prendre appui sur ses poings. Ils ont tous deux des traces violacées sous les yeux. Ils sont peut-être la meilleure équipe de notre cohorte, mais nos formateurs abusent sur le nombre de taches qu'ils leur confient.

"Bégonia, tu me ferais un café noir s'il te plait ?" Chuchote Louka.

"Oui tout de suite."

Elle disparait aussitôt en cuisine. Louka tourne la tête vers moi en gardant son appui sur son poing. Ses yeux ferment tout seuls et ses vêtements sont recouverts de boue. Il est en pire état que moi lors de ma première garde.

Red WoodsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant