Antigone

10] Appréhension

Comment va-t-il réagir en lisant et en comprenant? Il ne lui avait jamais demandé ce détail alors elle n'a jamais menti, mais elle ne s'est pas non plus pris la peine de le préciser dès le début, alors que c'est sûrement ce qu'elle aurait dû faire en toute honnêteté.

Antigone a remplit le questionnaire et attend, le doigt au dessus de la touche « Entrée » de son ordinateur pour le renvoyer par mail à Césaré.

Comme demandé elle a été le plus juste et honnête possible... même si elle aurait sans doute préféré mentir pour quelques activités en particulier.

Même si certaines catégories l'effrayaient tout particulièrement elle n'a réellement mis un «N» exprimant un « NON » catégorique et quelques soient les circonstances pour uniquement trois activités, à savoir:
~Fisting (vaginal)
~Fisting (anal)
~Se faire donner à une autre personne dominante

Elle a mis pour certaines un zéro pour l' « Envie » et un cinq pour la « Difficulté » à fin de montrer au maximum que même si cela peut l'effrayer elle est prête à aller au maximum d'elle même à condition que son partenaire Dominant soit tout particulièrement attentif et précotionneux en vers elle... 

Et si non elle a inscrit au plus proche de la réalité ce qui la tentait réellement, ce qui lui paraissait facile ou plus complexe, etc...

Mais ce n'est pas ça qui effraye Antigone. Ce qu'elle redoute le plus est la réaction que Césaré va avoir lorsqu'il lira une tout autre colonne: la première.

Mais elle ne veut pas réfléchir plus, ou elle sait que jamais elle n'aura le courage d'envoyer ce fichu mail.
Alors sans une seconde de plus d'hésitation elle appuie sur la touche de son clavier et instantanément le courriel s'envoie à son destinataire.

Elle remonte ses jambes contre sa poitrine, toujours assise sur son canapé et attend, tremblante d'angoisse, une réponse. Du moins s'il lui répond après ça...

Les minutes passent. Des minutes interminables qui ne font que la torturer au plus profond d'elle même.
Et puis soudain la sonnerie de son portable retentit.
Elle regarde l'écran: Césaré l'appelle...

Une première sonnerie... une deuxième... une troisième... une quatrième...
Elle décroche, porte le téléphone à son oreille et avale sa salive avec difficulté avant de dire d'une petite voix:

-Allô?
-Antigone. Je viens de recevoir tes réponses.
-Je sais...
-Est-ce que... j'ai véritablement compris?
-J'imagine bien oui. Tu as regardé la colonne « Essayé » n'est ce pas?
-Oui.

Un silence se fait entendre, un silence insupportable pour Antigone jusqu'à ce que Césaré ajoute d'un ton calme:

-Tu aurais du m'en parler. Avant.
-Je sais. Je... je suis désolée... Je ne voulais pas... t'effrayer.
-« M'effrayer »?
-J'ai lu quelque part que le Dominant devais être sûre que sa soumise est la maturité sexuelle nécessaire pour se lancer dans ce genre de relations...
-C'est vrai...
-Alors, j'imagine que cela veut dire qu'on n'ira pas plus loin...
-Je n'ai pas dit ça.

Une lueur d'espoir vient soudain percer dans l'obscurité du cœur d'Antigone.

-Mais d'abord je dois te poser une question.
-Je t'écoute.
-Pourquoi es tu toujours vierge?

Antigone redoutait cette question.
Elle ferme les yeux et se frotte le front du bout des doigts un instant avant de répondre doucement:

-Parce que comme je te l'ai dit la sexualité « normale » ne m'a jamais attirée, et m'a même relativement repoussé. Je ne peux pas. Je n'y arrive pas. Il y a bientôt deux ans, je suis sortie avec un mec. Ça a été ma première vraie relation. Un garçon lambda, gentil et rangé. J'étais bien avec lui, même si je me rends à présent compte que je le considérais plus comme un ami que comme autre chose. Un soir on était chez lui et les choses ont tourné de telle sorte que si j'avais été « autrement », nous aurions fait l'amour. Mais j'ai paniqué, je me sentais mal, j'avais l'impression de jouer un rôle. Ce n'était pas moi qui était nue avec lui, c'était quelqu'un d'autre.
Alors quand j'ai réalisé que ce n'était pas ce que je voulais j'ai violemment réagi, bien plus violemment que je n'aurais dû... Il a dû me prendre pour une folle, et tant mieux. Je me suis rhabillée en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire et je suis partie le plus vite que je le pouvais. Je ne l'ai jamais revu et c'est mieux comme ça. Quand mes amis m'ont demandé ce qui s'était passé j'ai inventé une raison stupide et voilà. Depuis je n'ai plus jamais voulu m'engager dans la moindre relation par peur que ça se reproduise de la même façon. Néanmoins mes envies sexuelles ne diminuent pas pour autant et depuis mon adolescence je les cache et les enferme au plus profond de moi...

Antigone réalise à quel point elle vient de se révéler à lui. Elle se sent idiote d'avoir tant parlé de choses si intimes et personnelles. Comment pourrait-il comprendre réellement ce qu'elle essaye d'exprimer?

Mais soudain, la voix de Césaré se fait entendre à l'autre bout du fil:

-Tu les cachais... jusqu'à ce que tu viennes dans ce club et que tu me rencontres. Je pense qu'il est tant que je te libère de tes chaînes de frustration non?...