63] Route

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Cette fois ce n'est pas un chauffeur qui ramène Antigone chez elle, mais directement Césaré. Ils sont dans la voiture, presque seuls dans les rues parisiennes, ce qui est plutôt normal vu l'heure tardive qu'il doit être.
Antigone commence à être sérieusement fatiguée. Elle a eu une semaine éreintante et cette soirée n'a rien arrangé. Elle a l'impression de n'avoir jamais été aussi épuisée. Mais malgré son envie d'être déjà dans son lit, une autre envie est largement supérieure: elle veut savoir qui est Diane pour Césaré.

Ce dernier est silencieux. Il est concentré sur la route et est visiblement tendu.
Au bout d'un moment elle comprend que ce n'est pas lui qui engagera la moindre conversation alors elle décide de briser le silence:

-Qui est-elle? Diane.

Elle remarque aussitôt qu'en entendant ça il contracte sa mâchoire et tend d'avantage ses muscles pour serrer le volant.

-La propriétaire du Rouge et le Noir. Avec son mari.

Belle tentative de sa part pour éviter une réponse embarrassante, mais la jeune femme ne se décourage pas aussi facilement.

-Je sais. Je voulais dire... qui est-elle par rapport à toi?
-Je viens de te répondre. La propriétaire de l'établissement où je me rends souvent. Elle connaît ses clients réguliers, c'est normal.

De toute évidence, lui aussi est tenace.
Antigone décide donc d'arrêter de tourner autour du pot et lache la question dont elle n'est en réalité pas sure de vouloir connaître là réponse:

-Il s'est passé quelque chose entre vous?

Aussitôt, Césaré donne un léger coup de volant incontrôlé sur le côté. Il ralentit, choqué par cette question et tourne légèrement son visage vers Antigone sans cesser de surveiller la route:

-Pardon?!
-J'ai dit...

Il la coupe brusquement:

-J'ai entendu!

Il soupire pour se calmer et reprend d'un ton plus calme:

-Non, bien sûr que non il n'y a rien eu entre nous!

La jeune femme est si soulagée qu'elle ne saurait décrire la bouffée d'oxygène si apaisante qui introduit ses poumons.

-Désolée mais... on aurait pu penser que...

Il la coupe une nouvelle fois, agacé:

-Arrête de penser alors si c'est pour t'imaginer des choses aussi absurdes.

Antigone est vexée de cette remarque. Elle croise les bras devant sa poitrine et se met à fixer les lampadaires qui défilent par la vitre, se murant à son tour dans le silence.

Césaré lève les yeux au ciel. Il n'a jamais eu la patience nécessaire pour supporter les mauvaises humeurs de ses soumises. Par dessus tout, il déteste qu'on lui fasse la gueule, qu'elle qu'en soit la raison.
Mais, cette fois, il est prêt à faire un effort.

-Antigone... excuse-moi d'avoir dit ça. Mais vraiment non crois moi, il ne s'est rien passé et ne se passera jamais rien. Ce serait... disons le, dégeulasse.
-Nous avons quatorze ans d'écart. Je ne sais pas quelle est votre différence d'âge à tous les deux mais franchement si c'est ça qui vous a arrête j'en suis bien surprise.
-Je ne parle pas de ça.
-Pourquoi dis tu « dégeulasse » alors?

Césaré soupire une nouvelle fois. Cela l'arrange de conduire, au moins il n'a pas à croiser le regard d'Antigone.
Il finit par dire d'une voix teintée de désespoir:

-Tu ne passeras pas à autre chose tant que je n'aurais pas répondu c'est ça?...

Elle est heureuse de voir qu'elle n'aura pas à se battre pour avoir une réponse.
Alors Césaré finit par lâcher la phrase à laquelle Antigone n'aurait jamais pu ne serait-ce qu'imaginer dans ses plus étranges rêves:

-Diane est ma génitrice.

Antigone Où les histoires vivent. Découvrez maintenant