Nez à nez.
Avec lui.
Impossible de fuir.
Impossible de s'échapper.
Impossible de s'évaporer.Le voir comme ça, face à elle, alors qu'elle croyait que cela n'arriverait pas, lui fait l'effet d'une gifle. Ils restent l'un en face de l'autre, sans bouger ni parler. Jusqu'à ce que finalement Césaré ouvre la bouche:
-Où comptais-tu aller? Il est deux heures du matin.
-Je... je ne...Elle ne sait pas quoi dire. Elle n'arrive même pas à parler tant sa gorge est serrée.
Il fronce les sourcils mais finit par détendre son visage et dit d'un ton serein:-Allez rentre. On sera mieux à l'intérieur pour discuter de toute façon.
Il fait un pas en avant mais aussitôt la jeune femme reprend possession d'elle même et le retient en plaquant sa main sur son torse:
-Non.
-Comment ça « non »?De toute évidence il n'a pas l'habitude d'entendre ce mot.
-Non je ne veux pas discuter.
-Ce n'était pas une demande.
-Je sais, mais je n'ai aucune envie de te parler, et tu ne peux pas m'y forcer.Il plisse les yeux et la regarde d'une manière de défi.
-C'est vrai. Je ne peux pas t'y obliger. En revanche tu vas m'écouter.
Il attrape Antigone par le bras en prenant garde à ne pas lui faire mal mais néanmoins férocement et la fait rentrer avant de claquer la porte derrière eux.
-Arrête! Je t'interdis de...
Il la coupe aussitôt:
-Je croyais que tu ne voulais pas me parler...
Il ne fait qu'amplifier sa colère. Elle est au bord de la crise de nerfs et prend sur elle pour ne pas éclater.
Elle expire longuement et finit par lâcher:-Si je te laisse dire ce que tu as à dire... tu partiras après?
-Je ne...
-Réponds!
-Très bien. Si tu m'écoutes réellement alors ensuite je partirais.
-Alors dans ce cas vas y parle.Elle ne cache pas son agencement et il est surpris du mépris qui teinte dans sa voix. Il ne s'attendait pas à ce qu'elle soit aussi agressive, c'est la première fois qu'il découvre cette part de sa personnalité, et même s'il refuse de se l'avouer: cela lui plaît.
Il reste muet et la toise. Alors elle finit par lâcher:-Je croyais que tu voulais que je t'écoute. C'est ce que je fais. Si tu comptes simplement rester là à me fixer alors va faire ça avec ta pute.
Wahou...
Aussitôt ce dernier mot sorti de sa bouche Antigone le regrette, mais trop tard maintenant, le fond de sa pensée a été avouée, elle ne peut plus revenir en arrière. Alors au lieu de montrer ses doutes et ses faiblesses elle garde son air méprisant et dédaigneux.
Césaré est d'abord sous le choc, mais il reprend rapidement ses habitudes de fierté et un petit rictus insupportable vient apparaître au coin de sa bouche.-Tu es jalouse n'est ce pas?...
Elle plisse les yeux. Lui répondre oui serait lui donner trop d'importance, et elle ne veut pas lui faire se plaisir.
-Je ne suis pas jalouse.
-On dirait bien pourtant vu ta réaction.Il se fiche d'elle ou quoi?!
Elle sert des poings pour se forcer à ne pas lui sauter dessus et le frapper.-Qu'elle aurait été ta réaction? Si tu m'avais trouvée nue avec un autre homme.
-Cela n'a rien à voir.
-Bien sur que si!
-Bien sur que non! Le contrat indique expressément que tu n'as en aucun cas ce droit. Moi en revanche je peux posséder autant de soumises qu'il me plaît.
-Arrête avec ce contrat! Tu ne m'avais jamais dit ça clairement!
-Je ne t'avais jamais dit le contraire non plus.Elle pousse un grognement de frustration et se met à marcher dans la petite pièce, espérant que cela la calmera.
Césaré finit par soupire également et lui dit d'une voix calme:-Écoute. Je ne t'ai jamais menti sur quoi que se soit. Parce que d'après moi toute relation D/s doit être basée sur la confiance. Alors arrête de me reprocher ça. Tu m'as dit que tu t'étais renseignée avant de venir dans ce club. Tu sais donc forcément qu'un Dominant peut avoir plusieurs soumises, et c'est ce qui arrive dans la plus grande majorité des cas, à moins que le contrat dise expressément le contraire.
-Je t'ai dit stop avec ce contrat!Il se passe la main dans les cheveux et s'approche d'elle. Elle est face au mur, dos à lui, les bras croisés. Il veut poser ses mains sur ses bras mais aussitôt elle se dégage et s'écarte. Il perd aussitôt patience à son tour:
-Oh je t'en pris arrête ce cinéma! Tu n'as plus quatre ans!
-Très bien. Très bien admettons que tu as raison.
-J'ai raison...Elle se mord la lèvre pour s'empêcher de relever sa remarque et poursuit:
-Admettons donc que jusque là tu n'es pas en tord. D'accord. Mais est-ce que tu es conscient de ce que tu m'as fait subir tout à l'heure?!
-Quoi?
-Ne fais pas exprès de ne pas comprendre! Tu sais parfaitement de quoi je parle!
-Développe.
-Tu... tu m'as traînée dans cette chambre! Tu m'as forcée à regarder! Tu m'as forcée à la frapper! Tu n'as pas... tu n'as pas cessé alors que je hurlais! Alors que je... je pleurais et je te suppliais! Mais tu as continué malgré tout!Sa voix craque et un sanglot incontrôlé surgit. Elle a du mal à s'exprimer malgré toute la colère qui monte en elle.
Son Maître reste muet quelques secondes, face à elle, à inspecter chaque millimètre de son visage. Et au bout d'un temps qui semble durer des décennies à Antigone il répond:
-Tu as dit ton Safeword, et j'ai arrêté à la seconde même.
-Oui. Mais tu aurais du savoir qu'il fallait que tu arrêtes avant.
-« J'aurais dû savoir ». Tu ne peux pas baser une relation SM sur des « tu aurais dû ». Je n'aurais dû rien du tout. Tu as dit Algea et j'ai respecté le contrat à la lettre.
-ARRETE AVEC CE CONTRAT!Elle ne peux s'empêcher de hurler, et les larmes continuent de couler sur ses joues. Elle n'en peut plus d'entendre le mot contrat à tout bout de champ et pour tout excuser. Contrat. Contrat. Contrat.
-JE SAIS! JE SAIS PARFAITEMENT QUE CETTE RELATION N'EST RIEN DE PLUS POUR TOI QUE L'APPLICATION DE CE CONTRAT! MAIS POUR MOI CE N'EST PAS JUSTE ÇA... C'EST...
Elle s'arrête subitement. Réalisant qu'elle est allé beaucoup trop loin dans ses paroles. Elle ravale toute sa colère et essuie ses yeux, ce qui est peu utile étant donné qu'ils se remettent aussitôt à verser de nouvelles larmes. Des gouttes salées glissant silencieusement sur ses joues rouges et humides.
Césaré la toise et avance d'un pas, elle ne bouche pas et a les yeux baissés, ne pouvant réussir à croiser son regard.
-Je t'écoute. Finis ta phrase.
Antigone reste muette et paralysée.
Il s'approche encore, jusqu'à n'être plus qu'à quelques centimètres d'elle. Il lève sa main et vient attraper son menton pour relever son visage vers lui. Elle ne peut plus détourner les yeux, elle est contrainte de le regarder. Il se penche légèrement vers son visage et articule doucement:-Finis ta phrase Antigone. Ce n'est pas une demande. C'est un ordre que je te donne. Je veux t'entendre prononcer les mots qui sont coincés juste ici...
Et en disant ce dernier mot il glisse sa main sur la gorge de la jeune femme et poursuit:
-Je les sens se débattre sous ta peau. Ils veulent sortir. Laisse les se libérer. Ou il finiront par t'étouffer...
Il ne dit pas d'une manière menaçante ni pressée. Bien au contraire. Il est protecteur, doux, sincère.
Mais elle ne peut pas se résoudre à lui dire ce qui la torture au plus profond d'elle même. Alors elle finit par murmurer, si doucement que ses paroles sont presque inaudibles:-Et bien qu'ils m'étouffent alors... Antigone est morte jeune, c'est peut être ma destinée également; comme celle de Cesare. Mais je ne veux pas mourir avant.
-Avant quoi?
-Avant ça...Et sous les yeux hébétés de Césaré, Antigone attrape le bas de son t-shirt, et dans un dernier battement de cœur, le passe au dessus de sa tête.
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Antigone
Romance« Mais la véritable question est: aimez vous les choses particulières?... » -2019-